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"Clients pénalisés, putes assassinées" : une cinquantaine de prostituées manifeste à Paris

Elles se sont réunies aux Invalides, jeudi, pour protester contre la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des travailleuses du sexe se sont rassemblées à Paris pour protester contre la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution, le 11 juin 2015. (THOMAS SAMSON / AFP)

"Clients pénalisés, putes assassinées." Elles étaient une cinquantaine à crier ce slogan, jeudi 11 juin, sous les arbres de la place des Invalides, à Paris. A l'appel du collectif Droits et prostitution, les travailleuses du sexe ont une nouvelle fois manifesté contre la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution. Le texte doit passer en seconde lecture devant les députés, vendredi 12 juin.

"Cette loi signe la fin de la prostitution de rue, s'insurge Marie Prin, secrétaire générale du Syndicat du travail sexuel (Strass). Le but est soi-disant d'aider les travailleurs sexuels, mais il va en réalité empirer nos conditions de vie." Car la mesure sur la pénalisation des clients, supprimée par les sénateurs, devrait être réintégrée par les députés, vendredi.

"Certains clients ont peur d'être arrêtés"

Une disposition dramatique, selon les prostituées présentes aux Invalides. "Le débat est tellement médiatisé qu'on voit déjà les effets de la loi : nous avons moins d'appels, moins de revenus, poursuit Marie Prin. Certains clients ont peur d'être arrêtés, alors que la loi n'est même pas encore adoptée."

Pour le président du Strass, cette loi censée protéger les travailleurs sexuels va "les pousser vers la précarité et la clandestinité""Si nous devons travailler cachés, nous aurons recours à plus d'intermédiaires et ça va renforcer l'exploitation des prostitués, affirme Thierry Schaffauser. Il y a aussi plus de risque de se faire agresser si on doit se cacher pour protéger nos clients, au lieu de rester en groupe."

"Une loi de prohibitionnistes, de paternalistes"

Cette situation inquiète particulièrement l'association les Roses d'acier, qui représente quelque 300 travailleuses sexuelles chinoises du quartier de Belleville, à Paris. Elles sont venues en nombre aux Invalides, reprenant des slogans en mandarin sur la petite place. Toutes masquées, elles expliquent être des prostituées sans proxénètes, mais aussi sans papiers. "Si nous ne pouvons plus travailler dans la rue, nous ne pouvons plus manger", souligne Jie, la vice-présidente des Roses d'acier.

Une des mesures de la future loi prévoit pourtant d'accorder des titres de séjour d'un an aux travailleuses sexuelles sans papiers, à condition qu'elles suivent un programme de sortie de la prostitution. "C'est presque un piège, parce qu'elles toucheront au mieux une allocation de quelques centaines d'euros, s'agace Thierry Schaffauser. Ces migrantes vont se signaler aux autorités et, comme elles continueront à se prostituer pour survivre, elles seront expulsées." Et de conclure : "C'est une loi de prohibitionnistes, de paternalistes, et pas du tout une loi pour aider les prostituées."

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