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Le vrai du faux. Immigration : le nombre d'entrées irrégulières en Europe a-t-il bondi de "300%", comme le dit Jordan Bardella ?

Le président du Rassemblement national dit s'appuyer sur les chiffres de Frontex, l'agence européenne des frontières. Mais c'est faux. Explications.
Article rédigé par Thomas Pontillon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Jordan Bardella, sur France Inter, le 15 mai 2023. (RADIO FRANCE / FRANCEINFO)

L'immigration aux frontières de l’Europe serait en train de bondir selon Jordan Bardella, le président du Rassemblement national : "Vous avez vu les derniers chiffres de Frontex, l'agence de garde-frontière européenne, qui pointe que par rapport à 2022 il y a une hausse de 300% des entrées illégales de l'immigration en Europe", a-t-il dit sur France Inter.

Une hausse très localisée 

Ce que dit Jordan Bardella est faux : il n'y a pas une hausse de 300% des entrées irrégulières en Europe. En réalité, c'est même nettement moins. Selon les données de Frontex, les entrées irrégulières en Europe ont augmenté de 30%, dans les quatre premiers mois de 2023 par rapport aux quatre premiers mois de 2022. Cela représente un peu plus de 80 000 tentatives de passer une frontière européenne.

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Le chiffre de 300% cite par le président du Rassemblement national chiffre existe bien, mais il ne concerne qu'une seule porte d'entrée dans l'Union européenne : celle de la Méditerranée centrale, c'est-à-dire le sud de l'Italie, notamment l'île de Lampedusa, près de la Sicile, où débarquent des navires de fortunes. Sur cette route, selon les données de Frontex, un peu plus de 42 000 entrées irrégulières ont été enregistrées entre janvier et avril, contre un peu plus de 10 000 l'an dernier à la même époque. Il s'agit bien d'un record pour cet axe, très utilisé depuis des années par les migrants, mais ce n'est pas le seul point de passage en Europe ! 

Les autres routes sont toutes en baisse

Pour les autres points de passages en Europe, c'est en revanche partout en baisse ! Que ce soit dans les Balkans (qui était la route la plus empruntée l'an dernier par les migrants), mais aussi entre la Turquie et la Grèce ou encore autour de Gibraltar au sud de l'Espagne, tous ces axes ont vu passer en ce début d'année moins de monde que l'année dernière à la même époque avec des baisses parfois importantes de l'ordre de 30 à 50% selon les endroits. 

Tableau fourni par Frontex sur les routes empruntées par les migrants durant les quatre premiers mois de l'année 2023 par rapport à 2022. (FRONTEX)

Selon Frontex, si ça baisse dans les Balkans, c'est notamment parce qu'il y a eu moins de migrants syriens et afghans et que la Hongrie a renforcé ses contrôles aux frontières. Et si ça augmente fortement en Méditerranée, c'est parce que les groupes de passeurs en Libye et en Tunisie sont mieux organisés, ils profitent aussi de l'instabilité politique dans ces deux pays, selon Frontex.

Autre raison : les passeurs fabriquent plus rapidement des embarcations de fortune, des petits bateaux assemblés en quelques heures seulement sur une plage avant de prendre le large. Conséquence : le prix des traversées a baissé et le nombre de candidats au départ lui a augmenté. 

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