Extraction de sable à Lannion : trois questions pour comprendre la polémique
Le ministre de l'Economie a simplement réduit la taille de ce chantier, contre l'avis des opposants qui estiment qu'il sera dommageable pour l'environnement.
Un chantier réduit, mais maintenu. Le ministre de l'Économie a accordé, mardi 14 avril, une concession pour l'extraction de sable coquillier dans la baie de Lannion (Côtes-d'Armor). Cette extraction se fera de manière limitée et progressive, selon le ministère. Les opposants au projet ont claqué la porte d'une réunion à Bercy, après l'annonce de cette décision.
Que prévoit ce projet d'extraction de sable ?
L'extraction de sable coquillier dans la baie de Lannion a été sollicitée par la Compagnie armoricaine de navigation (CAN) fin 2009. Son but : extraire au total huit millions de mètres cubes de sable pour en faire des engrais et fertilisants agricoles. La dune sous-marine visée par le projet est située à moins d'un kilomètre de deux zones classées Natura 2000, dont celle de la réserve des Sept-Îles, sanctuaire d'oiseaux marins, selon Novethic.fr.
"Avant, nous utilisions le maërl [sable formé des débris d'une algue] collecté dans la baie de Saint-Brieuc, mais celui-ci est désormais protégé. L'Ifremer nous a demandé de nous tourner vers le sable coquillier", déjà exploité ailleurs en Bretagne, explique Pierre Le Coz, président de Timac Agro, filiale du groupe Roullier, dont dépend la CAN.
Que propose Emmanuel Macron ?
Le ministre de l'Economie a limité l'extraction à un maximum de 250 000 m3 de sable par an, contre 400 000 envisagés initialement. L'opération sera interdite entre mai et août. Elle sera limitée à 50 000 m3 au cours de la première année, avant d'augmenter progressivement pour atteindre les 250 000 m3 après cinq années d'exploitation. L'arrêté préfectoral ne sera initialement délivré que pour une période d'un an "afin de rendre effectif le suivi des opérations d'extraction et en permettre l'arrêt si nécessaire", selon Bercy.
"Les études concluent avec suffisamment de certitude à l'absence d'impact significatif sur l'environnement et les autres activités pour pouvoir débuter l'extraction, plaide Emmanuel Macron. Il faut être vigilant et démarrer progressivement avec un suivi strict pour pouvoir déceler tout impact imprévu et adapter en conséquence le projet."
Pourquoi suscite-t-il tant de remous ?
Les opposants du collectif "Le peuple des dunes du Trégor" ont exprimé leur désaccord avec la décision du ministre pendant la réunion et ont quitté les lieux. Son président, Alain Bidal, est convaincu que l'extraction va faire fuir les poissons de la région. "Les premiers touchés, ce seront les pêcheurs professionnels", craint-il. Quant à l'extraction limitée à 250 000 m3, il n'est pas convaincu par cette mesure. "Le problème ne réside pas dans les volumes. Dès l'instant où l'on attaque la dune, on attaque la biodiversité", a-t-il regretté. France 3 Bretagne rappelle, par exemple, que la dune est le lieu de reproduction du lançon, "un poisson servant de base à l'alimentation d'autres espèces, comme le bar".
Le collectif avait publié dans Le Monde une tribune contre le projet d'extraction du sable. "L'enquête publique, appuyée sur une étude d'impact indigente, n'apporte pas les garanties minimales d'une décision rationnelle et démocratique, écrivaient les opposants. Elle n'informe ni sur les solutions alternatives de lieu d'extraction ni de matériau, ni sur les effets négatifs du projet."
Le 24 janvier, rappelle France 3 Bretagne, entre 4 500 et 7 000 personnes avaient manifesté à Lannion pour protester contre ce projet. Corinne Erhel, députée PS des Côtes-d'Armor, déclarait alors à Ouest France : "Nous héritons d'une procédure de cinq ans gérée de façon inappropriée depuis le début. Les lourdes conséquences nous inquiètent. L'impact économique n'a pas été mesuré. Pour moi, la rupture avec la CAN est consommée."
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