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Pascal Ory : "Le bronzage est l'une des principales révolutions culturelles du XXe siècle"

L'historien Pascal Ory était invité sur franceinfo mercredi à l'occasion de la publication du livre "L'invention du bronzage", paru aux éditions Flammarion.  

Article rédigé par franceinfo, Jean-Mathieu Pernin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Pascal Ory, historien et auteur du livre "L'invention du bronzage". (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

"Le bronzage est l'une des principales révolutions culturelles du XXe siècle", indique l'historien contemporain Pascal Ory sur franceinfo mercredi 4 juillet. "Il n'y a rien de plus extraordinaire de passer d'une conception pigmentaire de la beauté et de santé à son exact opposé, tout cela sans raison objective", précise-t-il. 

La révolution du bronzage dans les années 1920 et 1930 "a fait scandale". En particulier "pour les vieilles générations" et "pour les racistes", indique l'historien. Il ne faut pas oublier qu'au même moment c'est l'apogée du monde colonial. Joséphine Baker est une star pour quelques-uns et l'abomination de la désolation pour d'autres", illustre Pascal Ory. 

Cela faisait en effet des siècles que les aristocrates valorisaient la blancheur, voire la pâleur, de la peau pour "se distinguer des paysans qui attrapent des coups de soleil (en travaillant dans les  champs)", rappelle-t-il. Les chrétiens influeront sur cette ancienne tendance. "Depuis l'Antiquité, les Occidentaux cherche la plus grande clarté de ton, mais le christianisme crée une justification théologique : la femme doit avoir pour modèle la Vierge Marie", explique Pascal Ory. 

Le bronzage, arme d'émancipation des femmes 

Car le rapport à la beauté du corps, peu importe l'époque, se concentre essentiellement sur celui des femmes. Auparavant, il était important que "la femme des élites" soit "pâle". Une contrainte esthétique qui ne s'appliquait pas aux hommes. Qui eux s'exposent. "Le mari est combattant ou sur la tribune. Il peut donc être un peu hâlé", ajoute l'historien. 

Puis au XXe siècle, la femme se dénude. "Une étape supplémentaire dans l'émancipation politique de la femme à travers son corps" à ne pas négliger pour Pascal Ory.  Il la met au même niveau que la libération pour les femmes du corset dans les années 1905-1910 ou l'obligation de porter les cheveux longs. "Ces sont des actes de provocation qui substituent la libération corporelle à une libération politique qui traîne un petit peu", décrypte l'historien. 

Aujourd'hui, les tendances ont encore évolué, et cette fois-ci en fonction de notre rapport à la santé. Avant les années 1970, "il n'existait aucune objection au bronzage". Au contraire même. "Les médecins affirmaient que le soleil pouvait guérir de la tuberculose", assure Pascal Ory. Ce qui s'est avéré être une parfaite erreur scientifique. Aujourd'hui donc, "nous voulons maintenant nous distinguer du bronzé excessif".

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