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"Après, vous avez le dégoût de vous-même" : une entreprise condamnée pour n'avoir pas donné assez de travail à un salarié

Une entreprise vient d'être condamnée à 50 000 euros d'amende pour harcèlement moral. On lui reproche de ne pas avoir donné suffisamment de travail à l'un de ses salariés.

Article rédigé par franceinfo, Philippe Duport
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le conseil de prud'hommes de Paris. (GARO / PHANIE)

La justice vient de rendre un premier jugement particulièrement attendu dans une affaire de "bore-out", d'ennui au travail. Ainsi, pour n'avoir pas avoir donné suffisamment de travail à l'un de ses salariés, une entreprise a été condamnée pour harcèlement moral.

"Après, vous avez le dégoût de vous même"

Dans cette affaire qu'a eu à connaître le conseil des prud'hommes de Paris, un salarié, Frédéric Desnard, l'homme à tout faire de l'entreprise, s'oppose à son ancien employeur, Interparfums. De la réparation d'une lampe à l'organisation de voyages professionnels, en passant par la supervision de certains contrats, Frédéric ne manque pas d'occupation. Mais après la perte d'un gros client, on ne lui donne plus grand chose à faire. Pendant quatre ans, il sera être mis au placard. Au point que son temps de travail est réduit au plus strict minimum : "Dix minutes, vingt minutes : c'était atroce parce qu'après vous avez le dégoût de vous-même, vous ne pouvez pas imaginer qu'on puisse vous payer à ne rien faire et donc vous avez des idées de suicide très régulières".

Une pratique de mise à l'écart

Frédéric Desnard ne passera pas à l'acte mais fera une crise d'épilepsie au volant, provoquant un accident. Et attaquera son employeur. Le juge vient donc de condamner Interparfums pour harcèlement moral, pointant "une pratique de mise à l'écart". Frédéric Desnard a été maintenu dans une relation de travail "sans se voir confier de réelles tâches correspondant à sa qualification", et s'est vu, selon la juridiction prud'homale, "attribuer des tâches subalternes". Et ses conditions de travail se sont dégradées.

C'est donc une condamnation pour mise au placard. Le juge prud'hommal n'a pas explicitement parlé de bore-out, ce syndrome d'ennui au travail, qui n'est, pas plus que le burn-out, reconnu comme maladie professionnelle : "Cela ouvre l'opportunité à l'État, à la Sécurité sociale, à tous les organismes, de pouvoir réfléchir à la reconnaissance du burn-out et du bore-out dans les prochaines années, espère Frédéric Desnard. Parce que de toutes façons, c'est une lame de fond qui va se déployer, on sera obligé de reconnaître ce phénomène. La seule question est : quand ?"

Le juge a donc condamné Interparfums à verser 50 000 euros à son ancien employé. Mais les deux parties, l'employeur et l'ex-salarié ont décidé de faire appel.
Frédéric Desnard, épileptique, qui ne peut plus travailler depuis quatre ans, parce qu'il estime que 50 000 euros, n'est pas, dit-il, "le prix d'une vie humaine".

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