Colère des agriculteurs : ce que l'on sait de l'accident sur un point de blocage en Ariège, qui a fait deux morts

Une voiture a percuté un mur de bottes de paille sur un barrage d'agriculteurs, mardi à l'aube, faisant deux morts et un blessé grave.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le véhicule qui a percuté un mur de bottes de paille à Pamiers (Ariège), faisant un mort et deux blessés, le 23 janvier 2024. (VALENTINE CHAPUIS / AFP)

Un drame en plein mouvement de protestation des agriculteurs"Je viens d'apprendre qu'un accident de la route est arrivé dans l'Ariège, à Pamiers" au nord de Foix, a annoncé le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, mardi 23 janvier sur RMC. "Dans le moment particulier que vit l'agriculture, ce genre de drame est difficile à vivre", a-t-il déclaré, alors que la mobilisation du secteur prend de l'ampleur. Mardi, des actions ont été notamment annoncées à Strasbourg (Bas-Rhin), Beauvais (Oise), Agen (Lot-et-Garonne) ou encore Carbonne (Haute-Garonne). 

Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait de cet accident. 

Un véhicule a percuté un mur de bottes de paille  

A 5h45 mardi matin, "un grave accident de la circulation est survenu sur la commune de Pamiers", sur la RN 20, a annoncé dans un communiqué la préfecture de l'Ariège. L'accident a eu lieu "à hauteur du pont de la RD 119, sur les lieux de la manifestation agricole". Lors d'une conférence de presse mardi en fin de matinée, le préfet de l'Ariège, Simon Bertoux, a assuré que le dispositif de sécurité installé autour du barrage "était parfaitement conforme". Il a également souligné que l'occupation de la route se faisait dans le cadre d'une "manifestation déclarée".

Une voiture venant de Toulouse et se dirigeant vers l'Andorre a "emprunté la route nationale 20, malgré le dispositif mis en place pour en interdire l'accès", a précisé mardi matin Olivier Mouysset, procureur de la République de Foix, dans un communiqué. "En circulant sur la double voie, leur véhicule a percuté, en pleine nuit, et sans éclairage public à proximité, un mur de bottes de paille, érigé sur toute la hauteur jusqu'au pont, et alors que ce mur de paille était recouvert d'une grande bâche noire." Des manifestants "se restauraient" derrière ce grand mur de paille.

La voiture a fauché trois personnes, faisant un mort et deux blessés graves, "avant de finir sa course contre la remorque d'un tracteur". "Au regard des tout premiers éléments de l'enquête, qui débute à peine, les faits en cause ne paraissent pas revêtir un caractère intentionnel", précise le parquet de Foix. 

Le préfet et le sous-préfet de Pamiers se sont rendus sur le lieu du drame. D'après la préfecture, 35 pompiers, 13 policiers et 20 gendarmes "sont mobilisés", et "un centre opérationnel départemental est activé en préfecture de l'Ariège". Une cellule psychologique a été mise en place. D'après France Bleu Occitanie, les témoins de l'accident sont très choqués. Le barrage a été progressivement levé. 

Une agricultrice et sa fille tuées, son mari blessé 

La victime, morte sur place, était âgée d'une trentaine d'années, d'après le procureur de la République. Son mari, quadragénaire, "est grièvement blessé et a été conduit à l'hôpital", précise cette même source. Leur fille a également été blessée dans l'accident. Héliportée au centre hospitalier de Toulouse, elle a succombé à ses blessures "peu après 19 heures", a annoncé le procureur de la République de Foix. "Cette information vient d'être confirmée par les services de l'hôpital Purpan de Toulouse", a-t-il ajouté dans un communiqué diffusé mardi soir. Le magistrat a précisé qu'elle était née le 25 septembre 2011.

Sa mère, agricultrice, était adhérente aux Jeunes Agriculteurs (JA) depuis son installation, "toujours là à nos côtés dans tous nos combats", a déclaré Clémence Biard, présidente départementale des JA, mardi. La trentenaire était éleveuse de vaches limousines et productrice de maïs semence à Saint-Félix-de-Tournegat, près de Pamiers. Une cellule d'urgence médico-psychologique a été mise en place afin d'accompagner les proches de la famille. 

Les personnes à bord du véhicule en garde à vue 

Une enquête a été ouverte "en flagrance des chefs d'homicide involontaire aggravé et de blessures aggravées", précise le parquet dans son communiqué. Le commissariat de Pamiers est chargé de cette enquête. 

Les trois personnes à bord du véhicule qui a percuté le mur de bottes de paille, un couple et une de ses amies, ont été placées en garde à vue. Deux d'entre elles sont légèrement blessées et ont dû être hospitalisées, a ajouté Simon Bertoux. Les tests n'ont détecté aucune consommation d'alcool ou prise de stupéfiants. 

Ces personnes de nationalité arménienne n'étaient pas connues des services de justice. Elles étaient en revanche sous obligation de quitter le territoire français, après avoir été déboutées de leur demande d'asile en 2023, a appris France Télévisions de source proche de l'enquête.

A ce stade de l'enquête, "on ne s'explique pas à ce moment les raisons qui ont conduit le véhicule à contourner un ensemble d'éléments qui empêchaient l'accès à cette voie rapide", a déclaré le préfet de l'Ariège, assurant que "cette interdiction était bien matérialisée". 

De nombreuses réactions politiques

Le ministère de l'Agriculture a fait savoir que le ministre et son équipe étaient "en lien étroit avec la préfecture de l'Ariège pour connaître les circonstances exactes de l'accident". "Notre Nation est bouleversée et solidaire", a réagi sur X le Premier ministre Gabriel Attal. L'accident est un "drame qui nous bouleverse tous", a déclaré Emmanuel Macron sur le réseau social, demandant au gouvernement d'apporter "des solutions concrètes" aux difficultés des agriculteurs. De son côté, le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, est arrivé mardi soir en Ariège. Il a confié être "ici pour témoigner de l'émotion de la nation". "C'est un "drame qui nous touche tous", a-t-il ajouté.

A l'Assemblée nationale, le député communiste André Chassaigne a demandé qu'une minute de silence soit respectée mardi en hommage à l'agricultrice tuée. "Il est inacceptable, dans un pays comme le nôtre, qu'une personne meure parce qu'elle se bat pour pouvoir vivre juste dignement de son travail", a poursuivi la présidente du groupe LFI à l'Assemblée nationale, Mathilde Panot. 

"C'est un drame, mes pensées vont d'abord à cette femme qui est décédée", a déclaré à son tour sur franceinfo Gérard Larcher, le président du Sénat. "Face à ce drame, il importe que les réponses soient très vite apportées au monde agricole", a-t-il ajouté. "C'est avec une profonde tristesse que nous apprenons le décès d'une femme, fauchée par une voiture à Pamiers, lors d'une manifestation d'agriculteurs", a réagi de son côté sur X Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement national à l'Assemblée nationale. 

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