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La force d’action rapide du nucléaire s'exerce au scénario du pire à la centrale de Paluel : "La panne c'est vraiment la situation la plus dégradée possible"

A la centrale nucléaire de Paluel, les problèmes graves (mais heureusement fictifs) se sont accumulés jeudi pour les besoins d'un exercice destiné aux équipes de choc d'EDF. Avec un objectif : pouvoir éviter un accident comme celui de Fukushima.

Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Exercice des Forces Rapides d'Action Nucléaire à la centrale de Paluel, près de Fécamp, en janvier 2021. (GREGOIRE LECALOT / RADIO FRANCE)

EDF a-t-elle les moyens de lutter contre accident nucléaire majeur ? Un mois et demi avant le dixième anniversaire de la catastrophe de Fukushima, l’électricien public a procédé jeudi 21 janvier à un exercice grandeur nature, à la centrale de Paluel, près de Fécamp. Il a déployé une unité d’intervention spéciale unique au monde, la Force d’action rapide du nucléaire (Farn), créée après Fukushima justement. Franceinfo a pu suivre l’exercice.

Des conditions extrêmes

Le doigt sur leurs liasses de documents, les opérateurs arpentent dans le calme le simulateur de salle de commande de la centrale. Depuis quelques heures, ils courent après les pannes fictives sur le réacteur numéro 4. Didier Le Lan, formateur, pilote le scénario. "Depuis le début, ils sont un peu en difficulté. On va alourdir un peu, de manière à ce qu’ils ne soient pas dans le train-train", explique-t-il. Au fil des minutes, la situation simulée devient de plus en plus compliquée : avarie grave en pleine tempête, le réacteur est privé d'eau pour se refroidir, la situation peut tourner à la catastrophe.

La météo du jour est à l'unisson du scénario. "On a une tempête, on a des risques de submersion par des vagues, on a perdu le réseau électrique sur le territoire, on a des problématiques d'accès, avec des routes qui sont encombrées, décrit Jean-Marie Boursier, directeur de la centrale nucléaire de Paluel. Et puis, bien sûr, on a des aléas techniques qui vont se produire sur nos réacteurs, qui vont entraîner petit à petit une dégradation jusqu'à l'utilisation de la panne qui est vraiment la situation la plus dégradée possible. C'est une chance sur un million que ça se produise", poursuit-il.

La centrale nucléaire de Paluel, en janvier 2021. (GREGOIRE LECALOT / RADIO FRANCE)

La Farn est une unité de choc interne à EDF créée juste après Fukushima. Unique au monde, elle regroupe environ 300 volontaires répartis sur cinq bases en France. Camions tout terrain, pickup, robots, drones, hélicoptères lourds, moyens nautiques,… Ce commando est en alerte permanente, prêt à se projeter sur toute situation extrême. "Notre mission, c'est d'éviter les rejets radioactifs et de maintenir la sûreté en toutes circonstances, explique Pierre Eymond, directeur de la Farn. La Farn c’est l'engagement d'EDF à avoir la maîtrise de la sûreté de ses machines, même si nous venions à avoir des destructions autour d'une centrale, et apporter des moyens utiles de sûreté."

Depuis des étangs situés en haut de la falaise qui surplombe la centrale de Paluel, les équipes montent une tyrolienne. Elle permet d'acheminer un tuyau de pompier jusqu'au réacteur supposé en difficulté. "Les moyens que nous avons là sont extrêmement rustiques. Ils font le débit d'un camion de pompier et c'est avec ce débit-là que nous pouvons assurer le refroidissement d'un réacteur à l'arrêt. Le principe de la Farn est là. C'est la capacité à apporter ce moyen ultime de refroidissement pour éviter que le coeur ne soit plus refroidi", poursuit Pierre Eymond. 

Exercice des Forces Rapides d'Action Nucléaire à la centrale de Paluel, près de Fécamp, en janvier 2021. (GREGOIRE LECALOT / RADIO FRANCE)

L'exercice terminé, la Farn vise à éviter par tous les moyens une fuite radioactive dans l'atmosphère. Deux interventions réelles ont nourri son expérience : l'ouragan Irma à Saint-Martin en 2017 et la tempête Alex, dans les Alpes, en fin d'année dernière. Mais, heureusement, elle n'a jamais encore été confrontée à un véritable accident nucléaire.

Le reportage de Grégoire Lecalot avec la Farn, à la centrale nucléaire de Paluel

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