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La hausse des prix du gaz et des carburants provoque des blackout électriques au Nigeria

Le pays le plus peuplé d'Afrique est en proie depuis une semaine à d’énormes problèmes d’approvisionnement électrique. Et c’est en partie un effet en chaîne de la guerre en Ukraine.  

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le stand d'un vendeur d'arachides sur le marché d'Ibafo (Nigeria), lors d'un blackout le 22 mars 2022 (PIUS UTOMI EKPEI / AFP)

En huit jours, le Nigeria a déjà connu deux blackout électriques complets : plus du tout d’électricité pour les 210 millions d’habitants du pays pendant plusieurs heures. Le noir complet. Et aujourd’hui encore, 40% du pays est privé d’alimentation électrique. Les délestages sont fréquents, même dans les quartiers chics. Plus d’une dizaine de centrales sont à l’arrêt total ou partiel.

Les habitants ont donc recours à des générateurs électriques, mais il faut les alimenter en essence. Conséquence : les files d’attente s’allongent devant les stations-services. Du coup, la situation politique se tend. Les débats sont agités au Parlement, où l’opposition dénonce "la nonchalance du gouvernement". Mardi 22 mars, le président Muhammadu Buhari a présenté ses excuses à la population, dans une lettre publiée dans tous les médias. Il promet de résoudre la crise rapidement. Mais l’affaire s’annonce compliquée. Parce que les prix flambent : ceux du gaz (et le réseau nigérian dépend à 80% du gaz), et ceux du pétrole. Par exemple, le litre de gazole à la pompe a vu son prix multiplié par trois en quelques jours.

Guerre en Ukraine et infrastructures vétustes

C’est une conséquence de la guerre en Ukraine, mais pas seulement. Le conflit  accélère le processus puisque les cours de l’énergie augmentent. Mais là où ça devient paradoxal, c’est qu’en théorie ça devrait profiter au Nigeria : c’est le premier producteur de pétrole brut en Afrique, près d’un million et demi de barils par jour.  L'explication est simple. Le Nigeria produit du brut mais n’a quasiment pas de raffineries pour le transformer en essence. Donc il importe la majorité de son énergie et il subit les variations du marché.

Quant au réseau électrique, il est vétuste, souvent mal entretenu, inadapté à la croissance économique et démographique spectaculaire du géant d’Afrique. La demande d’électricité dépasse de beaucoup les capacités de production et de distribution. Enfin, la corruption fait le reste. Les subventions publiques versées par l'État pour contrôler les prix sont en partie détournées. Et ces subventions sont considérables : près d’un milliard d’euros par an depuis 20 ans. Donc l'État s’endette. C’est un cercle vicieux.  

Inquiétudes pour le mois de Ramadan

Ces délestages électriques ont aussi des effets en chaîne sur l’économie. De nombreux petits commerces ferment leurs portes : ils ne peuvent pas fonctionner sans électricité. Certaines entreprises renvoient leurs salariés chez eux ou limitent leurs horaires de travail, là encore pour enrayer la facture électrique. Et puis la flambée des prix de l’essence a un impact sur les transports, donc sur l’approvisionnement en produits alimentaires. L’inflation dépasse 15%.

Le risque de colère sociale est réel d’autant qu’un tiers de la population vit dans la grande pauvreté. Qui plus est, le Ramadan démarre le 1er avril. Dans ce pays où plus de la moitié de la population est musulmane, c’est évidemment un mois très particulier pour la consommation et les déplacements. Un nouveau blackout électrique pourrait donc être lourd de conséquences.    

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