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Sapeurs-pompiers : ils ont réussi le concours, mais il n'y a pas de poste au bout

Il ne reste qu'un an aux lauréats de 2013 pour trouver un poste dans un centre de secours. Une fois ce délai dépassé, ils devront repasser leur concours. Près de 2 400 personnes pourraient ainsi se retrouver sur le carreau. 

Article rédigé par Florian Delafoi
France Télévisions
Publié
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Une manifestation des pompiers du Sdis de la Drôme contre les réductions d'effectifs, le 17 décembre 2011.  (STÉPHANE MARC / MAXPPP)

Ils n’avaient qu’un seul objectif en tête : devenir sapeurs-pompiers professionnels. Mais leur rêve pourrait bien se briser dans un an, au terme de la validité de leur concours obtenu en mai 2013. Le précieux sésame n’est, en effet, valable que trois ans. "J’ai envoyé plus de 300 courriers à travers la France pour obtenir un poste dans une caserne. Je n’ai reçu que des réponses négatives", s’agace David Cardon, sapeur-pompier volontaire depuis ses 16 ans. C’est la deuxième fois que cet agent de sécurité réussit le concours sans parvenir à obtenir un emploi. Comme lui, 2 400 personnes se trouveraient dans cette situation deux ans après avoir passé, avec succès, les épreuves théoriques et sportives, selon les estimations des syndicats CGT et SUD. Soit 80% des lauréats du concours de mai 2013…

Leur ras-le-bol est total. Depuis le 21 janvier, plus de 2 700 personnes sont venues apporter leur soutien à leur cause via la page Facebook "Aidez les futurs sapeurs-pompiers professionnels". Une pétition a également été lancée. La mobilisation s’étend jusque dans les casernes où des banderoles dénonçant l’arrêt des embauches sont parfois visibles.

Les sapeurs-pompiers du Puy-de-Dôme dénoncent le gel des recrutements, le 3 février 2015.  ( FRANCE 3 AUVERGNE)

Budgets serrés et besoins surestimés

Selon les syndicats, les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) prévoient d’embaucher plus de soldats du feu qu’ils n’en ont les moyens. "On se retrouve avec beaucoup de gens titulaires d’un concours alors que le nombre de postes est moins important", résume Sébastien Delavoux, secrétaire général de la CGT des Sdis. Les deux syndicats ont adressé chacun une lettre au ministère de l’Intérieur pour pointer du doigt ce dysfonctionnement. "Nous dénonçons cette situation qui résulte probablement d’une erreur d’appréciation sur les réels besoins des Sdis. Un avenir a été promis à ces candidats, un avenir qui devait s’ouvrir dans un délai de trois ans maximum", rappelle le syndicat SUD Sdis dans son courrier, envoyé le vendredi 6 février.

A l'origine de ce problème, un manque de communication entre les départements. Les Sdis, qui organisent le concours national, ont du mal à évaluer les besoins des casernes d’autres secteurs. "Du coup, pour être sûrs de ne pas manquer de professionnels, ils placent le curseur très haut. Quitte à laisser beaucoup de lauréats sur le bord de la route", se désole Régis Vidal, secrétaire national de SUD Sdis.

Autre frein à l'embauche, les difficultés budgétaires auxquelles font face les centres de secours. "Le financement et les décisions politiques ne sont pas axés sur l’emploi de sapeurs-pompiers professionnels", estime le syndicaliste.

"On fait miroiter un avenir qui n’existe pas"

L’attente est insupportable pour les lauréats qui sont restés sur le carreau. "On en a marre. On réussit des concours, mais on n’obtient jamais de poste", enrage David Cardon, qui est aussi l’un des trois administrateurs de la page Facebook de soutien. Marina, pompier volontaire dans le sud de la France et lauréate du concours 2013, s’estime lésée. "Passer ce concours est un vrai sacrifice. Comme d’autres, j’ai fait le choix de me mettre au chômage pendant un an pour préparer au mieux les épreuves. Ne pas proposer plus de postes est une injustice par rapport au travail qu'on a fourni", estime la jeune femme.

Beaucoup vivent au jour le jour, dans l’attente d’un emploi stable. "Je suis obligé de faire des petits boulots tout en restant disponible comme pompier volontaire dans ma commune. C’est un vrai blocage, je ne peux pas avoir de projets comme acheter un appartement par exemple", se désole Romain, lauréat, lui aussi, du concours 2013. "Pendant trois ans, les titulaires du concours vont mettre leur vie entre parenthèses. C’est une vocation pour eux. On peut se demander si l’on ne fait pas miroiter un avenir qui n’existe pas", déplore Sébastien Delavoux.

Une organisation des concours contestée

Pour David Cardon, inutile d’organiser des épreuves si elles ne débouchent sur rien : "C’est de l’argent jeté par la fenêtre, il n’y a pas de postes." Les organisations syndicales demandent une profonde réorganisation des concours de sapeur-pompier professionnel. "Cela coûte cher de déplacer des milliers de candidats dans une région pour leur faire passer un concours. Il faut louer une salle pour les épreuves écrites, réserver un gymnase ou encore une piscine pour les tests sportifs", détaille Régis Vidal.

Les syndicats exigent surtout que les Sdis respectent leurs prévisions en terme d’embauches pour éviter, qu’à nouveau, un grand nombre de lauréats se retrouvent au chômage. "On demande à ce que le nombre de lauréats soit en adéquation avec le nombre de postes", explique Sébastien Delavoux. Les lauréats du concours 2013 ne comptent pas en rester là. Une manifestation est envisagée devant le ministère de l'Intérieur le 22 mai.

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