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Condamnation de Servier dans le scandale du Mediator : "Cela ne concerne que deux victimes, alors qu'il y en a des milliers"

Le docteur Irène Frachon, qui a révélé le scandale du Mediator, livre à francetv info son sentiment après la décision de justice qui a reconnu, jeudi, la responsabilité des laboratoires Servier pour la première fois.

Article rédigé par Violaine Jaussent - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le Dr Irène Frachon, le 21 mai 2013 au tribunal de Nanterre (Hauts-de-Seine). (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

La décision est tombée six ans après la révélation du scandale du Mediator. Le tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre (Hauts-de-Seine) a reconnu, pour la première fois, jeudi 22 octobre, la responsabilité civile des laboratoires Servier. Il était saisi pour des demandes d'indemnisation de deux malades de 72 et 67 ans, exposés à ce médicament accusé d'être à l'origine de graves lésions des valves cardiaques. Le TGI a condamné Servier à leur verser respectivement 27 350 et 10 000 euros d'indemnisation.

En 2009, c'est le docteur Irène Frachon qui a fait éclater le scandale autour de ce médicament, consommé par cinq millions de personnes en France. Pneumologue au CHU de Brest (Finistère) et auteure de Mediator 150 mg : combien de morts ? (éditions Dialogues.fr), elle réagit à cette décision de justice.

Francetv info : La justice condamne et reconnaît la responsabilité des laboratoires Servier pour la première fois. Comment accueillez-vous cette décision ?

Irène Frachon : C'est une décision majeure car les laboratoires Servier nient leur responsabilité depuis le début de l'affaire. Le Mediator est un produit dangereux, et l'a été pendant plus de quinze ans, avant les années 2000 : cette fois, c'est acté et c'est dit. Même si Servier va probablement faire appel. Ces laboratoires sont dans un déni délirant depuis des années !

Il fallait donc que cette décision tombe. Mais c'est tard... On a une décision au bout de cinq ans [les premières plaintes de familles de victimes, au pénal, datent de 2010]. Le temps de la justice a un côté surréaliste. C'est une décision qu'on attendait, mais qui ne met pas un terme à l'affaire. C'est un premier problème.

Il y a un deuxième problème ?

Oui, et il est énorme. Il s'agit de la faiblesse des indemnisations que doit verser Servier aux victimes. Quand j'ai découvert ces sommes, mes pensées sont allées à l'un des deux malades concernés. Sa vie est brisée... Il réclamait 900 000 euros, il va en recevoir 27 000 environ [son avocat a annoncé que son client allait faire appel]. Il faut des sanctions financières fortes pour prendre la mesure du scandale. Pour l'instant, on est bien en deça.

Pourtant, Servier a annoncé mercredi avoir provisionné 70 millions d'euros pour indemniser les victimes et leurs caisses d'assurance-maladie...

Cette somme est provisionnée, mais elle n'est toujours pas dans la poche des victimes. Il ne faut jamais croire Servier, qui ne raconte que des bobards, 24 heures sur 24 depuis cinq ans ! Rien n'est fini, il faut continuer.

Comment envisagez-vous la suite ?

Cette décision n'est qu'une étape sur un long chemin pavé d'embûches. Elle ne concerne que deux victimes, alors qu'il y en a des milliers. Une fois de plus, je vais continuer le combat, au corps à corps.

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