Auteurs en exil : Can Dündar et Roberto Saviano
Pendant que le monde entier regarde du côté de la Russie de Poutine, une des bandes dessinées du moment nous montre comment un autre autocrate est parvenu au sommet dans son pays. "Erdogan, le nouveau sultan" est raconté par un journlaise turc en exil.
Pour brosser le portrait de Recep Tayyip Erdogan, qui préside la Turquie depuis huit ans, après en avoir été le Premier ministre entre 2003 et 2014, le journaliste Can Dündar, condamné à l’exil pour avoir osé dénoncer le pouvoir, a décidé de rester le plus objectif possible. De s’en tenir aux faits, sans donner son avis, malgré les 27 années de prison qui l’attendent, s’il rentre chez lui.
Pour l'amour du foot et au nom d'Allah
Mise en images par le dessinateur égypto-soudanais Mohamed Anwar, Erdogan, le nouveau sultan, revient, étape par étape, sur le parcours de l’enfant né dans une famille pauvre d’Istanbul. Très pieux dès son plus jeune âge, le petit Recep Tayyip est également fan de foot. Il jouera à un bon niveau, sans jamais parvenir à en faire son métier. La politique le gagne. Dans un pays où l’armée intervient régulièrement pour défendre l’ordre et garantir la laïcité, Erdogan n’aura de cesse d’imposer l’islam politique à ses concitoyens.
La BD choisit le registre de l’image d’Epinal, en noir et blanc, pour décrire un travailleur infatigable, fin tacticien, rusé et menteur, un dur au mal qui n’a jamais oublié les raclées que lui donnait son père, à la moindre bêtise. Le livre s’arrête au moment où, à 47 ans, il crée l’AKP, le parti de la justice et du développement qui va le conduire au sommet.
Erdogan, le nouveau sultan, aux éditions Delcourt.
Dans le viseur de la mafia
L’italien Roberto Saviano partage avec son confrère turc la sinistre condition de vivre caché pour avoir dit la vérité. Saviano est en permanence protégé par la police. Son tort : avoir dénoncé la mafia napolitaine, et lancé en place publique le nom de ceux qui font régner la terreur et tirent les ficelles du crime organisé.
Dans Je suis toujours vivant, l’auteur de Gomorra nous invite rien moins qu’à entrer dans sa tête. Pour tenter de nous faire partager ses frustrations et l’absurdité du quotidien d’un homme traqué. Pour ça, il peut compter sur le talent de l’israélien Asaf Hanuka, dont le dessin glacé, souvent métaphorique, renforce l’ironie douloureuse du propos.
Je suis toujours vivant, une coédition Gallimard / Steinkis.
Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Lætitia de Germon de la rédaction de franceinfo.fr. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Lætitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.
Histoire de l'empereur Akihito, par Issei Eifuku (scénario), Usamaru Furuya (dessin), chez Vega-Dupuis
Prince et fils de l’empereur Hirohito, l’empereur Akihito a grandi en temps de guerre, et a traversé la période de paix en tant que symbole. Il a abdiqué le 30 avril 2019, après avoir évoqué des ennuis de santé. Il a régné pendant 30 ans et 3 mois.
C'est la dixième plus longue durée de souveraineté de tous les empereurs japonais depuis le VIe siècle. Aux côtés de sa compagne l’impératrice Michiko, il a honoré la paix instaurée par la Constitution, et il a souhaité incarner une cour impériale ouverte au peuple, en se plaçant toujours du côté des sans-voix.
Cette biographie met en avant le côté humain de l'empereur
On découvre l'enfance du futur empereur, ce qui a forgé son caractère, la relation qu'il entretient avec sa femme, et ce qui a fait de lui une personnalité attachante et moderne. Ses décisions. À travers l'histoire de l'empereur Akihito on découvre le fonctionnement de la monarchie parlementaire japonaise, la place et le poids de l'institution impériale.
Passionnant, ce manga très réaliste met en avant les émotions, mais aussi les paysages, la guerre (Pearl Harbor, la fin du Yamato) en s’inspirant d'images célèbres. On croise également plusieurs personnalités, notamment la reine Elizabeth II et le président Eisenhower.
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