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Vidéo Les dessous de l'intérim médical

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Durée de la vidéo : 4 min
l'oeil - interim
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Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
France Télévisions

À l'hôpital, il y a les médecins salariés et les intérimaires. Renforts parfois indispensables face aux pénuries de personnel.Ils sont payés à la mission, et leurs revenus peuvent s’envoler. Jusqu’à trois fois celui de leurs collègues titulaires. Une rémunération que le ministère de la Santé veut limiter.

Le docteur Asmaa Khaled est anesthésiste et travaille en tant qu’intérimaire. En raison du manque de personnel hospitalier, sa boîte mail déborde d’offres de remplacements dans des hôpitaux partout sur le territoire.

Sur cette offre, les 24 heures de garde en bloc opératoire sont payées 1 300 € brut. C’est en un jour plus de la moitié de ce qu’Asmaa pouvait gagner en un mois à l'hôpital quand elle était salariée.

"Ma rémunération nette à l’époque était de 2 235 euros. Quand je revois ces chiffres, j’ai du mal à comprendre pourquoi je me suis infligée tout ça. C’est ridicule, c’est une rémunération vraiment humiliante." confie-t-elle.

Asmaa assume parfaitement son choix. Si elle préfère l'intérim, c’est aussi dit-elle pour des raisons d’organisation personnelle.

La loi de l'offre et de la demande

Mais d’autres n’y verraient que l’avantage financier. Rares sont les médecins qui en parlent ouvertement mais nous avons pu nous entretenir avec un jeune urgentiste, diplômé depuis deux ans. Il reconnaît que le travail intérimaire est un marché et assume profiter de l’offre et de la demande.

J’aime bien m’occuper des patients, j’adore mon métier, mais pour 3 000€ par mois c’est pas possible.

Un médecin intérimaire

à l'Œil du 20 heures

"En gros par mois, en travaillant à temps plein, c’est aux alentours de 9000 € par mois à peu près. Un salaire en début de carrière, je le pratique pas mais je vois à peu près mes collègues, ils sont à peu près à 3000 € par mois, ça m’intéresse pas." assure cet urgentiste intérimaire qui souhaite rester anonyme.

Des revenus bientôt limités

En France, il y aurait environ 15 000 médecins intérimaires. Avec dans certains cas des dérives qui coûtent cher à l'hôpital public. C’est ce que souligne ce rapport du Sénat de février 2021 :

"En 2013, le coût total pour l’hôpital public avoisinait les 500 millions d’euros par an (...) porté en 2018 à 1,4 milliards d’euros."

Pour mieux réguler le recours aux médecins intérimaires, l’Etat veut plafonner ces rémunérations. Moins de 50€ brut de l’heure maximum.

Une mesure que saluent certains directeurs d'hôpitaux qui, malgré les besoins dans les déserts médicaux notamment, ne cautionnent pas de telles rémunérations.

"Moi ça m’est déjà arrivé de payer des intérimaires 3 500 balles par jour. Ils sont payés tous les jours par notre argent public, je trouve ça scandaleux alors qu’ils sont payés et formés par notre argent public."

Qu’ils ne fassent pas médecine, ou pas en France, médecine aux Etats-Unis mais pas chez nous.

Un directeur d'hôpital

à l'Œil du 20 heures

Ce n’est pas l’avis de tous les directeurs d’hôpitaux. Avec ce nouveau plafond, certains craignent de ne plus pouvoir recruter et chercheraient déjà à contourner la loi.

Dans un e-mail que nous nous sommes procurés, un responsable de service propose à un médecin remplaçant de conserver son salaire avantageux. Voilà ce qu’il lui écrit : "afin de maintenir vos interventions (...) je souhaite vous proposer un statut de praticien contractuel sur base du montant que vous percevez aujourd’hui. La quotité de temps serait variable et lissée sur la durée (...) de trois mois à trois ans si vous le souhaitez."

Contactée, la direction de cet l'hôpital affirme que cet email est ancien et que la loi sera bien appliquée. Pourtant, selon nos informations, cet échange a bien eu lieu il y a quelques jours.

De son côté, le syndicat des médecins remplaçants justifie le recours aux intérimaires face à la pénurie de personnel soignant et rappelle que ces derniers payent en moyenne 20% de charges et se déplacent à leurs frais lorsqu’ils sont en mission.

Parmi nos sources :

Article R6146-4 du Code de la Santé Publique

Rapport du sénateur Alain Millon

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