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Retrait surprise russe de la Syrie : Vladimir Poutine aurait-il lâché Assad?

Le retrait d’une partie de l’armée russe de Syrie a surpris tout le monde. Officiellement, toutes les parties sont satisfaites : rébellion, groupes jihadistes, forces gouvernementales et l’Onu. Al Qaida annonce une offensive. Qu’en est-il réellement ?
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Vladimir Poutine a reçu Bachar al-Assad le mardi 20 octobre 2015 à Moscou. (ALEXEY DRUZHININ / RIA NOVOSTI / AFP)

Vladimir Poutine cultive l’image d’un joueur d’échecs avec toujours un coup d’avance sur ses adversaires. Comme tout stratège, il avance par surprise ses pions, au risque de dérouter alliés et ennemis. Le président russe a annoncé le retrait d’une grande partie de son armée positionnée en Syrie, provoquant un déluge de bonnes réactions de toutes les parties. Damas laisse entendre que la décision a été prise de concert avec le président Bachar al-Assad, l’opposition non jihadiste réunie à Genève jubile, l’ONU exprime sa satisfaction et la branche syrienne d’Al Qaida (Front al-Nosra) y voit même une victoire. Une unanimité à scruter avec précaution.
 
L’œil de Moscou. Pour la presse russe, c’est mission (presque) terminée : les jihadistes (Front al-Nosra et Etat islamique) sont en déroute, l’armée gouvernementale a repris les «territoires utiles» et –point important-Vladimir Poutine a réussi à remettre son pays au centre des négociations sur le Moyen-Orient.
 
La défaite imaginaire d’Al Qaida. Les djihadistes du Front al-Nosra vont lancer une offensive dans les 48 heures en Syrie. «Il est clair que la Russie a subi une défaite», affirme, sans rire, un commandant de ce groupe à l’AFP. Sur le terrain, Front al-Nosra a perdu de nombreux secteurs dans la province de  Lattaquié (ouest) ainsi qu'une grande partie de la province d'Alep (nord) à cause des frappes russes.

 

Le président syrien Bachar al-Assad et son chef de la Diplomatie Walid al-Moallem recevant l'émissaire du secrétaire général de l'ONU, Staffan de Mistura, le 11 février 2015 à Damas pour étudier les possibilités de «geler» les affrontements dans le pays. (AFP PHOTO / HO / SYRIAN PRESIDENCY FACEBOOK PAGE" )


Lueur d’espoir pour l’ONU. «Maintenant, pour la première fois, il y a l'espoir d'une fin en vue», a déclaré à Genève le président de la Commission d'enquête de l'ONU pour la Syrie, Paulo Pinheiro. Ses propos interviennent au lendemain de l'annonce par Vladimir Poutine du retrait de la majeure partie du contingent militaire déployé en Syrie et dont les raids aériens ont permis à l'armée  syrienne de reprendre l'avantage sur le terrain.
 
Genève en fête. L'opposition syrienne non jihadiste estime que la décision de Vladimir Poutine Syrie est de nature à ouvrir à la voie à un règlement du conflit même si Moscou, a-t-elle fait savoir, ne l'a pas officiellement informée de ce retrait partiel. La trêve, initiée par Washington et Moscou le 27 février, avait créé les conditions  nécessaires pour les pourparlers qui ont démarré lundi 14 mars 2016 à Genève. Cet accord est sans précédent entre régime et rebelles. Il concerne seulement les zones de combat entre forces du régime et forces rebelles. Il exclut les jihadistes de l'Etat  Islamique (EI) et du front Al-Nosra, qui contrôlent plus de 50% du territoire syrien.

  (AFP PHOTO / RIA NOVOSTI / KREMLIN POOL / ALEXEY DRUZHININ)


Quid de l’avenir du président Bachar al-Assad ? Le sort réservé au président syrien risque de faire capoter le processus de paix. La délégation officielle à Genève refuse toute évocation de l’avenir de Bachar al-Assad, l’opposition ne voit aucune solution avec son maintien au pouvoir. Il est trop tôt pour parler de la position russe sur le sort de l’actuel président syrien et de ses proches. Un journal libanais, Al Joumhouria (lien en arabe), avait déjà évoqué un scénario avalisé par Moscou, Washington et Ryad : l’exfiltration de Bachar al-Assad et de ses proches de Damas et l’installation d’un gouvernement d’union nationale pour gérer la transition. C’était il y a près de six mois. Vladimir Poutine est-il prêt à lâcher son protéger au nom des intérêts de la Russie ?
 

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