: Reportage Crise énergétique : dans une des "tours de contrôle" où Enedis prépare des coupures d'électricité "maîtrisées" pour éviter de "perdre le réseau"
Pour éviter le black-out cet hiver, des coupures tournantes, de deux heures maximum aux heures de pointe de la consommation électrique pourraient être provoquées le matin et le soir.
Nous sommes au poste de commandement (PC) d'Enedis pour la région Centre-Val de Loire, quelque part près d'Orléans. L'adresse est classée confidentielle. Ici, remonte la moindre alerte sur les 81 000 km de lignes électriques de la région. "Vous êtes au sein de l'agence de conduite régionale (ACR), il y a 19 postes de conduites en temps réel. C'est la tour de contrôle", explique Sébastien Sarrazin, le responsable de ce PC. Cette année comme tous les ans, il est paré pour l'hiver. Mais celui-ci risque d'être particulier. Pour la première fois depuis les années 1970, le gestionnaire du réseau, RTE, peut avoir à demander des délestages : des coupures d'électricité temporaires qui peuvent toucher les entreprises et les particuliers.
Vendredi, le gestionnaire du réseau de haute tension RTE a averti d'un risque "élevé" de tensions sur le système électrique en janvier, en raison du redémarrage plus lent que prévu de réacteurs nucléaires d'EDF – près de la moitié sont encore à l'arrêt. En clair, la production électrique pourrait s'avérer insuffisante pour combler les besoins. Enedis, qui gère la distribution de l'électricité aux ménages, entreprises (hors gros industriels) et collectivités, se prépare donc à ce sénario totalement inédit.
"Les coupures d'électricité vont avoir lieu pour faire face à des pointes de consommation. Elles se situent entre 8 heures et 13 heures et entre 18 heures et 20 heures."
Sébastien Sarrazin, responsable de l'agence de conduite régionale d'Enedisà franceinfo
Les coupures pourront durer jusqu'à deux heures. "On va avoir une première information de la part de RTE à J-3, précise Sébastien Sarrazin, mais c'est véritablement la veille pour le lendemain qu'on aura un plan de délestage qu'on sera prêt à actionner le lendemain." Après confirmation de RTE, la veille au soir du jour J, le site et l'application EcoWatt publieront la carte des départements potentiellement concernés et dès 21H30, les utilisateurs pourront vérifier si leur adresse est située dans le plan de délestage.
"Un moindre mal"
Il s'agirait d'un ultime recours, si les autres moyens ne suffisent pas : la mobilisation de tous les moyens de production électrique, l'appel aux économies d'énergies et une baisse de 5% de la tension sur réseau. Une fois déclenchés dans un des 28 ACR, les ordres de coupures arrivent automatiquement dans des "postes-sources", des postes électriques, comme celui de Fleury, dans la banlieue d'Orléans, dont Eric, agent Enedis, a les clés. Ces petits bâtiments renferment plusieurs "départs", des sortes de disjoncteurs permettant d'alimenter des quartiers ou des villages. "C'est un délestage qui est maîtrisé, souligne l'agent, parce ce que ce sont des coupures tournantes".
"Un client qui va être coupé le matin de 8 heures à 10 heures ne sera pas coupé de 10 heures à 12 heures. Ce sera localisé, dans un quartier, plusieurs villages, une zone industrielle ou une partie d'une zone industrielle."
Eric, agent Enedisà franceinfo
Pour Catherine Lescure, directrice de la communication d'Enedis, en cas de tension sur le réseau, le recours à des coupures serait un moindre mal. "Si on n'arrive pas à maîtriser cet équilibre offre-demande, on peut à ce moment-là perdre le réseau, avertit Catherine Lescure. C'est ce qu'on appelle une panne géante ou un black-out. Évidemment, le but est d'éviter ce genre de problématique qui touche l'ensemble des clients, alors que des coupures temporaires permettent de s'assurer que les clients prioritaires ne soient pas coupés."
Répertoriés par chaque préfet, les clients prioritaires peuvent représenter jusqu'à 38% sur un département, surtout des structures de santé ou à valeur stratégiques.
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