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Mémoires en péril

Bilal et Zep se demandent si nous ne sommes pas en train de perdre la mémoire. Chacun de son côté, les deux auteurs de BD en font le sujet de leurs nouveaux livres. C'est bien sûr de la science-fiction, mais pas seulement.

Article rédigé par Jean-Christophe Ogier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
On oublie si vite ! (ENKI BILAL, CASTERMAN / ZEP, RUE DE SEVRES)

Soudain, à la page 32 du tome 3 de BUG, la tsarine et le héros discutent de part et d’autre d’une table de 7 m de long. L’image a été dessinée il y a près d’un an. C’est exactement la photo de Vladimir Poutine recevant ses hôtes au Kremlin, il y a quelques semaines, avant l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe.

Les prémonitions de Bilal

Dans BUG, Bilal nous parle d’un monde dont la mémoire numérique, la seule qui nous restera bientôt, a été complètement effacée. Les premiers épisodes prenaient acte des bouleversements que nous avons connus depuis la chute du mur de Berlin et celle des tours à New-York, qu’il avait aussi dessinées avant qu’elles ne se produisent.

Le nouvel opus de BUG s’ouvre sur les portraits d’Hitler et Staline. Comme si nous avions un peu vite refermé le XXe siècle.

"Quand on est privé de tout, la parole des vieux, certains vieux livres ou de vieilles idéologies ressurgissent. BUG et le retour de l’histoire, c’est une façon de dire : ne sacrifions pas ce que nous avons de plus précieux, c’est-à-dire notre mémoire."

Enki Bilal

à franceinfo

BUG, trois volumes parus sur cinq, aux éditions Casterman.

L’homme augmenté, reconstruit, immortel, mais bien fragile, c’est encore Bilal avec l’exposition que lui consacre à Paris le musée de l’Homme, dans son cycle Aux frontières de l’humain, jusqu’à la mi-juin.

L'amer constat de Zep

Zep ne dit pas autre chose dans Ce que nous sommes, sa nouvelle bande dessinée d’anticipation réaliste. Son propos tient en une formule : on voulait faire un humain augmenté, on a créé l’humain assisté.

Ses personnages, jeunes gens privilégiés, sont nés avec un second cerveau, numérique, capable de stocker toutes les connaissances. Il suffit de trois minutes pour assimiler douze langues et de quelques secondes à peine pour se transformer en encyclopédie. Jusqu’au jour où…

"L’humain augmenté, c’est un humain paresseux. Si tout à coup, quelqu’un appuie sur le bouton off, on est perdu. Si vous m’enlevez mon téléphone, je n’ai plus les contacts de mes amis, je ne sais plus comment m’orienter dans une ville. Mon cerveau ne fait plus l’effort de stocker ces informations."

Zep

à franceinfo

Ce que nous sommes, de Zep, aux éditions Rue de Sèvres.  

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