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Environnement : les pics de pollution aux particules fines provoquent-ils des flambées de Covid-19 ?

Plusieurs études publiées ces derniers mois concluent à une corrélation entre les fortes concentrations de particules fines PM2,5 et les épisodes de regain de l'épidémie. D'autres recherches devront confirmer cette hypothèse.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
  (JACOPO LANDI / HANS LUCAS)

La pollution de l'air et les particules fines jouent-elles un rôle dans la pandémie de Covid-19 ? La question, qui agite les scientifiques depuis l'explosion, au printemps 2020, de l'épidémie dans la plaine du Pô, cette zone industrialisée du nord de l'Italie, est revenue sur le devant de la scène à la faveur des épisodes de sables du Sahara qui ont frappé l'Europe en février et des pics de pollution observés en France, comme celui du mardi 9 mars en Ile-de-France.

Ces particules fines de sable ou produites par la circulation automobile ou le chauffage pourraient avoir entraîné, aux côtés des variants, la reprise de l'épidémie constatée ces dernières semaines. Cette hypothèse, qui reste à confirmer, est au cœur des travaux de certains chercheurs. "Une haute concentration de particules fines peut favoriser l'attachement du virus aux cellules humaines. Cela signifie que la forte pollution de l'air peut rendre le virus plus contagieux. En plus, ces particules peuvent enflammer le système cardio-vasculaire et le système respiratoire. Cela signifie que la pollution de l'air peut aussi exacerber les conséquences de Covid-19", explique à franceinfo le climatologue Mario Rohrer.

Une corrélation intrigante

Avec deux collègues de l'université de Genève, dont le spécialiste de santé publique Antoine Flahault, il a publié en novembre dans la revue Earth Systems and Environment (en anglais) une étude sur la corrélation entre les pics de pollution aux particules fines et les flambées épidémiques de Covid-19. Les chercheurs ont observé les courbes de contamination et celles de pollution à Tenerife (Espagne), Londres (Royaume-Uni), dans le canton suisse du Ticino et en Ile-de-France au printemps 2020. Résultats, "la vaguelette de Covid-19 à Tenerife et les tempêtes épidémiologiques observées à Londres, Paris et à Ticino coïncident ou suivent des pics de concentration de particules fines PM2,5", les plus petites et les plus dangereuses pour la santé, constatent-ils.

Forts de cette corrélation, ils estiment "raisonnables et plausibles que les fortes concentrations en PM2,5 – favorisées par des inversions de température ou des intrusions de sable du Sahara – non seulement modulent, mais surtout boostent les épisodes sévères de Covid-19""La complexité des connexions qui provoquent des flambées aiguës de Covid-19 incluent évidemment des facteurs physiologiques, sociaux, économiques, climatiques ou autres et davantage de recherches dans différentes disciplines sont nécessaires pour corroborer davantage cette hypothèse", précisent-ils cependant avec prudence.

Un facteur d'aggravation de la maladie ?

Quel peut être le lien entre un polluant microscopique et l'épidémie ? Deux hypothèses, passées en revue dans une synthèse publiée en février dans European Respiratory (en anglais), sont sur la table. D'abord, les particules fines pourraient jouer un rôle dans la transmission du virus en le transportant. "Il est bien établi que les particules peuvent servir de vecteurs pour diverses substances comme les pollens et les micro-organismes tels que les bactéries, les champignons et les virus", rappellent les auteurs de la synthèse, en citant l'exemple de la grippe aviaire. Ils relèvent que de l'ARN de Sars-CoV-2 a été détectée sur des particules dans la province de Bergame (Italie), mais rappellent que cette présence "ne signifie pas nécessairement" qu'une infection est possible, puisqu'elle dépend également de la concentration et de la structure du virus présent.

La seconde hypothèse semble plus solide : la pollution aggraverait la maladie en affaiblissant le système immunitaire et en accentuant les comorbidités comme les maladies cardio-vasculaires. "Des augmentations des concentrations en PM2,5 ont été associées avec des augmentations des taux d'infection de maladies virales comme la grippe, le virus respiratoire syncytial ou la rougeole", peut-on lire dans la synthèse, qui relève également que des études en laboratoire ont mis en évidence, chez l'homme comme l'animal, le fait que l'exposition à la pollution augmente la perméabilité des muqueuses et le stress oxydatif.

Comme les chercheurs suisses, les auteurs de la synthèse publiées dans European Respiratory estiment que davantage de recherches sont nécessaires pour confirmer ces hypothèses. Mais, "à la lumière des relations entre la pollution de l'air et le Covid-19, et en vertu du principe de précaution, nous recommandons de réduire la pollution de toutes les sources, en particulier le trafic automobile et le chauffage".

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