Europe : Allemagne, Pays-Bas et Serbie... Ces pays où l'extrême droite s'installe

Tous les jours, le club des correspondants décrit comment un même fait d'actualité s'illustre dans plusieurs pays. Ce mardi, le club des correspondants part en Europe, dans trois pays où l'extrême droite gagne du terrain : les Pays-Bas, l'Allemagne et la Serbie.
Article rédigé par Sébastien Baer, Laurent Rouy - Antoine Mouteau
Radio France
Publié
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Dans plusieurs pays européens, l'extrême droite remporte des élections et semble s'installer. Photo d'illustration (PHILIPPE TURPIN / MAXPPP)

L'extrême-droite est-elle en train de s'installer en Europe ? Aux Pays-Bas les négociations pour un gouvernement de coalition se font avec l'extrême droite, sortie vainqueur des dernières législatives, le 22 novembre. En Allemagne, l'extrême droite a remporté, dimanche 17 décembre, sa première mairie dans une ville "de taille moyenne", à Pirna, 40 000 habitants, dans la région de Saxe, à l'est du pays. Et en Serbie, dans les Balkans, le SNS, proche de vladimir Poutine, au pouvoir depuis 2012, vient a priori de remporter, dimanche, les élections législatives.

Pays-Bas : Geert Wilders vainqueur des législatives

Après la victoire de l'extrême droite aux législatives, les négociations en vue de former un gouvernement de coalition de la droite et de l'extrême droite battent leur plein. Et on ne sait pas jusqu'à quand les trois partis de droite et du centre droit vont rester à la table des négociations avec le parti d'extrême droite de Geert Wilders, le Parti pour la Liberté, qui traîne depuis longtemps l'image d'une formation trop rigide et peu ouverte aux arguments des autres partis.

Mais depuis sa victoire aux législatives, Geert Wilders tente visiblement une opération de dernière minute de dédiabolisation afin de montrer aux autres partis et aux Néerlandais qu'ils n'ont rien à craindre, avec lui aux responsabilités. Au Parlement, il adresse notamment beaucoup moins d'insultes aux autres partis. Dans ce contexte, aux Pays-Bas, depuis quelques semaines, on évoque beaucoup, sur le ton de l'humour, non plus de Geert Wilders mais de "Geert Milders", en français "Geert Plus doux".

Cette nouvelle image ne passe absolument pas chez ses opposants, à gauche notamment. Son concurrent social-démocrate, l'ancien commissaire européen à l'Action pour le Climat, Frans Timmermans, a récemment comparé Geert Wilders au personnage de Bruce, le requin du film d'animation de Disney Némo. Bruce qui a un moment décide de devenir végétarien mais dont la véritable nature reprend le dessus à la simple odeur du sang.

Allemagne : l'AFD à 20% dans les sondages

L'AFD, le parti d'extrême droite ne cesse de gagner du terrain. Le dernier exemple se situe à Pirna. Quelques mois plus tôt, l'AFD a aussi remporté sa première élection régionale en Thuringe, avant de décrocher son premier mandat de maire dans une petite ville de 9 000 habitants. À chaque fois, ces succès ont été obtenus dans des ex-régions d'Allemagne de l'Est, où l'AFD est en tête avec 32% des intentions de vote.

Sur le plan national, l'extrême droite séduit également, créditée d'un peu plus de 20% dans les sondages d'opinion, la formation est la deuxième force politique, derrière les conservateurs de la CDU mais devant les trois partis de la coalition au pouvoir. Elle a enregistré de très bons résultats lors des scrutins du mois d'octobre en Hesse et en Bavière.

L'AFD a pourtant connu des turbulences ces dernières semaines, les services de renseignement l'ont placée sous surveillance renforcée dans trois régions. Mais ces mesures semblent sans effet sur la popularité du parti. L'AFD profite du mécontentement d'une partie de l'opinion à l'égard du gouvernement. Quand la coalition est arrivée au pouvoir à l'automne 2021, l'AFD était à 10%. Elle a désormais doublé son score, grâce à ses réponses simples aux problèmes du pays : fermeture des frontières et expulsions pour résoudre la crise des réfugiés. Mais aussi avec la fin des sanctions contre la Russie pour importer du gaz bon marché et assurer l'approvisionnement énergétique.

L'AFD cherche aussi à s'acheter une conduite et elle a pris notamment ses distances avec les milieux d'ultra-droite. Ses dirigeants ont maintenant les yeux tournés vers les scrutins prévus l'année prochaine dans ses bastions, trois régions de l'Est, où l'AFD fait la course en tête.

Serbie : Aleksandar Vucic critique l'UE à bas bruit

La Serbie est aujourd'hui, contrôlée par le SNS, le parti de l'homme fort du pays : Aleksandar Vucic. Ce politicien est un ancien ultranationaliste, qui à l'époque des guerres de Yougoslavie et du massacre de Srebrenica avait appelé à tuer 100 musulmans pour un serbe, puis avait, dans les années 2000, pris la défense de criminels de guerre, comme Ratko Mladic. Vucic avait aussi capitalisé, et il le fait toujours, sur le refus de la perte du Kosovo et l'injustice causée aux Serbes.

Mais depuis son accession au pouvoir en 2012 il a complètement changé sa rhétorique. Il se dit proeuropéen et ouvert au dialogue avec le Kosovo. Il a aussi supprimé toute agressivité de son discours. En revanche il cultive de bonnes relations avec la Russie de Vladimir Poutine et critique l'Union européenne à bas bruit. Résultat, l'adhésion à l'idée européenne est de plus en plus faible en Serbie.

Il faut bien comprendre que les marqueurs d'extrême droite en Serbie ne sont pas liés à l'immigration, car c'est un phénomène marginal. Les migrants en Serbie ne désirent qu'une chose : franchir la frontière de l'Union européenne au plus vite. Ce qui caractérise l'extrême droite dans le pays, c'est le lien fort avec la Russie de Poutine, le rejet de l'Otan, accusée d'avoir arraché le Kosovo à la Serbie suite aux bombardements de 1999, et d'une vision de l'Union européenne trop libérale, opposée à de soit distantes valeurs traditionnelles serbes, basées sur le patriarcat et sur l'idée que la Serbie a vocation à contrôler, du moins en partie, les pays voisins, en raison des minorités serbes qui y habitent.

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