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Un selfie ou la vie ? Que cette photo ne soit pas la dernière !

La dernière mode en matière de photo est de se prendre avec son smartphone. On figure au premier plan dos au paysage ou monument qu’on veut montrer. Il est communément admis de poster ses œuvres sur les réseaux sociaux. Certains n’hésitant pas à se mettre en scène dans des situations très périlleuses, les autorités de plusieurs pays réagissent. Géopolis fait un tour d’horizon.
Article rédigé par Frédérique Harrus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Moscou (Russie), le 20 août 2014. Homme se prenant en selfie au sommet d'un immeuble avec le drapeau ukrainien et une étoile soviétique repeinte aux couleurs de l'Ukraine. (reuters)

Dans notre époque hyper technologique, il est possible de repérer à quelle génération vous appartenez à la façon dont vous prenez des photos. Jusqu’à un certain âge, on met son œil dans le viseur. Les suivants ont encore un appareil photo, fut-il numérique. L’avant-dernière génération mitraille tout ce qu’elle peut avec son smartphone. La dernière, quand à elle, toujours armée d’un smartphone, se prend en photo avec ce qu’il y a à voir, monuments, paysages, derrière elle. Le photographe est au premier plan de ce qu’il y a à  voir. Le but est de poster la photo prise sur les réseaux sociaux et (accessoirement) d'épater la galerie. On parle alors de selfie.

Sauf que cette nouvelle manie amène ces personnes à se mettre dans des positions suffisamment périlleuses pour que les autorités s’inquiètent et que les campagnes anti-selfies se multiplient. Pour ne citer qu’un exemple qui a frappé les esprits, rappelons le cas de ce couple, en août 2014, qui à force de reculer pour montrer l’à-pic d’une falaise au Portugal, en est tombé sous les yeux de leurs enfants.

La campagne de Russie...
Le ministère de l’Intérieur russe l’a bien compris. Depuis le début de l’année 2015, les autorités déplorent plus d’une douzaine d’accidents mortels et plus d’une centaine de blessés. A l’image de cette jeune femme qui s’est «à moitié tuée» en voulant prendre un selfie avec un revolver. Elle a déclenché d'un coup d'index… (et elle n'est pas le seul cas!). Dans le même genre, dans l’Oural, de jeunes hommes ont eu la «bonne idée» de se prendre en photo avec des grenades à la main. Les autorités ont donc décidé de réagir. Le ministère a donc lancé une campagne intitulée «Un selfie cool pourrait vous coûter la vie» et il distribue des dépliants un peu partout. Sur un mode humoristique – mais pas tant que ça –, la police russe répertorie différentes situations qui peuvent se révéler extrêmement dangereuses pour se prendre en selfie.

Campagne russe contre les selfies. Ensemble des pictogrammes stigmatisant la prise de certains selfies.


Le phénomène étant générationnel et non géographique, les campagnes de prévention contre les selfies se multiplient un peu partout. Sachant que quand on dit selfie, on dit aussi réseaux sociaux.

Le constructeur automobile Ford a même mené une enquête sur la distraction au volant. Une enquête sur toute l’Europe auprès de 7000 jeunes de 18 à 24 ans. Il en ressort plusieurs chiffres particulièrement inquiétants. Au moins un jeune sur quatre a déjà publié ou consulté les réseaux sociaux en conduisant. Les conducteurs britanniques sont ceux prenant le plus de selfie (33%), suivis par les Allemands et les Français (28%). Ceux qui utilisent le plus les réseaux sociaux en conduisant sont les Allemands (35%), devant les Britanniques (32%), les Belges (26%). Selon Ford, prendre un selfie au volant peut réduire l’attention pendant 14 secondes. L’inattention peut monter à 20 secondes quand on est en train de consulter les réseaux sociaux. Suffisamment longtemps pour qu’à 100 km/h, on puisse parcourir près de 500 mètres, sans regarder la route !  


Des photos trop «perchées»
Dernier accessoire en date pour un bon selfie, et avoir plus de monde ou de paysage dans le cadre grâce au recul, la perche à selfie. Là encore, l’exagération fait monter l’exaspération. Les perches à selfie commencent à être interdites dans différents endroits, le premier d’entre eux ayant été le château de Versailles, comme le détaille cette vidéo d'Antoine Marguet pour Culture Box.


Pendant que d’autres musées se posent encore la question, Disney a emboîté le pas au Château de Versailles et interdit aussi ces perches dans ses parcs de loisirs.
 
Ces perches, qui peuvent atteindre jusqu’à 1,50 mètre, occasionnent de nombreux dégâts et sont brocardées par cette vidéo américaine de la marque Pizza Hut sur un mode tout à fait comique.


Cette manie de vouloir mettre sa vie sur les réseaux sociaux au mépris du danger, voire du simple bon sens, génère des comportements totalement désadaptés aux conséquences ahurissantes, quand elles ne sont pas fatales. Comme ce jeune homme qui, se retrouvant face à un serpent hautement venimeux, a préféré tenter de se prendre en photo avec l'animal, plutôt que de fuir. Mal lui en a pris, puisqu'il a été mordu et sévèrement blessé. Il a failli y laisser son bras et la vie, mais y a certainement laissé son compte en banque avec une facture d'hôpital de 153.000 dollars (138.000 euros).
 


Les autorités de beaucoup de pays tentent de cadrer ce qui est à la fois un phénomène générationnel et de mode. Très souvent sur un ton humoristique, pour rester en phase avec le public auquel elles s’adressent. Cette tendance très égocentrée (et pas qu'en photo) va-t-elle se maintenir, se renforcer ou au contraire disparaître ? Seul l'avenir nous le dira.
 

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