: Reportage "Ce n’est pas une vie" : en Cisjordanie, le désespoir dans un camp de réfugiés palestiniens visé par des raids israéliens
Dans les ruelles étroites du camp de réfugiés de Balata, à Naplouse, en Cisjordanie, les murs sont recouverts de portraits de jeunes "morts en martyrs". Partout, on aperçoit des impacts de balles, des routes et des magasins détruits.
Abu Ali l’assure : ici, l’armée israélienne vient presque toutes les nuits : "Ils utilisent même des drones ici, et pas des drones de surveillance. Vous voyez ce bâtiment, celui où il reste qu’un étage ? Il a été démoli par l’armée, mais ils ont aussi tiré juste devant avec un drone. Cinq personnes ont été tuées sur le coup".
"Nous n’en pouvons plus, nous espérons qu’un jour on nous laissera en paix. Mon message à Netanyahou ? 'Ca suffit, arrête avec cette guerre et laisse les gens vivre'."
Abu Ali, habitant du camp de réfugiés de Balataà franceinfo
Alors que les combats entre Israël et le Hamas se poursuivent à Gaza, un autre conflit plus larvé et permanent est en cours en Cisjordanie occupée. Comme à Jénine et Tulkarem, les trois camps de réfugiés de Naplouse voient les blindés et les snipers de l’armée israélienne quasi quotidiennement. Les autorités israéliennes parlent "d’opérations antiterroristes" ou "d’arrestations de combattants". Mais pour les habitants palestiniens, ce sont des nuits meurtrières de plus.
Assise sur un muret du camp de Balata, Zohdiye, 85 ans, keffieh sur la tête et canne à la main, prend la parole. Elle vit dans ce camp depuis qu’elle est devenue réfugiée, en 1948, après avoir été chassée d’Haifa avec sa famille. "Nous vivions comme une seule famille, nous vivions des jours bien meilleurs qu’en ce moment. Je vous l’assure, parfois je pleure pour revenir à cette époque", se désole-t-elle.
"Les gens n'achètent pas"
Alors quand on lui demande de nous décrire la vie, dans le camp de Balata en ce moment, l'octogénaire répond immédiatement. "La vie ? Mais laquelle ? Cette nuit encore je n’ai pas dormi. Je n’ai pu fermer les yeux qu’une fois que l’armée était partie et que mes petits enfants étaient à l’école. Il y avait encore des tirs, toute la nuit, devant la porte de ma maison. Ça, ce n’est pas une vie."
Zohdiye commence à parler de Gaza, marque une pause, puis s’effondre. Dans ce camp, Il y a ces incursions quasi quotidiennes de l’armée israélienne. Il y a aussi la situation économique qui pèse sur le moral des habitants. "Nous n’avons jamais vu ça", explique un vendeur de fruits et légumes. "Personne n’achète : il n’y a pas d’argent, personne n’a les moyens. On a bien des légumes, vous voyez, mais les gens ne les achètent pas".
"Avant, nous avions des clients qui prenaient trois kilos de tomates, maintenant ils ne prennent plus qu’un kilo, ou un demi. Car il n’y a plus de travail nulle part, ni ici, ni hors du camp."
Un vendeur de fruits et légumesà franceinfo
La situation des fonctionnaires palestiniens n'est guère plus enviable. Les agents de l'État ne sont pas payés alors que depuis le début de la guerre, personne n’a touché son salaire.
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