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Apprentissage : l'État veut faire des économies, les professionnels sont inquiets

Grâce aux primes post-Covid, près de 900 000 contrats d'apprentissage étaient en cours début 2022, contre 400 000 trois ans plus tôt. Mais l'État a décidé qu'il était temps de faire des économies, ce qui provoque l'inquiétude des formateurs. 

Article rédigé par Agathe Mahuet, franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Les apprentis du lycée hôtellier de Marseille  (NICOLAS VALLAURI / MAXPPP)

L'apprentissage, victime de son succès ! Grâce aux primes à l'embauche de l'après-Covid, près de 900 000 contrats étaient en cours, début 2022, contre 400 000, trois ans plus tôt. Mais certaines écoles en ont parfois tiré profit, faisant grimper le coût de leurs formations.

L'État a donc décidé de faire le ménage et prévoit de réaliser 800 millions d'euros d'économies, en commençant par une baisse de 5% dès septembre, puis une nouvelle baisse de 5% en 2023. C'est France Compétences, l'instance -déficitaire- chargée de réguler le secteur, qui l'a annoncé en juillet.

>> PODCAST. L'apprentissage est-il vraiment la solution miracle contre le chômage des jeunes ?

Un coup de rabot qui risque de fragiliser une partie des filières et des centres de formation, alors forcément, les professionnels s'inquiètent. "On comprend qu'il faille faire des économies, notamment pour France Compétence, mais derrière les 5% annoncés, il y a une grande diversité de situations", réagit Sébastien Malige, qui gère l'école parisienne Stephenson Formation.

Trois de ses filières commerciales voient leurs crédits s'écrouler, avec une baisse pouvant aller de 33 à 55%. À tel point qu'il envisage de ne pas rouvrir ces classes-là en septembre : "C'est une question que je me pose : économiquement, ça n'est pas viable."

Des baisses dans des filières qui recrutent 

Cette règle du jeu qui évolue au coeur de l'été, c'est une difficulté supplémentaire pour ces structures dont le budget est calculé pour l'année entière.

Ces écoles sont souvent déjà confrontées à la hausse des coûts des matières premières. C'est ce que nous explique Xavier Geoffroy, le directeur général du Ceproc, le Centre d'excellence des professions culinaires : "C'est l'école historique et nationale des charcutiers-traiteurs, avec 600 jeunes formés chaque année aux métiers de la gastronomie, de la cuisine, de la pâtisserie, de la boucherie. Ce sont essentiellement des jeunes en alternance, en apprentissage, qui sont une semaine à l'école, deux semaines en entreprise."

Et le statut associatif de l'école ne permet pas de jouer sur les marges, les prix sont fixés par France Compétences. Or, les coupes imposées par cette autorité nationale de financement de l'apprentissage viennent fragiliser des filières pourtant touchées par une pénurie de main d'oeuvre.

Mettre quatre apprentis devant un prof, ce n'est pas rentable

"C'est vraiment des métiers qui recrutent. Dans une école comme la nôtre, on a des seuils de rentabilité : il faut qu'il y ait dix, douze ou quinze apprentis par classe. Sinon, ça coûte trop cher de mettre seulement quatre apprentis devant un prof avec de la matière première", explique Xavier Geoffroy. 

"On pourrait être tentés de fermer certaines classes en CAP cuisine ou pâtisserie. Et c'est dommage."

Xavier Geoffroy

à franceinfo

"On voit que le chômage des jeunes baisse massivement grâce à l'alternance ou à l'apprentissage. Ma peur, c'est qu'on casse un peu cette dynamique", lance  Xavier Geoffroy.

Les économies demandées sont donc -pour ces professionnels du secteur- en contradiction avec le message politique répété la semaine dernière par Gabriel Attal : six milliards et demi d'euros, notamment consacrés à la "montée en puissance de l'apprentissage", et l'objectif, toujours, d'un million d'apprentis d'ici la fin du quinquennat.

Apprentissage : l'Etat veut faire des économies, les professionnels inquiets - Reportage d'Agathe Mahuet

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