Vrai ou faux
"Frenchie Shore" : l'Arcom peut-elle réguler la nouvelle téléréalité "à la limite de la pornographie", selon la ministre de la Culture ?

La ministre de la Culture Rima Abdul-Malak affirme que l'Arcom est compétent pour réguler la téléréalité trash "Frenchie Shore", mais c'est faux.
Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
"Frenchie Shore", la nouvelle téléréalité française est diffusée sur sur la chaîne MTV France et sur la plateforme Paramount+. (CAPTURE D'ECRAN PRAMOUNT +)

"On est à la limite de la pornographie." C'est ainsi que la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, qualifie "Frenchie Shore", la nouvelle téléréalité française qui fait sensation. Les images et les conversations sont trash, avec alcool, scènes de sexe à peine flouttées et vulgarité à volonté, à faire pâlir les anciens candidats de Loft Story qui avaient pourtant eux-mêmes fait scandale il y a 20 ans.

Dans une interview au journal Le Parisien , publiée lundi 20 novembre, la ministre s'inquiète de la diffusion d'extraits de l'émission sur les réseaux sociaux car "n’importe qui peut tomber dessus", notamment les enfants de moins de 16 ans à qui le programme est pourtant interdit. Rima Abdul Malak assure que "l’Arcom [l’autorité de régulation de l'audiovisuel et du numérique], contrairement à ce que j’ai pu lire, a compétence pour les plateformes au titre de la protection des mineurs". Vraiment ?

L'Arcom, pas compétente pour réguler la diffusion de l'émission…

Mais la ministre se trompe : l'Arcom ne peut pas intervenir. Contacté par franceinfo, l'autorité assure qu'elle n'est pas compétente pour réguler l'émission, ni à la télévision, ni sur internet, même si des mineurs risquent de tomber sur des images extraites des épisodes.

Tout d'abord, l'Arcom ne peut pas empêcher ni encadrer la diffusion de "Frenchie Shore" car la téléréalité est diffusée sur la chaîne MTV France et sur la plateforme Paramount+ qui échappent toutes les deux à la législation française : MTV France, contrairement à ce que son nom indique, est basée en République tchèque et Paramount+ en Allemagne. Elles dépendent donc des législations de ces deux pays.

Le régulateur peut seulement demander à ses homologues tchèque et allemand d'analyser cette téléréalité, ce qu'il a fait dans deux courriers datés du 22 novembre que le Vrai ou Faux a pu consulter.

Roch-Olivier Maistre, son président, y écrit : "La teneur des deux premiers épisodes du programme Frenchie Shore, diffusés sur MTV France le samedi 11 novembre à partir de 23 heures, a suscité de vives réactions en France. Ce programme est en effet susceptible de soulever des interrogations au regard des objectifs, d’une part, de respect et de protection de la dignité humaine et, d’autre part, de protection des mineurs."

Il conclut : "Je vous serais donc reconnaissant de procéder à l’analyse de ce programme au regard du droit applicable."

… ni la publication de contenus sexuels sur les réseaux sociaux

Le pouvoir de l'Arcom sur les contenus sexuels diffusés sur internet est aussi limité, même quand il s'agit de protéger les mineurs. Elle ne peut que réguler les sites pornographiques en leur demandant de respecter la loi et de ne pas être accessible aux mineurs, comme il est expliqué sur son site internet, mais elle ne peut rien contre la diffusion d'images sexuelles sur les réseaux sociaux.

Sur Facebook, X, Instagram, TikTok, le régulateur n'a de compétence que pour agir contre la haine en ligne et contre la désinformation. Et même dans ces domaines-là, "l'Arcom n'a aucune prise sur les contenus", a assuré l'autorité à franceinfo, elle ne peut pas en demander la suppression. L'autorité ne peut que veiller à ce que les réseaux mettent bien en place des outils de régulation contre la haine en ligne et contre la désinformation, comme son site le précise.

Concernant "Frenchie Shore", même si cela n'entre donc pas dans son domaine de compétences, le régulateur a tout de même contacté les réseaux sociaux pour savoir s'ils surveillaient particulièrement la diffusion d'extraits de l'émission trash. Ils lui ont assuré que oui.

L'Arcom, qui a en réalité reçu "très peu" de signalements à ce sujet, ne peut pas faire plus. Ou alors, il faudrait que la ministre de la Culture, elle-même, envisage de lui confier davantage de pouvoirs.

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