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1914-1918, franceinfo y était. 20 novembre 1917 : Clémenceau au pouvoir

Cent ans après la Première guerre mondiale, franceinfo raconte les événements clés de 1914-1918 comme s'ils venaient de se passer. Aujourd'hui, "Clémenceau au pouvoir".

Article rédigé par Grégoire Lecalot, Sébastien Baer
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Georges Clémenceau arrive au pouvoir le 20 novembre 1917. (GALLICA / BNF)

Grand oral pour le tout nouveau chef du gouvernement. Un discours assez rapide devant les députés qui viennent de lui accorder leur confiance. Georges Clemenceau, 76 ans, devient donc pleinement président du Conseil huit ans après son premier passage à ce même poste. À la Chambre des députés, on retrouve Sébastien Baer : c’est un discours très offensif qu’a prononcé le président du Conseil…

C’est un homme de 76 ans qui vient de s’adresser au Conseil, mais son éloquence fait qu’on l’écoute. Il a du verbe et de la verve, il est très vindicatif. "La guerre, rien que la guerre", a martelé en substance Clemenceau... Façon pour lui d’écarter de sa route les pacifistes qu’il déteste... Retenons cette phrase, assénée comme une sentence : "Les fautes sont commises par celles et ceux qui pensent que la paix peut être immédiate, sans victoire." En fait, le nouveau président du Conseil est bien résolu à mener sans faillir le pays jusqu’à la victoire finale... On l’a ressenti, dans ce discours d’investiture, avec beaucoup d’énergie, beaucoup de volontarisme.

Clemenceau a également rendu hommage aux troupes de la Nation : il a évoqué "les grands soldats d’une grande histoire". Et au final il a été très applaudi, à plusieurs reprises, et notamment lorsqu’il a déclaré : "Tout pour la France saignante dans sa gloire, tout pour l’apothéose du droit triomphant." Ainsi Clemenceau vient-il d’apporter un cinglant démenti à tous ceux qui pensaient que son heure était passée, depuis la chute de son gouvernement il y a huit ans. Il se présente aujourd’hui comme l’ultime recours, le sauveur de la patrie en danger.

Au moment du vote, nous étions quand même loin de l’unanimité à la Chambre…

Ils sont en effet 64 socialistes sur 96, c’est-à-dire les deux tiers des députés, à avoir voté contre Clemenceau lors de son investiture. On ne peut vraiment plus parler d’Union sacrée... Un autre signe révélateur de cette scission politique, c’est l’absence des socialistes au gouvernement. Il semble que  Clemenceau ait souhaité leur présence mais qu’eux ne l’aient pas voulu. Ils figurent ainsi parmi les abstentionnistes et sont venus grossir les rangs des opposants... Si, pour certains, Clemenceau peut ainsi apparaître comme l’homme providentiel, il ne l’est certainement pas aux yeux des socialistes.

Cette nomination est tout de même une surprise... On sait que le président Poincaré et Clemenceau ne s’apprécient pas. Cela signifie-t-il donc que Clemenceau est vraiment en position de force ?

Cette nomination est en tout cas le signe que Poincaré était dans une impasse, qu’il n’avait pas d’autre choix que de nommer Clemenceau, car c’est de notoriété publique, les deux hommes se détestent cordialement.

Clemenceau s’est en tout cas assuré d’avoir les coudées franches : il a nommé des ministres radicaux, des amis personnels, des gens qui sont soit acquis à sa cause, soit très effacés... En résumé, pas de personnalités de premier plan, ce qui lui permettra de prendre librement des décisions importantes. Le président du Conseil a écarté de sa route tous ceux dont il se méfie, notamment un grand nombre de hauts fonctionnaires en qui il n’a pas confiance...

Clemenceau s’est gardé le ministère de la Guerre, conservant ainsi la main sur les militaires... Certaines sources laissent d’ailleurs entendre qu’il pourrait même se rendre prochainement sur le front. En fait, il gouverne avec un tout petit nombre de collaborateurs, des proches, surtout ses chefs de cabinet civil et militaire, Georges Mandel et le général Jean Mordacq... Et on s’interroge sur la façon dont il va gouverner à l’avenir avec le président Poincaré, sur ses relations aussi avec le Parlement... Bref, beaucoup de questions demeurent encore en suspens…

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