Le Sénat vote contre l'interdiction des emplois familiaux pour les parlementaires
La mesure pourra toutefois être réintroduite dans le projet de loi de moralisation de la vie politique par l'Assemblée nationale.
C'est une opposition qui n'aura sans doute pas de conséquences, mais le symbole risque de faire parler : le Sénat a voté, dans la nuit du mardi 11 au mercredi 12 juillet, contre l'interdiction pour les parlementaires d'employer des membres de leur famille, une des mesures phares du projet de loi de moralisation de la vie politique.
Elle devrait, sauf surprise, être réintroduite lors de l'examen du texte par les députés, et peut-être même plus tôt : Philippe Bas, le président Les Républicains de la commission des Lois du Sénat, a demandé un nouveau vote sur cette mesure. "Le vote intervenu cette nuit est un vote accidentel par rapport aux décisions prises par les groupes politiques", estime-t-il.
C'est Jacques-Yves Collombat, un sénateur du groupe RDSE composé majoritairement de radicaux de gauche, qui a déposé un amendement de retrait de la mesure, contre l'avis du gouvernement et de la commission des Lois. Celui-ci a été adopté lors d'un vote à main levée, alors qu'une quarantaine des 348 sénateurs étaient présents.
Il estime que l'interdiction des emplois familiaux est "discriminante", que ses effets sont "hypothétiques" et qu'elle "n'offre pas une solution satisfaisante" pour rétablir la confiance des citoyens dans l'action publique, objectif déclaré de ce projet de loi. Pour lui, "la priorité est plutôt de s'assurer que les moyens alloués aux parlementaires pour rémunérer leurs collaborateurs soient utilisés à rémunérer des personnes qui assistent effectivement les parlementaires dans leurs fonctions".
"Abattre le troupeau à cause de brebis galeuses"
"Ce n'est pas le fait d'employer des membres de sa famille qui est blâmable, c'est de le faire de manière fictive", a appuyé le sénateur PS Maurice Antiste. Plusieurs sénateurs ont plaidé pour un meilleur encadrement de ces emplois plutôt que leur interdiction. "Au lieu d'abattre le troupeau à cause de quelques brebis galeuses, instituons un véritable contrôle", a notamment estimé le centriste Hervé Maurey. Un amendement précisant le cadre juridique d'emploi des collaborateurs parlementaires a d'ailleurs été adopté à l'unanimité.
La socialiste Catherine Tasca a également mis en avant un autre argument pour son refus de cette mesure : le fait que celle-ci soit clairement inspirée par l'actualité récente. "Nous critiquons depuis des années la tentation de légiférer d'après des faits divers. Là, nous avons un texte tiré de l'affaire des emplois de la famille Fillon", a-t-elle lancé.
Le projet de loi présenté le 1er juin par François Bayrou, alors ministre de la Justice, prévoit d'interdire aux parlementaires, mais aussi aux ministres et aux élus locaux disposant d'un cabinet, d'embaucher des ascendants, des descendants ou des conjoints. Le texte doit aussi obliger un parlementaire à divulguer l'embauche d'un membre de la famille d'un autre parlementaire dans le cadre de sa déclaration d'intérêts, pour éviter les "emplois croisés".
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