: Reportage "Sans la campagne, vous ne mangerez pas" : en Espagne, les agriculteurs sont déterminés à poursuivre leur mobilisation
Les uns, en France, semblent s’apaiser. Les autres, en Espagne, sont disposés à prendre le relais. À l’appel des trois principales organisations du secteur, des milliers d’agriculteurs ont fait entendre leur voix jeudi 8 février de l’autre côté des Pyrénées. Des manifestations étaient convoquées dans quatre provinces, l’équivalent de nos départements, les autres suivront au cours des prochaines semaines.
Moteurs et klaxons de tracteurs et sonnailles, les cloches du bétail, c’est la bande originale des manifestations des agriculteurs espagnols. À Ávila, au nord-ouest de Madrid, le rendez-vous est donné devant sa fameuse muraille romane. C’était jeudi les premières mobilisations officielles, convoquées par les grandes organisations du secteur et autorisées par les autorités. Les agriculteurs disent vouloir accompagner ou prolonger les mobilisations de leurs homologues en Allemagne, en Italie ou en France. Leurs revendications et leurs craintes, d’ailleurs, sont assez proches.
"Bureaucratie absurde"
Mariano Calle élève 200 vaches à Tremedal, un village montagneux du département, il a fait le déplacement à Ávila. "On risque de souffrir d'une concurrence déloyale si on fait rentrer des produits de pays qui ne font pas partie de l'Union européenne et qui ne sont pas soumis aux mêmes contrôles que nous. Le Mercosur peut nous faire très mal parce que le Brésil est un grand producteur de viande qui peut casser les prix dans toute l'Union européenne. Et puis on supporte une bureaucratie absurde. Un éleveur peut perdre facilement dans la paperasse quatre, six ou dix heures par semaine."
Peur de la concurrence des pays tiers, donc, et rejet d’une accumulation de normes qu’ils jugent mal faites et trop contraignantes. "Les normes arrivent de l’Europe et elles sont déjà dures, dénonce Antonio Martin, cultivateur de céréales. Mais après elles arrivent en Espagne, et elles sont plus contraignantes, elles arrivent à la région, ils les durcissent, elles arrivent au département et ils les rendent plus dures encore. On ne peut pas semer ce qu’on veut, on ne peut pas labourer quand il pleut.
"Ce qu’ils veulent, c’est une agriculture pour les moustiques ! Qu’on laisse pousser les mauvaises herbes et que les moustiques soient contents."
Antonio Martin, cultivateur de céréalesà franceinfo
Antonio remonte dans son tracteur. 150 de ces véhicules agricoles ont parcouru les grandes avenues d'Ávila. Devant la préfecture, une banderole “La campagne n’en peut plus” a été déployée par les responsables syndicaux. Une autre, plus discrète, tenait lieu d’avertissement : “Sans la campagne, vous ne mangerez pas”.
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