Corse : "Le refus du gouvernement d'un véritable dialogue conduit à une situation de blocage politique" estime Gilles Simeoni
Gilles Simeoni, le président du Conseil exécutif de Corse, était l'invité, lundi, de "L'interview politique" sur franceinfo. Il est revenu sur son entretien l'après-midi à Matignon avec le Premier ministre.
Le président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, était reçu à Matignon, lundi 2 juillet, où il a rencontré le Premier ministre pendant deux heures. Sur franceinfo, Gilles Simeoni a réaffirmé que "le refus du gouvernement d'un véritable dialogue conduit à une situation de blocage politique".
franceinfo : Pourquoi avoir répondu présent à l'invitation du Premier ministre, contrairement à votre collègue Jean-Guy Talamoni, président de l'Assemblée de Corse, qui a boycotté cette rencontre ?
Gilles Simeoni : J'étais présent aujourd'hui parce que je considérais que c'était ma responsabilité de président du Conseil exécutif de Corse de venir clore ce cycle de discussions, et de venir dire au Premier ministre ce que l'ensemble de la majorité territoriale corse et ce que beaucoup de Corses pensent des six mois écoulés. Le refus du gouvernement et de l'État d'un véritable dialogue conduit aujourd'hui à une situation de blocage politique et conduira, si ce refus perdure, à une situation d'impasse.
Vous semble-t-il que le gouvernement prend en compte la dimension politique de la question corse, qui s'illustre en particulier à travers votre volonté de rapprochement des prisonniers dits "politiques" ?
C'est la faiblesse originelle du processus tel qu'il a été mis en oeuvre par le gouvernement et par le président de la République depuis six mois. Il y a depuis cinquante ans un conflit politique, avec des expressions quelquefois dramatiques, un conflit qui trouve son origine dans la volonté du peuple corse d'être reconnu dans son existence et dans ses droits. Je connais, et nous connaissons tous, le caractère extrêmement douloureux de cette affaire. Mais à partir du moment où on veut appliquer le droit, il faut l'appliquer à tout le monde, et ces trois personnes ont droit au rapprochement. Sinon, il faut dire qu'on n'est pas dans une logique d'application du droit, mais dans une logique de vengeance, et je ne crois pas que ce soit acceptable dans une démocratie.
La singularité de la Corse est retenue dans le projet de révision constitutionnelle. Que demandez-vous de plus ?
Nous demandons un statut d'autonomie, qui a été voté par les Corses à une grande majorité. C'est d'ailleurs la règle dans toutes les îles de Méditerranée et de l'Union européenne. Même si on accepte qu'on ne puisse pas aller jusque là aujourd'hui, ce qui est extrêmement regrettable, nous avons démontré que le projet d'article 72-5 proposé par le gouvernement ne pourra pas fonctionner. C'est la redite à la virgule près de l'article 73 actuel, que le gouvernement et les élus des DOM vont faire évoluer parce que ça n'a pas marché pendant quinze ans. Ce serait un élément fort qu'on puisse adapter la loi par une habilitation permanente dans un certain nombre de domaines. J'ai demandé au Premier ministre s'il était prêt à faire évoluer ce texte, ce qui est demandé par la majorité de l'Assemblée de Corse, y compris le groupe qui soutient la majorité présidentielle. J'attends sa réponse et j'espère qu'il dira oui. Il y a cette question du statut fiscal et social portée depuis un demi-siècle par les nationalistes. Pour la première fois, le Premier ministre a dit que la Corse a droit à un statut fiscal et social spécifique. Au delà de cet accord de principe, j'attends la confirmation publique. La politique de la chaise vide n'est pas envisageable, mais ce n'est pas un signe de faiblesse, c'est un signe de responsabilité car les Corses nous ont élus pour assumer, nous allons continuer à le faire et dialoguer avec l'État. Mais le gouvernement sait que nous sommes les héritiers d'un combat historique et nous ne renoncerons pas à notre idéal.
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