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Les infox de l'Histoire : "1940-1990, le massacre de Katyn, 50 ans de mensonges"

Aux côtés de Stéphane Courtois, historien spécialiste des pays communistes et co-auteur du "Livre noir du communisme" (éditions Robert Laffont), Patrice Gélinet revient sur l’une des plus célèbres manipulations des faits : le massacre de 15 000 soldats et officiers polonais à Katyn en 1940.

Article rédigé par franceinfo
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Un homme indique le nom d'un membre de sa famille tué au Monument dédié aux officiers polonais assassinés lors du massacre de Katyn en 1940, à Kharkiv, le 25 septembre 2010. (SERGEI SUPINSKY / AFP)

Le 5 mars 1940, la police politique de l'URSS, Le NKVD, recevait de Staline l'ordre d'exécuter 25 000 officiers polonais qui avaient été faits prisonniers quand l'Armée rouge avait envahi la Pologne en 1939. Pendant trois ans, en dehors des plus hauts responsables soviétiques, personne n'a su ce qu'ils étaient devenus. Jusqu'à ce qu'en 1943, après l'invasion de l'URSS par l'armée allemande, celle-ci trouve le corps de plusieurs milliers d'entre eux dans un charnier de Biélorussie, à quelques kilomètres de Smolensk. C'était le 13 avril 1943, dans la forêt de Katyn. La découverte des plus grands crimes de guerre du 20e siècle.

Patrice Gélinet : Pour comprendre ce qui s'est passé à Katyn, il faut peut être remonter six mois en arrière, quelques jours avant le déclenchement de la deuxième Guerre mondiale, avec la signature de cet incroyable pacte conclu entre l'Allemagne nazie et l'URSS le 23 août 1939 et qui a fait que pendant presque deux ans, au début de la deuxième Guerre mondiale, avant de devenir des ennemis, Staline et Hitler ont été des alliés aux dépens de la Pologne...

Stéphane Courtois : Absolument. Ce pacte, dit à l'époque de "non-agression", était en réalité par antiphrase un pacte d'agression, puisque ce qu'on ignorait, c'est qu'il était assorti de protocole secret qui garantissait à l'U.R.S.S. la moitié orientale de la Pologne, au cas au cas où la Pologne serait attaquée. Mais évidemment, c'était l'objet de cette affaire, ainsi que le fait que les Etats baltes et une province roumaine, la Bessarabie, tomberaient dans la zone d'influence soviétique. Donc, c'est le début de cette affaire et qui commence en réalité le 15 mars 1939, quand Hitler envahit la Tchécoslovaquie. Il déchire purement et simplement les accords de Munich. Les accords de Munich, on peut en penser ce qu'on en veut, mais enfin, il existait. Hitler les déchire d'un seul coup en occupant la Tchécoslovaquie. Immédiatement, la France et l'Angleterre garantissent les frontières d'un certain nombre de pays d'Europe de l'Est, dont la Pologne, qui était évidemment le morceau principal. Et à partir de ce moment là, Hitler, d'un côté, a pensé que la France et l'Angleterre ne rentreraient pas dans la guerre pour la Pologne. Ce en quoi il s'est totalement trompé. Mais de l'autre côté, Staline, lui, s'est dit "l'occasion est bonne. Si Claire veut attaquer la Pologne, il a besoin d'être couvert sur son flanc ouest. Et à ce moment là, je peux "monnayer" ma neutralité. Et c'est tout simplement ce qui s'est passé.

Ces dizaines de milliers de prisonniers de l'armée polonaise, capturés par l'Armée rouge, qui sépare alors les simples soldats des officiers, qui sont, eux, envoyés dans trois camps de l'URSS et dont personne, pendant trois ans, n'a su ce qu'ils étaient devenus.

Absolument, ils disparaissent. Alors évidemment ce qu'il faut souligner, c'est que ces officiers, en dehors des officiers professionnels, ce sont des officiers de réserve. Et ces officiers de réserve, c'est l'élite de la nation : des professeurs, des architectes, des médecins, des ingénieurs, etc qui s'engagent pour la guerre. C'est toute l'élite de la nation polonaise qui est là, qui est prise en Pologne orientale, alors que d'autres, d'autres officiers, évidemment, combattaient en Pologne occidentale contre les nazis. Et ils disparaissent.

Patrice Gélinet: Et c'était en 1990. La fin de 50 ans de mensonges, d'un mensonge d'Etat Stéphane Courtois Gorbatchev reconnaissant la responsabilité. Mais en fait, c'est un peu plus tard. On ne sait pas encore tout, car il y a des archives qui ne sont toujours pas sorties. Et ça, c'est Eltsine, le successeur de son chef, qui va, qui va révéler au fond les preuves concrètes, notamment le fameux document cité.

Stéphane Courtois: Le document décisif qui tient sur une simple page de papier et qui est l'ordre du bureau politique. Or, on sait très bien qu'en RSS qui commande, c'est le bureau politique et au bureau politique qui commande, c'est Staline. Donc, voilà cette incroyable polémique qui a été extrêmement violente avec des dizaines et des dizaines de livres pendant 50 ans. Des deux côtés, bien entendu. On se bombardait soigneusement, a été d'une certaine manière, a été réglée par ce simple document. Maintenant, si on n'avait pas trouvé si ce document avait été détruit, les historiens seraient quand même très embêtés.

Avec "Les infox de l’Histoire", le nouveau podcast de la Fondation Descartes en partenariat avec franceinfo, voyagez à travers les époques au cœur des grands épisodes de désinformation. Patrice Gélinet et ses invités exposent et analysent les infox qui ont défrayé la chronique de l’antiquité à nos jours. Complotisme, manipulations, rumeurs, calomnies, emballements médiatiques… Un podcast de 8 épisodes pour décrypter les mensonges de l’Histoire.

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