Féminicide en Savoie : "Il nous renvoie le miroir de notre incapacité à faire baisser leur nombre", déplore une avocate
Le meurtre d'une femme en pleine rue à La Croix-de-la-Rochette (Savoie) jeudi "nous renvoie le miroir de notre incapacité à faire baisser" le nombre de féminicides en France, déplore vendredi 1er septembre sur franceinfo Me Anne Bouillon, avocate au barreau de Nantes, spécialisée en droit des femmes et de la famille. Jeudi matin, une policière de 42 ans a été tuée alors qu'elle venait de déposer à la crèche l'un de ses enfants. Le suspect, interpellé vendredi, est son ex-conjoint.
Me Anne Bouillon fait part sur franceinfo de son "émotion" et de sa "colère après cet énième féminicide". Au 29 août, soit avant le meurtre de cette fonctionnaire, l'association "Nous Toutes" décomptait 89 féminicides depuis le début de l'année. Un chiffre qu'Anne Bouillon qualifie de "vertigineux".
La séparation, "le moment de tous les dangers"
Pour l'avocate spécialisée en droit des femmes, "l'immense majorité des féminicides surviennent dans des contextes de séparation difficile. C'est véritablement le moment de tous les dangers pour les femmes car ça interroge sur leur capacité à s'extirper d'une relation toxique et violente", indique Anne Bouillon. Elle considère également que ces moments interrogent "beaucoup sur la capacité de ces hommes à accepter que leurs conjointes prennent leur liberté".
L'ex-conjoint de la victime est déjà connu de la justice, selon les informations de France Bleu Pays de Savoie. Il avait notamment été condamné en novembre 2020 par le tribunal correctionnel de Nice pour non-respect d'une ordonnance de protection rendue au profit de la victime par le juge aux affaires familiales. La fonctionnaire de police a ensuite été mutée en Savoie, où elle a déposé une plainte pour non-paiement de pension alimentaire contre son ex-conjoint.
"Il est vraiment temps d'élever le curseur"
Me Anne Bouillon regrette que "l'information circule mal" et estime que c'est "l'un des axes de travail sur lequel il faut améliorer les dispositifs de prévention et de protection". L'avocate spécialisée en droit des femmes met en avant une mesure mise en place en Espagne. Depuis 2007, u n dispositif baptisé Viogèn permet "à tous professionnels du droit et médico-sociaux d'avoir accès à une plateforme où toutes les informations [sur les victimes notamment] sont partagées", explique Me Anne Bouillon. Elle déplore le "retard" de la France sur ces questions.
L'avocate considère que la France peut aussi "s'améliorer sur la protection des femmes". Elle revient sur le m eurtre d'Hadjira, tuée de plusieurs coups de couteau fin juillet à Franconville (Val-d'Oise), alors qu'elle avait "demandé quelques semaines auparavant une ordonnance de protection qui lui a été refusée par le juge de Pontoise". "Il est vraiment temps de changer la loi sur les ordonnances de protection, de changer de paradigme et d'élever le curseur", exhorte Me Anne Bouillon.
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