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Plans sociaux (4/5). Des formations sans lendemain ?

Quatrième volet de notre série sur la vie après un plan social. Le retour à l'emploi passe souvent par des formations à un nouveau métier, pour le meilleur et pour le pire.

Article rédigé par Yann Thompson
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Edith Maunoury (g), aux côtés de ses anciens collègues de Plysorol, Jean-Marc Chapperon, Michelle Le Mazurier, Isabelle Siadkowski et Bruno Maille, le 11 octobre 2012 à Lisieux (Calvados). (YANN THOMPSON / FTVI)

PLANS SOCIAUX - Après le licenciement, la phase de deuil et la jungle du reclassement, le retour à l'emploi passe souvent par des formations à un nouveau métier, pour le meilleur et pour le pire.

Francetv info poursuit sa série en cinq actes consacrée au devenir des victimes de plans sociaux. Zoom sur des formations à deux vitesses : certains licenciés rebondissent quand d'autres multiplient les expériences sans débouchés.

Klara : "L'occasion de réaliser le rêve de ma vie"

Pour certains, un plan social est une chance. Klara Buda est de ceux-là. Ancienne responsable de la rédaction albanaise de Radio France internationale (RFI) à Paris, cette quadragénaire a choisi de quitter la station lors du plan social de 2010. Elle a opté pour un départ volontaire, assorti d'avantageuses compensations dans le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) : indemnités, formations, suivi par un cabinet de reclassement… "J'ai compris que RFI ne se remettrait pas de ses difficultés, explique-t-elle. Dans ces cas-là, il ne faut pas s'accrocher. Il faut accepter que c'est fini et regarder ailleurs." 

Des salariés de RFI défilent le 16 juin 2009 à Paris pour obtenir le retrait du plan de départs et empêcher la fermeture de six bureaux de langue. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

Ailleurs, pour cette Française d'origine albanaise, c'est New York (Etats-Unis). "Grâce à RFI, j'ai réalisé le rêve de ma vie", clame-t-elle. Comme toute société de 50 salariés ou plus envisageant le licenciement d'au moins 10 personnes, la station a dû mettre en place un PSE, qu'elle a richement doté pour le reclassement de ses anciens salariés. Ainsi, Klara Buda s'est vu entièrement financer une formation en écriture de scénarios aux Etats-Unis et a pu monter son propre studio de production avec ses indemnités de départ, des dizaines de milliers d'euros, en plus d'une aide à la création d'entreprise. "Ce recours aux formations est génial, il n'y avait pas de contrainte, poursuit-elle. Ce système de reclassement n'existe pas aux États-Unis."

Ouvertement libérale, cette ancienne syndiquée FO porte un regard sévère sur le conservatisme brandi lors des plans sociaux. "En France, on cherche trop à préserver ses acquis, or il faut sortir de sa zone de confort, assène-t-elle. C'est là que naissent les idées et les inventions." 

Edith : "Six mois de perdus"

"Il fait gris partout à Lisieux, dans le ciel et dans nos têtes." L'accueil d'Edith Maunoury dans le Calvados se fait avec le sourire et des soupirs. Accompagnée d'anciens collègues de Plysorol, où elle a commencé sa carrière à l'âge de 16 ans, la voilà à nouveau devant l'entrée du site. Elle a été licenciée le mois de ses 50 ans, en 2010, alors que l'entreprise était encore le leader européen du bois contreplaqué. Pour elle et ses collègues, le rebond s'est fait attendre. Elle l'explique à France 3 Basse-Normandie, à l'occasion d'un reportage en mars sur les "plysoroliens" :

"A Pôle emploi, j'ai pris tout ce qu'on m'a proposé", raconte l'ancienne ouvrière. Remise à niveau en français, informatique ; autant de formations inscrites dans son contrat de transition professionnelle (aujourd'hui contrat de sécurisation professionnelle). Elle a même appris le métier de toiletteuse pour chiens. "Six mois de perdus", sans débouché. "C'est le problème des formations, estime-t-elle. On fait ce dont on rêvait plus jeune mais, au final, ça ne correspond pas aux besoins dans la région, et Pôle emploi ne nous le dit pas…"

"Vieille en âge et jeune dans le travail", aujourd'hui, Edith Maunoury a de la chance. Elle est en passe d'être embauchée par un nouveau centre d'appels à Lisieux. En revanche, sur les 151 licenciés de 2010, des dizaines vont "très mal". Ils se sont renfermés et n'auront bientôt plus droit ni aux indemnités du plan social (80% du salaire brut pendant un an) ni aux allocations chômage. Ils ne toucheront bientôt plus que le Revenu de solidarité active (RSA). "L'un d'eux a tenté de se suicider, il n'a pas admis être viré." Peu de formations ont abouti à des emplois et le quotidien des ex-Plysorol est fait d'intérim et de petits contrats. Dans la grisaille.

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