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Grèce : le «IOU», une monnaie provisoire pour remplacer l’euro?

Après la large victoire du «non» au référendum du 5 juillet 2015, la Grèce va peut-être être contrainte d’émettre une monnaie provisoire. Ne serait-ce que pour verser salaires et retraites. Athènes pourrait ainsi produire des «IOU», une abréviation en anglais signifiant «I Owe You», «Je vous dois». Est-ce «la» bonne solution ? Only le IOU?
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les drapeaux européen et grec lors d'une manifestation pro-européenne à Athènes le 30 juin 2015 (AFP - Yannis Behrakis)

Il s'agit ni plus ni moins d'une promesse écrite de paiement, d'une reconnaissance de dette émise par un débiteur qui, pour une raison ou une autre, n'a pas d'argent liquide. L'Etat grec peut se retrouver dans cette position si la Banque centrale européenne cesse de fournir des euros au pays. Et une fois que les coffres des banques seront vides.
 
Selon de nombreux économistes, Athènes pourrait alors imprimer ces titres, sorte de bons du Trésor mais qui ne sont pas assortis d'intérêts, en guise de salaires, de retraites, ou pour payer ses fournisseurs. Le tout en attendant éventuellement de retrouver un accès à l'euro, ou de battre à nouveau monnaie, un processus très technique, très long et difficile logistiquement. Le ministre des Finances démissionnaire, Yanis Varoufakis, a ainsi fait savoir que les presses de son pays n'avaient «pas la capacité» d'imprimer des drachmes.

Sous forme papier ou sous forme de certificats électroniques, plus ou moins sécurisés, les IOUs pourraient être émis en parallèle avec des euros encore en circulation, et à parité avec le monnaie unique.

Dans un scénario imaginé par l'économiste Holger Schmieding, de Berenberg Bank, critique très virulent du gouvernement emmené par la gauche radicale Syriza, l'Etat grec verse un bon de 500 IOUs à un retraité touchant une pension de 500 euros par mois.

Les choses se compliquent, si le retraité décide d'utiliser ce bon pour faire ses courses. Le commerçant, méfiant, peut refuser de reconnaître à ces IOUs la même valeur que l'euro. Il pourrait alors, par exemple, demander 50 IOUs pour un panier de courses valant 30 euros. «Une devise dans laquelle on n'a pas de confiance s'effondre dans une inflation galopante», prédit Holger Schmieding. Selon lui, le malheureux retraité se retrouverait avec une pension de 500 IOUs ne valant plus que «100 ou 150 euros sur le marché noir, ou gris, ou je ne sais quoi». Loin de la valeur de départ en euros. Un scénario catastrophe inspiré de l'exemple du Venezuela, où la monnaie locale, le bolivar, n'en finit pas de plonger sur un marché noir où le dollar américain est roi.

Reste que les IOUs ne peuvent être assimilés à une vraie devise, pilotée par une banque centrale indépendante, servant d'unité de compte. Pour certains experts, ils pourraient cependant être utiles et faire office de monnaie parallèle transitoire, permettant à la Grèce de rester dans une zone grise, «où l'on ne sait si elle est dans ou hors de l'euro», écrit un éditorialiste connu du Financial Times, Wolfgang Münchau.

Ces IOUs, par exemple garantis par les recettes fiscales futures, ne serviraient, eux, qu'à retrouver un peu de liquide pour les échanges quotidiens.

Dans un billet internet qui pourrait presque sembler prémonitoire, Yannis Varoufakis, également économiste, imaginait en février 2014, bien avant d'arriver au gouvernement, une sorte de «monnaie parallèle» pour les Etats de la zone euro. Il expliquait les mécanismes permettant de créer une devise qui serait une «source de liquidité indépendante du marché», administrée «par les usagers», «n'impliquant pas les banques et (existant) en dehors de toutes les restrictions imposées par Bruxelles.»

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