La "prime exceptionnelle" pour les petites retraites ne convainc ni les associations, ni les syndicats
Lors de sa déclaration de politique générale, mardi, le Premier ministre, Manuel Valls, a annoncé un coup de pouce de 40 euros pour les petites retraites. Mais ce geste est critiqué.
Ils ne sont pas convaincus. La "prime exceptionnelle" de 40 euros pour les retraites inférieures à 1 200 euros par mois annoncée mardi 16 septembre par le Premier ministre pour compenser la non-revalorisation des retraites prévue le 1er octobre est accueillie avec scepticisme et circonspection par les organisations syndicales et les associations de retraités.
Francetv info vous explique pourquoi la prime de Manuel Valls ne leur convient pas.
Son montant est jugé trop faible
Premier reproche, la faiblesse du montant et son caractère ponctuel. "40 euros, cela ne fera pas un gros bol d'oxygène, (...) je ne vois pas comment cela va mettre du beurre dans les épinards", déplore François Thiery-Cherrier, secrétaire général de l'Union confédérale des retraités, la branche retraite du syndicat CGT. Du côté de la Fédération nationale des associations de retraités (Fnar), Sylvain Denis observe que cette "mesurette" ne permettra pas de régler les frais fixes. "Les retraités ont des dépenses contraintes (comme l'électricité, par exemple) qui augmentent plus que l'inflation. Cette prime ne permettra pas de régler la facture de fioul", explique le délégué du président.
Satisfait que le gouvernement ait fait un geste, Jean-Louis Malys, responsable retraite à la CFDT, est partagé. "C'est plutôt satisfaisant, mais on sait bien que cela ne va pas changer la vie des retraités. C'est une mesure utile, mais insuffisante", explique-t-il, citant l'exemple de l'ASPA (Allocation de solidarité aux personnes âgées, parfois appelée minimum vieillesse) revalorisé de 96 euros en 2014.
Surtout, les représentants des retraités rappellent que les pensions n'ont pas augmenté depuis le 1er avril 2013. Et qu'elles ne le seront probablement pas avant le 1er octobre 2015, la date légale d'une éventuelle revalorisation. "Pour ces personnes qui vont toucher 40 euros, ce n'est pas rien, certains comptent à l'euro près. Mais c'est une seule fois. Et si vous étalez cela sur la période de référence de 30 mois, cela ne fait que 1,33 euro par mois", constate Philippe Pihet, responsable des retraites au syndicat Force ouvrière. D'autres redoutent les effets de seuil. "Cette prime crée une discrimination. Je me mets à la place du retraité qui touche 1 210 euros", rappelle François Thiery-Cherrier.
Elle a été décidée sans concertation
La manière dont ce coup de pouce a été annoncé, dans la précipitation et sans concertation, leur pose également problème. "En ce qui concerne la revalorisation des retraites, il aurait fallu expliquer les choses dès le départ, regrette Roger Barrot, président de la Fnar. Là, on n'explique pas les choses, on pare au plus pressé pour essayer de faire face à la vindicte."
Dans cette affaire, "le degré de concertation avec les organisations syndicales, c'est zéro absolu. Jean-Marie Le Guen [secrétaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement] a lancé le ballon le dimanche et on a eu l'information hier", lâche Philippe Pihet. Un autre syndicaliste se demande même si le ministère des Affaires sociales était au courant de l'annonce. "Cela ressemble à un arbitrage de dernière minute", glisse-t-il.
Ses contours sont flous
Le flou qui entoure les modalités de cette prime inquiète également les représentants des retraités. "Les choses ne sont pas très claires, on ne sait pas quand ce sera appliqué et si ce sera du brut ou du net", observe Roger Barrot, président de la Fnar. Son délégué, Sylvain Denis, se demande "comment ils vont trouver les gars qui ont moins de 1 200 euros de retraite". "Est-ce qu'un couple dont les deux membres touchent 1 200 euros est concerné ? Est-ce que c'est calculé avec le seul régime général ou avec les complémentaires ?" s'interroge-t-il, observant que seul le fisc dispose de l'ensemble des informations pour les retraités qui bénéficient de plusieurs régimes.
A la CGT, François Thiery-Cherrier est tout aussi circonspect. "Par quel tour de passe-passe va-t-il savoir qui gagne moins de 1 200 euros ? C'est un peu compliqué, son affaire", observe le responsable syndical. Comme les autres syndicalistes et responsables associatifs interrogés, François Thiery-Cherrier aurait préféré une revalorisation générale. "Là, c'est une mesurette, de l'enfumage", regrette-t-il. "Le Premier ministre a annoncé qu'il ne faisait pas une politique d'austérité parce qu'il s'occupait des plus vulnérables, rappelle Philippe Pihet. Mais là, on est au niveau du symbole."
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