Édito
État d'urgence en Nouvelle-Calédonie : la solution de cette crise est-elle exclusivement régalienne ?

L'archipel est secoué par la fronde des indépendantistes contre une réforme électorale votée par le Parlement. Quatre personnes, dont un gendarme, sont mortes au cours des trois nuits d'émeutes.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Une voiture incendiée après le pillage d'un supermarché et la vandalisation de magasins dans le quartier de N'Gea, à Nouméa, le 14 mai 2024. (DELPHINE MAYEUR / AFP)

Après trois jours d’émeutes meurtrières, Emmanuel Macron a donc instauré, mercredi 15 mai, l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie et Gabriel Attal a annoncé le déploiement de l’armée. La solution de cette crise n'est pas exclusivement régalienne, mais pour l’exécutif, le retour à l’ordre républicain reste un préalable indépassable. Quand on décompte quatre morts dont un gendarme, des centaines de blessés, des magasins pillés, et des habitants terrorisés, c’est même une urgence. Raison pour laquelle le chef de l’État s’est résolu à déclencher cette procédure exceptionnelle. L’ordre n’est néanmoins, ni une fin en soi, ni un projet, c’est un outil. C’est pourquoi Emmanuel Macron a invité dans un courrier tous les représentants néo-calédoniens à reprendre le dialogue avec l’exécutif pour trouver un accord global. Cette main tendue, c’est aussi un aveu de l’échec de la méthode gouvernementale, qui a conduit à l’impasse actuelle.
 

Le gouvernement a échoué à concilier les trois légitimités qui s’affrontent dans ce dossier calédonien. La première est politique, elle est issue des urnes et découle des trois référendums successifs, qui ont rejeté l’indépendance de l’archipel entre 2018 et 2021. La deuxième est juridique et tient au processus législatif en cours. Une réforme constitutionnelle visant à élargir le corps électoral calédonien a bel et bien été adoptée dans les mêmes termes par les deux Assemblées. Mais l’exécutif a eu tort de négliger une troisième légitimité, historique, qui porte de longue date la revendication d’indépendance du peuple kanak. Signe de cette attitude, le gouvernement avait refusé en décembre 2021 de reporter le troisième référendum d’autodétermination, finalement boycotté par les indépendantistes, et c’est ce premier blocage, qui est à l’origine du regain de tension. 

L’avenir de la Nouvelle-Calédonie


Comment l’exécutif peut-il trouver une sortie de crise ? Le chemin promet d’être long et difficile. D’abord, parce qu’Emmanuel Macron va devoir retrouver la confiance des indépendantistes, qui l’accusent d’être sorti de son rôle d’arbitre. Et puis surtout parce qu’après les trois référendums, l’Élysée considère qu’il est temps d'"inventer" un nouveau processus, post-accords de Nouméa, pour garantir "l’avenir de la Nouvelle-Calédonie dans la République". Un dessein qui enterre, de fait, toute perspective d’indépendance, au risque d’alimenter une frustration souterraine propice à de futures explosions de violence.

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