Reportage Cisjordanie : face à la recrudescence des attaques de colons, des Israéliens viennent "montrer" leur "solidarité avec les Palestiniens"

"Ça, ce sont les colons. Ils sont là pour détruire la terre de la Palestine. Elle est pleine d'arbres, d'amandiers, d'oliviers. Tout ça est détruit maintenant". Sana, une habitante du village d'At-Tuwani, au sud d'Hébron, décrit la situation en Cisjordanie tout en regardant une pelleteuse en action dans un champ, juste en face d'elle, à flanc de colline. Les attaques de colons israéliens contre la population palestinienne étaient déjà nombreuses, mais elles se sont intensifiées depuis le 7 octobre et l'attaque du Hamas contre Israël. Et en Cisjordanie, la situation est de plus en plus explosive. 

À At-Tuwani, les Palestiniens peuvent compter sur des volontaires israéliens pour les protéger face aux colons. Un petit groupe de militants pro-palestiniens s’est par exemple approché du champ où se trouve Sana. Il y a des Israéliens, une Mexicaine et un Irlandais. Dans ce groupe, il y a notamment Mike, avec un tee-shirt "Free Palestine", autrement dit "la Palestine libre". "Nous sommes venus pour essayer de faire tout notre possible pour montrer notre solidarité avec les Palestiniens, pour les soutenir, pour essayer de documenter ce qui se passe", assure-t-il. 

Michelle, une habitante de Tel-Aviv, a justement filmé un incident avec son téléphone portable. Sur cette vidéo, une personne dit "ne tirez pas, ne tirez pas". Une autre personne répond : "Vous avez perdu la tête. Partez d’ici, vous êtes devenus fous, vous êtes venus pour protéger les Palestiniens. Vous êtes stupides. Après 1 400 morts, vous ne voulez pas comprendre ? Dégagez, dégagez vite". Michelle se présente comme une résistante aux colons. "Je ne veux pas les appeler mes compatriotes, assure-t-elle. Ce n'est pas mon peuple qui fait ce genre de choses. Ce qu'ils veulent, c'est chasser les Palestiniens là où ils veulent qu'ils aillent. Ils veulent juste qu'ils disparaissent de leur champ de vision. Moi, je ne suis pas comme ça".

"Je ne veux pas d'un État dont d'autres personnes seraient chassées"

Michelle, une Israélienne

à franceinfo

Une semaine après l’attaque du Hamas, le 13 octobre, un habitant du village d’At-Tuwani a été visé intentionnellement par un colon. Il a reçu une balle dans l’abdomen et a été opéré d’urgence. Bassel a réussi à prendre des images de loin : "Vous voyez, il s’approche de lui, il frappe mon cousin puis le colon recule d’un mètre et après, il lui tire dessus à bout portant". Depuis, Bassel appréhende de sortir de chez lui. "C’est complètement fou. On est bloqués par l’armée, souligne-t-il. J’avais l’habitude d’aller me promener et aujourd’hui je ne peux plus, c’est très dangereux. Les soldats me disent : 'si tu ne restes pas chez toi, on va te bombarder comme on fait à Gaza'". 

Ceux et celles qui, comme Michelle, défendent le droit des Palestiniens, affirment que les actions des colons se sont radicalisées depuis les massacres du 7 octobre. "Ils essaient de rendre leur vie intenable et de les chasser. Et maintenant, ils sont encouragés par la guerre. Ils ont le sentiment de pouvoir tout faire parce que c'est une question de sécurité, de survie, peu importe ce que c'est, le pays les soutient. La grande majorité des gens ne diront rien contre eux", estime Michelle.