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Vacances, salaire, polyvalence… Ce que le CDI intérimaire a changé dans leur vie

Ils sont intérimaires, mais bénéficient pourtant d'un CDI. Ils racontent à francetv info comment ils expérimentent ce contrat d'un nouveau genre. 

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Une agence d'intérim parisienne, le 1er octobre 2015.  (MAXPPP)

Un CDI en intérim ? Derrière cet oxymore se cache un type de contrat qui existe bel et bien. Inspiré d'expériences menées aux Pays-Bas et en Allemagne, le dispositif est entré en vigueur en mars 2014 en France, mais il peine à décoller, avec seulement 3 000 signatures sur les 20 000 espérées d'ici à 2017. 

Le principe ? Salariée d'une entreprise spécialisée dans le travail intérimaire, la personne exécute des missions chez les entreprises clientes et, entre deux missions, touche une garantie. Cette formule lui permet de toucher un revenu au moins égal au smic sur le mois (périodes de missions et d'intermissions confondues).

La CGT Manpower n'y est pas opposée, mais n'a pas signé l'accord pour autant. "Lorsque l'on voit que certaines missions peuvent atteindre les 36 mois [c'est le cas à PSA], on peut se poser la question de savoir si c'est encore de l'intérim, ou si ce n'est pas plutôt une manière d'externaliser une production", s'interroge Alain Wagmann, syndicaliste contacté par francetv info. Le syndicat déplore également que, dans certains cas, "ce soit l'intérimaire qui finance son smic, puisque la rémunération des intermissions est lissée au niveau du smic. Résultat, s'il touche pendant deux semaines un gros salaire, puis enchaîne une période sans travail, il ne bénéficiera pas d'une indemnité proportionnelle."

Pour en savoir plus, francetv info a donc interrogé trois signataires de ces contrats à durée indéterminée intérimaire (CDII).

Jérôme Thomazeau "ose prendre des vacances"

Enchaîner les missions, de peur de ne plus en avoir. C'était le quotidien de Jérôme Thomazeau depuis 2013 et ses premiers postes d'intérimaire proposés par l'agence Adecco de Saintes (Charente-Maritime). C'est en avril 2015 qu'il signe son CDII. Cariste, chauffeur livreur, préparateur de commandes... A 44 ans, il est polyvalent et c'est ce qui a conduit l'agence à lui proposer cette formule.

Aujourd'hui, il continue d'enchaîner les contrats, mais avec "la sécurité de l'emploi", explique-t-il. Et il jongle avec un calendrier partagé entre différents clients qui ont confiance en lui et le rappellent ainsi régulièrement. Autre avantage – mais c'est la directrice de l'agence à ses côtés qui l'explique : "Il ose désormais prendre des vacances. Socialement, c'est important." Mais attention, Jérôme Thomazeau est un privilégié : sur les 200 intérimaires employés par Adecco à Saintes, ils ne sont que trois (bientôt cinq) à bénéficier de ce contrat.

Stéphane Boushera a "pu obtenir un prêt"

Après un an et demi sur les chantiers, Stéphane Boushera, maçon en région parisienne, a signé son CDII en novembre 2014 chez Randstad. "On me l'a proposé car j'avais multiplié les contrats chez différents clients et que j'étais polyvalent. Mon travail était à chaque fois correct", précise-t-il modestement.

Le jeune homme de 24 ans a signé sans trop tergiverser, convaincu qu'il était gagnant. "C'est plus facile. Je peux travailler tout le temps, profiter de congés et j'ai également obtenu un prêt pour m'acheter une voiture." Avec ce contrat, il a la sensation de pouvoir se "construire un avenir". Comme Jérôme Thomazeau, il ne regrette pas les indemnités de fin de contrat qu'il pouvait toucher auparavant. "Maintenant, je bénéficie de vacances, donc je m'y retrouve."

Abdelkader Benkhettab est "séduit par la polyvalence"

A 32 ans, Abdelkader Benkhettab doit signer dans les semaines à venir son premier CDII chez Manpower. Cela fait plus d'un an qu'il enchaîne les missions chez PSA Sochaux notamment, et c'est lui qui a proposé sa candidature. Ce qui l'intéresse en priorité dans cette formule, c'est la polyvalence. "Je veux pouvoir changer de travail. En intérim simple, j'étais cantonné à un poste de montage, là je peux évoluer avec d'autres formations et être cariste, par exemple, mais aussi changer d'entreprise."

Autre avantage, selon lui : "Je suis sûr de travailler, et de m'assurer un smic par mois." Et tant pis pour les indemnités de fin de contrat qu'il touchait lorsqu'il était en intérim simple : "Quand vous êtes embauché en CDI dans une autre entreprise, vous n'en bénéficiez pas, donc ça ne me pose pas de problème. Ce que je me dis, c'est que tout ce que je touche par mois qui est au-dessus du smic est du bonus."

Aujourd'hui, sa priorité, c'est de travailler, et l'évolution de sa carrière au sein de l'entreprise ne l'inquiète pas outre mesure. "Certains ont un CDI mais n'aiment pas forcément ce qu'ils font, ou n'aiment pas leur entreprise. Moi, je peux varier les expériences, et le jour où je trouve un bon poste, j'ai la possibilité de quitter mon CDI intérimaire pour m'engager."

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