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Loi Macron : la gauche tique, la droite tacle

La majorité PS, en grande partie hostile à l'élargissement du travail dominical, est sommée par Matignon de soutenir le texte. L'UMP se frotte les mains.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, le 10 décembre 2014 à l'Assemblée nationale. (PATRICK KOVARIK / AFP)

De la politique friction. Une gauche sommée par le gouvernement d'adopter "l'un des textes les plus importants du quinquennat". Une droite qui s'érige contre des mesures qui auraient très bien pu sortir de ses propres cartons. Le projet de loi Macron "pour la croissance et l'activité", présenté mercredi 10 décembre en conseil des ministres, renverse totalement les habituelles postures gauche-droite en matière de politique économique.

Des députés PS priés de soutenir le texte

Ainsi les députés PS sont priés de voter ce "fourre-tout libéral", selon le patron de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, qui, pêle-mêle, assouplit le travail dominical et nocturne, ouvre le capital des professions réglementées du droit (notaires, avocats…) ou privatise des aéroports. Signe de l'importance de ce texte, Manuel Valls a lui-même assuré la promotion du projet de loi face aux journalistes, à l'Elysée, flanqué de dix ministres.

Manuel Valls, entouré de plusieurs ministres, présente le projet de loi pour la croissance et l'activité, mercredi 10 décembre à l'Elysée. (POOL / REUTERS)

"Tout le monde doit accepter de changer ce qui ne fonctionne pas bien, ce qui pénalise l'activité", a déclaré le Premier ministre, voyant dans ce texte "une loi de liberté et de progrès". Et s'il admet qu'"il y aura un dialogue avec le Parlement", Manuel Valls ne doute pas un seul instant "que la majorité s'engagera sur ce texte" lorsqu'il sera discuté, à partir du 22 janvier.

Mais dans les rangs de la majorité, l'accueil est glacial. Martine Aubry a opportunément choisi ce jour de communication gouvernementale pour dénoncer, dans une tribune au Monde, une "régression de notre société". L'attaque a réussi à agacer Manuel Valls, qui a multiplié les piques assassines contre la maire de Lille pendant sa conférence de presse.

"Ça me rappelle le 'travailler plus pour gagner plus'"

A l'Assemblée, comme au Parti socialiste, la copie d'Emmanuel Macron laisse sceptique. La possibilité pour les commerces de passer de 5 à 12 ouvertures dominicales par an a du mal à passer à gauche. "Nous demandons que ce chiffre soit compris entre 5 et 7, c'est-à-dire proche de la situation actuelle", a déclaré la secrétaire nationale du PS à l'Economie, Karine Berger, pourtant loin d'être une frondeuse. A titre personnel, elle considère que le projet de loi Macron ne pourra générer que 0,1 point de croissance, et que les véritables leviers de croissance sont absents du texte.

Des arguments largement repris dans les couloirs de l'Assemblée, mercredi après-midi. "Que les commerces situés dans les zones touristiques, les aéroports et les gares ouvrent le dimanche, oui. Mais que tous les commerces puissent ouvrir un dimanche par mois, non !", lâche Olivier Faure, proche de Jean-Marc Ayrault. "Cela me rappelle un vieux slogan, sourit son collègue Christian Paul, proche de Martine Aubry. 'Travailler plus pour gagner plus'."

D'autres au PS ont moins d'états d'âme. "Une régression ? Ceux qui le pensent n'ont qu'à aller au bout de leur logique et proposer la suppression totale du travail dominical !, ironise le député Razzy Hammadi. Je leur rappelle que ce texte prévoit une compensation obligatoire pour les salariés, et que c'est dans ce texte que l'on va mettre fin aux retraites chapeaux indécentes !"

La droite applaudit en silence

Face à ces divisions, la droite a décidé de mener une opposition frontale. Alors que nombre d'élus UMP sont favorables à un assouplissement du travail dominical ou à une libéralisation des professions réglementées, les ténors du parti répètent qu'Emmanuel Macron est "hors-sujet".

"C'est une loi vide de sens, qui ne permettra en aucun cas de créer de la croissance", tranche Daniel Fasquelle, le nouveau trésorier de l'UMP. "Qu’on puisse travailler plus le dimanche, pourquoi pas, qu’il y ait davantage de concurrence entre le train et les bus, pourquoi pas. Mais ce n’est pas à la hauteur du manque structurel de croissance", lâche Eric Woerth dans Les Echos. Pendant que la gauche avalera des couleuvres, la droite applaudira en silence.

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