Les petits arrangements avec la réalité de la photo culinaire
A l'occasion du 4e festival de cette spécialité, qui débute aujourd'hui à Paris, francetv info a demandé à des photographes et à des stylistes quelles étaient leurs astuces pour magnifier les plats.
DECOUVERTE – Vous faites partie de ce cercle pas si fermé des compulsifs de la photo lorsqu'il s'agit de déguster votre plat de lasagnes ? Ou vous passez tous vos dimanches à tenter de refaire à l'identique les recettes de vos livres de cuisine ? Cet article peut vous intéresser.
A l'occasion de l'ouverture du quatrième festival international de la photographie culinaire, vendredi 26 octobre à Paris, francetv info est parti à la pêche aux astuces pour vous aider à rendre votre cassoulet appétissant et expliquer pourquoi votre hamburger n'a pas le profil de celui de la publicité. Revue de détails avec des photographes et des stylistes culinaires.
1 On passe les aliments au peigne fin
L'art de la photo culinaire, c'est d'abord un gigantesque (et intraitable) casting. "Il est primordial, martèle Fabrice Jarossay, styliste culinaire pour la publicité. Si on n'a pas le bon produit, c'est loupé. On accorde donc parfois plus de temps à la préparation et aux achats de produits qu'à la réalisation du film ou à la photographie." Pour dénicher la bonne tomate, l'agrume à la plus jolie teinte, la photographe plasticienne Mathilde de l'Ecotais ne fait pas semblant. Son marché, elle le fait loupe et couteau à la main : "Ça me permet de regarder les transparences, les arabesques d'une courgette par exemple." Place ensuite aux fourneaux.
2 On ne suit pas la recette
Vous suivez la recette au gramme près, mais ne parvenez jamais à avoir le même résultat que celui de votre livre de cuisine ? Pas étonnant : les photographes et stylistes culinaires trichent (un peu). "Si je veux cuisiner un cake dans un vrai moule, je vais doubler les proportions, avoue Sandra Mahut, styliste culinaire et auteure de livres pour les éditions Marabout. Au lieu d'avoir un cake fin, il mesurera 6 à 7 cm de haut." Même subterfuge pour les cheesecakes, "cuits dans des moules plus petits pour qu'ils paraissent plus hauts et plus épais". Le photographe David Japy confie ne pas trop faire mijoter les plats en cocotte. "Au lieu de 45 minutes, on va les faire cuire 25 minutes. Les légumes seront un peu plus crus, et auront des couleurs plus vives."
3 On cache la misère
Quand modifier la recette ne suffit pas, d'autres solutions existent pour magnifier le plat. "La ratatouille, c'est innommable, gris, kaki, les courgettes sont cachées, détaille Sandra Mahut. Là, il y a un vrai travail de recherche du contenant." La styliste laisse le couvercle à moitié fermé, trouve une belle nappe, place un ustensile en bois à côté, histoire de cacher la misère. Objectif : attirer l'œil sur autre chose qu'un plat peu ragoûtant. Sandra Mahut n'hésite pas non plus à recourir aux herbes, ciboulette, persil ou cerfeuil – "ça donne de la hauteur" – pour mettre en valeur une recette ou cacher l'omelette. D'ailleurs, pourquoi la vôtre n'a pas plus de relief qu'une crêpe ? Repliez-la ou glissez-lui une pomme de terre en-dessous, et le tour est joué...
4 On maquille un peu...
Dans l'édition, la tendance actuelle entend privilégier le naturel. Les auteurs de livres transforment donc le moins possible l'aliment. "On a des petites astuces, mais 99% de ce que je photographie, je peux le manger ensuite", assure David Japy, photographe adepte de l'authentique. "La glycérine, c'est fini ! s'exclame Sandra Mahut. Par contre, je peux rajouter un peu d'eau ou d'huile sur des aliments qui sèchent vite, comme la carotte." Le photographe renchérit : "Il ne faut pas que le plat soit trop sec, sinon c'est tristoune. Pour un poisson, on ajoutera du jus, donc de la brillance."
5 ... ou on travestit beaucoup
La musique change lorsqu'il faut respecter un cahier des charges d'une commande pour la pub, comme le prouve cette vidéo de McDonald's (en anglais) sur la séance photo d'un hamburger.
Fabrice Jarossay, styliste travaillant pour ce domaine, recourt lui aussi à tout un arsenal de techniques. Ici, un colorant qui donne l'aspect grillé à un steak encore congelé, là de la glycérine, voire la bonne vieille laque sortie du placard de la salle de bains. "Grâce à elle, un pruneau d'Agen, visuellement très sombre, retrouve de la brillance, un côté plus frais, appétissant." Mais gare à vous : ce que vous voyez peut, parfois, être purement factice. "Pour une commande, on devait trouver des litchis au mois de mai, se souvient David Japy. Et bien, vous avez beau chercher, il n'y en a pas. Congelés, ils étaient moches. On a donc décidé d'en fabriquer un de toute pièce." Vous voilà prévenus.
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