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Actions de groupe : pourquoi il n'y aura pas d'Erin Brockovich en France

Le projet de loi sur la consommation de Benoît Hamon prévoit la création d'actions collectives en justice, inspirées des "class actions" américaines.  

Article rédigé par Camille Caldini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Julia Roberts incarne Erin Brockovich dans le film du même nom, réalisé par Steven Soderbergh et sorti en 2000. ( SIPA)

Benoît Hamon lance les actions de groupe, ou "class actions à la française". Immédiatement, on pense à Erin Brockovich. Ou plutôt à Julia Roberts, qui incarne, en 2000, cette mère de famille qui motive, une à une, plus de 600 victimes d'une pollution au chrome à s'engager dans une longue bataille contre un industriel pour obtenir réparation. Mais le projet de loi sur la consommation, présenté jeudi 2 mai en Conseil des ministres, exclut ce genre de scénario en France.

Parce qu'il faudra passer par des associations

Vous ne risquez pas de voir frapper à votre porte une Julia Roberts, bébé au bras. Seules les  associations nationales de consommateurs reconnues par le ministère sont autorisées à porter des actions de groupe, selon le projet de loi. L'UFC-Que choisir ou Familles de France, par exemple, doivent être mandatées par au moins deux consommateurs estimant avoir subi le même préjudice, pour les représenter devant la justice civile. Mais chaque décision de justice pourra bénéficier à tous les consommateurs concernés qui se signaleront à l'association mandatée, pas seulement aux plaignants.

Pour le ministre de la Consommation, réserver ce droit aux associations agréées est une mesure de sécurité. "Beaucoup de personnes veulent se faire de l'argent sur le dos des consommateurs, y compris, aux Etats-Unis, les cabinets d'avocats, estime-t-il. On veut éviter cela." Les avocats y voient une marque de "défiance" du gouvernement à leur égard et dénoncent une "avocaphobie". "Que fait-on de la déontologie des avocats ?", s'interroge la bâtonnière de Paris, Christiane Féral-Schuhl.

Parce que les préjudices corporels et moraux sont exclus

Qu'il s'agisse du chrome dans le cas d'Erin Brockovich, de la marée noire causée par le naufrage de l'Erika, du procès du sang contaminé, ou plus récemment des scandales Mediator et PIP, les "class actions à la française" n'y changent rien. Les questions de santé et d'environnement sont pour le moment jugées trop délicates et donc exclues, car les "préjudices corporels ou moraux nécessitent des expertises individuelles", justifie Benoît Hamon dans un entretien à L'Expansion.

Le texte ne s'applique qu'aux litiges liés à la consommation : publicité mensongère, pratiques anticoncurrentielles. L'exemple le plus connu concerne l'entente entre les opérateurs de téléphonie mobile Bouygues, Orange et SFR, condamnés en 2005 à une amende de 500 millions d'euros. Mais les consommateurs lésés n'en ont pas vu un centime.

Parce que les entreprises préféreront la médiation

Aucune entreprise ne veut subir la pression médiatique d'un procès, qui mettrait en jeu sa réputation. Benoît Hamon compte sur cette "arme de dissuasion massive" pour parvenir à des compromis entre les consommateurs et les entreprises, sans aller jusqu'au tribunal. C'est ce qui arrive dans la majorité des cas en Italie, explique France Info. Sur vingt-trois actions de groupe menées depuis 2008, une seule est allée jusqu'au jugement. Onze ont été rejetées et les autres ont fait l'objet de transactions.

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