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Les infox de l'Histoire : "La vérité sur Jeanne d'Arc"
"Il n'y a pas d'histoire plus connue, il n'y en a pas non plus de plus mystérieuses", disait Philippe Erlanger à propos de Jeanne d'Arc. Six cents ans après sa mort, son histoire continue de nous intriguer. Comment croire, en effet, qu'en pleine guerre de 100 Ans, une petite paysanne des Marches de Lorraine qui ne savaient ni lire, ni écrire, ni monter à cheval, ni manier une épée, ait pu, en deux ans, rencontrer et convaincre le roi de France de lui confier une armée délivrée à Orléans, assiégée par les Anglais. Faire sacrer Charles VII à Reims avant d'être capturé, emprisonné, jugé puis brûlée vive à Rouen le 30 mai 1431. "Je dirai la vérité, mais je ne dirai pas tout", avait dit Jeanne d'Arc à ses juges. Si bien que sur ce qu'elle n'a pas voulu dire, certains ont inventé des légendes sur son épopée commencée le jour où, venue de Domrémy, elle rencontrait le roi de France à Chinon, le 23 février 1429.
Patrice Gélinet : L'historien que vous êtes, Olivier Bouzy, s'efforce de distinguer la vérité de toutes les légendes qui brouillent un peu son image, à commencer par celle de ses origines. Elle n'était pas une bergère, comme on le dit souvent.
Olivier Bouzy : Alors non, elle n'est pas une bergère. D'ailleurs, elle même le dit au cours de son procès pour cette condamnation. Mais la légende, la bergère qui fait les apparitions, son apparition un petit peu plus tard, au moment du procès de réhabilitation en 1456. Il y a deux personnes qui disent qu'ils l'ont vu arriver comme une pauvre petite bergère. Ça tient au fait que Jeanne d'Arc était une prophétesse, se présente comme une prophétesse à la cour de Charles VII et que pour les gens du Moyen Âge, les prophètes, ceux qui voient Dieu, sont des simples heureux, les simples, car ils verront Dieu. Donc les plus simples parmi les simples, le bon sauvage de l'époque, c'est le berger. Et d'ailleurs, c'est tellement le bon sauvage que vous avez toute une littérature de bergerie, une bêtise qui fait faire une bergerie. Et vous avez des choses comme la farce de maître patelin où on dit aux bergers de bêler comme ces moutons parce que c'est normal, il sait à peine parler.
Alors pour certains, il s'agirait d'un complot, cette histoire de Jeanne d'Arc. Ce qui a fait croire qu'elle était en fait que l'instrument d'un complot fomenté par la belle mère de Charles VII, Yolande d'Aragon, qui a présidé à l'examen de la virginité de Jeanne.
Pour les gens du Moyen Âge, ce que qu'on appelle la théorie bourguignonne, c'est que c'est Robert de Baudricourt qui a inventé Jeanne d'Arc. Yolande d'Aragon n'apparaît que très tard parce qu'en fait, on se rend compte qu'elle a participé au complot de Richemont. Elle a essayé de mettre le roi en tutelle, elle lui a fait les poches. Et donc, si elle est à Chinon au moment de l'arrivée de Jeanne d'Arc, c'est par hasard. C'est parce que l'armée anglaise qui vient de débarquer, a l'intention de prendre Angers, la capitale de son duché, et qu'elle vient se faire pardonner par son gendre. Lequel, pour la punir, lui fait vérifier une cuisse de la paysanne qui vient de débarquer. Ce qui, pour Yolande d'Aragon, reine de Sicile, reine de Jérusalem et ainsi de suite, n'est pas une tâche forcément très exaltante. Alors, pour revenir sur ce que vous disiez, en fait, les rois de France accueillent les gens assez couramment. D'abord, on a le droit d'aller déposer directement entre les mains du roi une requête et en l'occurrence, quand il s'agit d'une candidate au prophétisme. Évidemment, le roi est le premier intéressé. Et Jeanne d'Arc n'est pas la seule prophétesse à avoir été reçu par le roi. Il y en a trois autres à sa cour.
Autre légende qui n'apparaît en France qu'au début du 19e siècle et qui circule encore aujourd'hui : une espèce de théorie du complot selon lequel Jeanne d'Arc ne serait pas la fille d'un paysan mais celle d'un noble. Autrement dit, Jeanne d'Arc serait, selon Caze, la demi-sœur de Charles VII.
Oui, on a aussi une influence voltairienne Jeanne d'Arc. Et puis tous les membres de la famille royale couchent à droite et à gauche. Donc évidemment, ça fait un peu plus de suspens dans l'histoire. En Royal, Shakespeare écrit vers 1570 Donc il n'y a pas de suite ou de source sûre, il fait des erreurs dans son récit. Talbot meurt avant Jeanne d'Arc alors qu'en réalité il est mort bien après. Enfin, les Anglais prennent et brûlent Orléans. Et surtout, l'intérêt de la scène, c'est que ça fait mourir Jeanne d'Arc sous le poids de trois malédictions différentes, dont celle de son père qui la plus importante. Et ça ajoute un fardeau moral de celle qui, pour Shakespeare, est l'ennemie.
Avec "Les infox de l’Histoire", la deuxième saison du podcast de la Fondation Descartes en partenariat avec franceinfo, voyagez à travers les époques au cœur des grands épisodes de désinformation. Patrice Gélinet et ses invités exposent et analysent les infox qui ont défrayé la chronique de l’antiquité à nos jours. Complotisme, désinformation, rumeurs, calomnies, emballements médiatiques… Une saison 2 de 8 épisodes pour décrypter les mensonges de l’Histoire.
Producteur : Patrice Gélinet
Réalisatrice : Vanessa Nadjar
Documentaliste/Attachée de production : Juliette Marcaillou
Technicien : Manuel Couturier
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