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Inde : une représentation paradoxale des femmes dans la vie politique

L'Inde a entamé le 7 avril 2014 un marathon électoral. Bien que de plus en plus de femmes votent dans le sous-continent, elles restent encore sous-représentées dans la vie publique et en politique. Les choses ont toutefois beaucoup évolué depuis ses premières élections générales de 1952. Aujourd’hui, elles contribuent largement à faire de leur pays la plus grande démocratie du monde.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Dabua à la périphérie de Faridabad, dans l'Etat de Haryana, le 10 avril 2014, lors de la troisième phase des élections générales indiennes. (AFP PHOTO / SAJJAD HUSSAIN)

En 2014, elles renouvellent leur parlement. Sur 814 millions d’inscrits, 426 sont des hommes, 388 des femmes.
 
Un article publié en mars 2014 dans l’Economic and Political Weekly, dont le sous-titre est intitulé La révolution silencieuse, montre comment entre 1962 et 2012 le taux de participation des femmes à un scrutin a augmenté. Les auteurs de l’étude, qui ont travaillé sur 16 Etats (93% des électeurs indiens), montrent que pour 1000 votants de sexe masculin, on comptait 715 votantes en 1960 et 883 dans les années 2000.
 
Une augmentation significative qui concerne non seulement les Etats les plus développés mais aussi les plus à la traîne socialement ou économiquement, comme le Madhya Pradesh, le Rajasthan ou l'Uttar Pradesh. Selon le recensement de 2001, le taux d'alphabétisation du pays se situe autour de 50% chez les femmes et de 70% chez les hommes.
 
Les femmes veulent se faire entendre
The Guardian montre par ailleurs que les statistiques sur les habitudes de vote des femmes en Inde racontent leur «détermination à exercer certains de leurs droits». Selon le journal rapportant des chiffres du Parlement indien, «le taux de participation des femmes est passé de 38,8% dans les années 50 à près de 60% dans les années 90, alors que pour les hommes l’augmentation n’a été que de 4%.»
 
Mais il existe un vrai paradoxe concernant leur position dans la vie publique. Dans ce pays conservateur, qui a réussi à produire un grand nombre de femmes politiques puissantes, comme Indira Gandhi dès les années 60, «l’égalité des sexes en matière politique est un objectif lointain», selon l’universitaire Virginie Dutoya.

 
Les Indiennes ne sont pas représentées au Parlement à la hauteur de leur participation aux scrutins : elles détiennent quelque 61 sièges, ce qui représente 11% des députés (27% de femmes à l’Assemblée en France).
 
Les partis politiques essentiellement masculins restent réticents à présenter des femmes aux élections. Ce sont les hommes qui ont bloqué le passage du projet de loi qui aurait obligé à réserver 33% de sièges pour les femmes dans la chambre basse du Parlement. Ce projet de quota, en discussion depuis 1996, bloque toujours, malgré la mobilisation. Les quotas ont pourtant été introduits dans les institutions locales (conseils de villages) en 1992, ce qui a permis la féminisation des politiques locales.

Des avancées malgré les archaïsmes
The Guardian revient sur une étude menée il y a quelques années par la Poverty Action Lab sur les femmes et le pouvoir. Les résultats portent sur l'impact de leur présence et de leur visibilité au niveau des conseils de villages. Ils ont «clairement montré que les hommes et les femmes ont des préférences différentes sur les biens publics». Ainsi, «les femmes ont investi davantage dans les infrastructures, ce qui a eu un impact direct sur l'amélioration du sort de leurs congénères. Leurs priorités concernent de meilleurs approvisionnements en eau ou plus d'investissements dans l'éducation. La visibilité des femmes leaders a également un impact dans l’encouragement des filles et des femmes à poursuivre leurs études et à envisager des possibilités de carrière différentes.»
 
Mais si les femmes prennent conscience de leur poids électoral, la route est longue qui les conduira au premier plan politique, à l’instar de Jayalalithaa Jayaram (une ancienne actrice appelée «Amma», la Mère), Mamata Banerjee (surnommée «Didi», la Grande sœur) et Mayawati (la reine des dalits). Dirigeant de puissants partis régionaux, ces leaders du sexe dit faible pourraient bien avoir leur mot à dire en cas d’alliance à l'issue des législatives. Comme quoi si les archaïsmes restent forts en Inde, le combat des femmes finit par en avoir raison.

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