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Les mystérieux deniers de Jérôme Cahuzac

L'ancien ministre a avoué détenir environ 600 000 euros sur un compte à l'étranger. Les questions se multiplient sur l'origine d'une telle somme.

Article rédigé par Lorraine Kihl
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Jérôme Cahuzac pose dans son bureau au ministère des Finances alors qu'il a été nommé quelques jours plut tôt ministre du Budget, le 29 mai 2012 à Paris. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

Six cents mille euros. C'est la somme que Jérôme Cahuzac a affirmé détenir, mardi 2 avril, sur un compte à l'étranger "qui n'a pas été abondé depuis une douzaine d'années". Mais les aveux de l'ancien ministre du Budget, qui a été mis en examen mardi pour blanchiment de fraude fiscale, sont pour le moins elliptiques. Retour sur ce que l'on sait et ce que l'on ignore de l'argent caché de Jérôme Cahuzac.

Plusieurs comptes à l'étranger ?

Un compte ? Le Canard enchaîné pointe mercredi que selon l'enquête, Jérôme Cahuzac en aurait détenu deux en Suisse : un premier chez UBS, dès le début des années 1990, fermé puis transféré vers un deuxième au sein d'une banque plus discrète, Reyl et Cie, fin 2000. L'enregistrement révélé par Médiapart (contenu payant) et à l'origine de l'affaire date de cette époque. Ce deuxième compte aurait été lui aussi transféré : Jérôme Cahuzac serait toujours titulaire d'un troisième compte "offshore" à Singapour, sur lequel il aurait viré l'ensemble de ses avoirs suisses en 2010, alors qu'il était nommé à la présidence de la commission des Finances de l'Assemblée. 

Des soupçons de conflits d'intérêts

L'hebdomadaire satirique s'interroge aussi sur les rapports de Jérôme Cahuzac avec l'industrie pharmaceutique, soulignant qu'il a "par deux fois été en situation de rendre d'éminents services" aux "généreux laboratoires pharmaceutiques".

L'ancien ministre a alterné au cours des années 1990 fonctions publiques dans le domaine de la santé ou politiques et contrats de consultant auprès de laboratoires, raconte Le Parisien, ce "qui peut poser la question d'éventuels conflits d'intérêts". De 1988 à 1991, il est membre du cabinet du ministre de la Santé, plus particulièrement chargé de la politique du médicament. Deux ans plus tard, il fonde une clinique de chirurgie esthétique avec sa femme et crée parallèlement une petite société spécialisée dans le conseil aux entreprises, essentiellement des laboratoires pharmaceutiques. Cette seule activité de conseil aurait généré 150 000 euros de bénéfices dès les premières années, estime le quotidien.

En 1997, Jérôme Cahuzac est élu député dans le Lot-et-Garonne et devient rapporteur spécial du budget de la Santé à l'Assemblée nationale. Sa société de  conseil n'est pas dissoute pour autant, rappelle Le Parisien. Là encore, la question de possibles conflits d'intêrets se pose. 

Des interrogations sur une éventuelle corruption

Le Parisien s'interroge en outre sur les relations de Jérôme Cahuzac avec le groupe pharmaceutique Pfizer, avec lequel il est en contrat dès l'ouverture de sa société de conseil, ainsi que sur deux factures d'un montant global de 250 000 francs (plus de 38 000 euros) qui apparaissent dans les comptes de sa société alors qu'il était député et dont on ignore qui les a payées.

Médiapart s'inquiète pour sa part de la date d'ouverture du premier compte suisse. Selon le journaliste Fabrice Arfi (article payant), il serait "très embarrassant" que celle-ci ait eu lieu entre 1988 et 1991, époque où Jérôme Cahuzac était conseiller du ministre de la Santé Claude Evin. Et le journaliste de s'interroger : "Des labos pharmaceutiques ont-ils monnayé à cette période certaines faveurs ministérielles via Jérôme Cahuzac ? En d'autres termes, M. Cahuzac a-t-il menti, pour lui-même ou pour d’autres ?"

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