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Six éditions, sept artistes : retour sur les succès de Monumenta

VIDEOS | Monumenta est de retour ! Suspendu en 2013 pour cause de restrictions budgétaires, cet événement artistique unique en son genre réinvestit la nef du Grand Palais à Paris, à partir du 10 mai, avec une "étrange cité" imaginée par le couple d'artistes russes Ilya et Emilia Kabokov. Avant l'ouverture de cette ville pas comme les autres, retour sur les six précédentes éditions de Monumenta.
Article rédigé par Pierrick de Morel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (Benoit Tessier Reuters)

2007 : après six ans de travaux, le Grand Palais rouvre ses portes au public, flambant neuf. Pour marquer ce retour attendu, le ministère de la Culture lance une idée : pourquoi ne pas proposer à des artistes d'occuper à leur guise les 13.500 m² qu'offre la Nef de ce haut lieu de la culture à Paris.

Le concept, baptisé Monumenta, fête cette année son septième anniversaire. Cinq artistes ont déjà accepté de relever ce défi hors du commun. Avant de découvrir le travail du couple russe Ilya et Emilia Kabakov et leur étrange cité qui ouvrira ses portes au public ce samedi 10 mai, France Info vous propose une rétrospective des six premières éditions.

2007 | Anselm Kiefer et sa Chute d'étoiles

Des maisons de tôle, des plaques de béton, des matériaux de construction ou des grillages rouillés : pour cette première édition de Monumenta, les clés du Grand Palais sont confiées à l'Allemand Anselm Kiefer, qui pose sous la Grand Nef une succession de bâtiments dont l'état ne peut que rappeler aux visiteurs les blockhaus et les ruines de la Deuxième Guerre mondiale.

Dans ces "maisons", l'artiste né en 1945, soit sur les décombres de l'Allemagne nazie, héberge ses propres toiles. Des oeuvres sombres, qui s'inspirent des poèmes de Paul Cela et de Ingeborg Bachmann, ou des romans de l'écrivain Louis-Ferdinand Céline, trois hommes profondément marqués par le conflit.

Bilan de cette première édition : cinq semaines d'exposition et 135.000 visiteurs. Monumenta est un succès, le concept est lancé.

2008 | La Promenade de Richard Serra

Pour cette deuxième édition, c'est l'artiste américain Richard Serra qui reçoit la lourde charge d'investir la Nef du Grand Palais. Influencé depuis ses débuts par l'expressionisme abstrait, Serra installe au coeur de la Nef cinq plaques d'acier de 17 mètres de haut, et 4 mètres de large et de 75 tonnes chacune. Colossale, l'installation asymétrique nécessite la consolidation du sol du lieu de l'exposition.

Dans l'espace immense qui se déploie sous la verrière, ces stèles d'acier paraissent cependant bien légères. En fonction de l'heure du jour ou de la nuit, elles offrent aux spectacteurs différentes teintes, différents tons.

"Vous n'avez pas besoin de connaître quoi que ce soit à l'histoire de la sculpture ou à l'histoire de l'art pour comprendre, voir et percevoir ce travail conçu en relation avec l'espace. Le contenu réside dans le visiteur , explique l'artiste dans un entretien avec le commissaire de l'exposition, Alfred Pacquement. Il ne s'agit pas juste de grandes plaques en l'air, mais le contenu de votre propre expérience alors que vous marchez dans, à travers, et autour de l'ensemble du champ sculptural ."

2010 | Christian Boltanski, une oeuvre pour Personnes

En 2009, la tenue au Grand Palais de la manifestation triennale La Force de l'Art 02 occupe la Nef et décale la troisième édition de Monumenta à l'année suivante.

Pour son retour, c'est à un artiste français que revient l'honneur d'exploiter les 13.500 m² sous la verrière. Avec Personnes , installation visuelle et sonore, Christian Boltanski divise le lieu en trois rangées et 69 parcelles rectangulaires, toutes recouvertes de vêtements. 

Le clou de l'exposition, c'est une véritable montagne de vêtements surmonté d'un grappin gigantesque, qui soulève régulièrement quelques guenilles pour les relâcher dans le vide, le tout au son amplifié des battements du coeur. Le concept, très fort visuellement, est une métaphore du doigt divin, qui prend des pièces au hasard pour en rejeter d'autres.

2011 | Le Leviathan d'Anish Kapoor

C'est à ce jour le plus grand succès de Monumenta en terme de fréquentation : si Boltanski avait déjà battu un record avec plus de 147.000 spectateurs autour de P ersonnes , le britannique Anish Kapoor explose les compteurs avec 277.687 curieux, venus admirer de près son Leviathan .

Le Leviathan, c'est ce monstre mythologique, colossal, sans forme précise, tantôt dragon, tantôt serpent, voire même baleine dans la Bible. Le plasticien britannique, spécialiste des oeuvres gigantesques, prend donc au pied de la lettre le concept de Monumenta et envahit la Nef avec une sculpture en PVC de 15 tonnes, d'une hauteur de 37 mètres et d'un volume de 72.000 m³.

Le tout est visible depuis les balcons de la Nef mais également depuis son coeur, puisqu'il est possible de s'immiscer dans le "ventre de la bête " et de pénétrer dans ce gigantesque ballon couleur aubergine. Une visite qui offre une véritable sensation d'écrasement.

2012 | Buren, toujours Excentrique(s)

Daniel Buren est le deuxième artiste français choisi par le ministère de la Culture pour s'occuper du Grand Palais. Une rencontre logique tant le plasticien français, adepte du travail in situ , aime redonner vie à des sites comme il a pu le faire avec ses colonnes dans la Cour d'honneur du Palais Royal ou au musée Guggenheim de New York.

Sous la verrière, Buren distille des pastilles multicolores qui captent la lumière solaire pour former des tâches qui se croisent et s'entrecroisent sur le sol. Bleue, jaune, rouge ou verte : les 377 disques translucides, suspendus entre 2,50 et 2,90 mètres du sol, permettent la création de nouvelles couleurs, des mélanges projetés sur des spectateurs qui déambulent sous ces pastilles.

"L'idée du projet, c'est l'utilisation de la lumière qui est ici spécialement remarquable , confiait Daniel Buren au micro de France Info. Où que vous soyez dans le Grand Palais, vous ne voyez jamais rien d'autre que le ciel. Pour le comprendre, l'une des façons les plus immédiates, c'est de colorer cette lumière, d'où cette idée de descendre toute la verrière au niveau très bas de ces cercles ."

Et 2014 ?

Suspendu en 2013 pour cause de restrictions budgétaires, Monumenta est de retour. Pour cette sixième édition, les époux russes Ilya et Emilia Kabokov découvent donc le Grand Palais avec une année de retard et préparent une "étrange cité ", qui s'annonce comme une véritable ville utopique bâtie au coeur de la Nef.

"Eriger l'étrange cité, c'est insister sur l'expérience plutôt que sur la forme du projet, en vous demandant de ralentir votre course dans la ville réelle, et de faire appel à vos émotions, vos sens, vos souvenirs , a expliqué Emilia Kabokov. Nous vous invitons à venir au Grand Palais pour entrer dans l'étrange cité, un espace onirique issu de l'imaginaire collectif, à penser et à réfléchir sur l'art, la culture, la vie quotidienne, notre présent et notre futur. "

Un programme mystérieux et alléchant, sur lequel les artistes lèveront le voile samedi 10 mai. 

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