Cet article date de plus de dix ans.
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Avant de monter dans l'avion, le petit Oumarou déclarait solennellement à sa famille : "Je vais bien travailler, vous serez fiers de moi !" Vingt-six ans plus tard, Oumarou Barry dirige, de Paris, une quarantaine de journalistes travaillant sur le continent africain.
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"Je me rappelais la voiture rouge de mon père, toujours là, et ce tricycle que les bambins du quartiers continuaient à utiliser... Les souvenirs longtemps enfouis ressurgissaient."
Lorsque Oumarou Barry revient pour la première fois - et à l'improviste - à Pita (Guinée) vingt-cinq ans après, il ne se doute pas du flot d'émotions qui va le submerger. Trop jeune pour s'en rappeler, Oumarou Barry n'a aucun souvenir ni des conseils de familles qui ont précédé son départ pour la France, ni de l'espoir placé en lui.
Son retour est une fête et une suite d'obligations.
Le "fils prodigue" - il n'aime pas l'expression - doit rendre visite aux anciens, aux oncles et tantes, à l'imam, aux officiels.
Mais c'est surtout l'occasion de retrouver sa mère qui, contrairement à ce qu'il croit alors, ne l'a pas oublié. Elle va lui montrer ses lettres et cette feuille sur laquelle elle inscrivait autant de petits bâtons que de jours d'absence de son fils.
Lorsqu'elle griffonne le premier trait, en 1987, le jeune Oumarou vient d'arriver à Viry-Chatillon (91) chez sa soeur aînée. Celle-ci s'est mariée à un professeur et installée en France depuis quelques années.
Les parents ont été clairs : "Ton papa là-bas, ce sera le mari de ta soeur, et ta maman là-bas, ce sera ta soeur !"
Les premières années sont difficiles. "Comme souvent à l'école, les autres enfants cherchaient quelqu'un à stigmatiser, alors j'étais le petit singe qui grimpait aux arbres et ne savait pas parler français."
Oumarou Barry "ne se laisse pas faire", mais réagit physiquement car il est sans mots.
Ses bulletins décrivent un jeune homme intelligent mais très turbulent.
Une "gentille dame, psychologue sans en avoir le titre" va l'inciter à parler, à se raconter.
Oumarou se calme et entreprend de ne pas "trahir la confiance placée en lui".
Ses parents lui écrivent, lui expliquent qu'ils comptent sur lui, qu'il doit étudier et "ne pas faire n'importe quoi".
Mais quand la maîtrise de la langue fait défaut, les chances ne sont pas les mêmes que pour ceux qui sont nés en France... le jeune garçon ne s'en apercevra vraiment qu'au lycée. Lorsque vient le moment de décider de son orientation, on lui propose un CAP et non des études supérieures comme il l'entend. Refus sans appel : "Je ne voulais pas, ce que j'aimais c'était Rousseau ou Voltaire, je voulais écrire."
Déjouer les pronostics devient son moteur, même s'il comprend que "d'autres se sentent blessés et ... fassent des conneries".
Oumarou Barry parviendra à ses fins, étudiera à la Sorbonne et s'ouvrira au monde grâce à son métier : journaliste.
"Ma construction d'homme s'est faite ici mais je sais maintenant que j'ai une base en Guinée, que des valeurs évidentes pour moi, comme le respect des anciens ou de la famille au sens large, me viennent de là-bas."
Aujourd'hui, Oumarou partage sa vie avec Kae, jeune Japonaise amoureuse de l'Afrique et de la France. L'été dernier, elle était du voyage à Pita. Elle y a fait forte impression. Quelques mots en pular, la langue des Peuls, ont suffi à montrer au clan qu'elle était prête à tous les efforts pour être acceptée.
Il n'en fallut pas plus pour qu'elle le fût.
Lorsque Oumarou Barry revient pour la première fois - et à l'improviste - à Pita (Guinée) vingt-cinq ans après, il ne se doute pas du flot d'émotions qui va le submerger. Trop jeune pour s'en rappeler, Oumarou Barry n'a aucun souvenir ni des conseils de familles qui ont précédé son départ pour la France, ni de l'espoir placé en lui.
Son retour est une fête et une suite d'obligations.
Le "fils prodigue" - il n'aime pas l'expression - doit rendre visite aux anciens, aux oncles et tantes, à l'imam, aux officiels.
Mais c'est surtout l'occasion de retrouver sa mère qui, contrairement à ce qu'il croit alors, ne l'a pas oublié. Elle va lui montrer ses lettres et cette feuille sur laquelle elle inscrivait autant de petits bâtons que de jours d'absence de son fils.
Lorsqu'elle griffonne le premier trait, en 1987, le jeune Oumarou vient d'arriver à Viry-Chatillon (91) chez sa soeur aînée. Celle-ci s'est mariée à un professeur et installée en France depuis quelques années.
Les parents ont été clairs : "Ton papa là-bas, ce sera le mari de ta soeur, et ta maman là-bas, ce sera ta soeur !"
Les premières années sont difficiles. "Comme souvent à l'école, les autres enfants cherchaient quelqu'un à stigmatiser, alors j'étais le petit singe qui grimpait aux arbres et ne savait pas parler français."
Oumarou Barry "ne se laisse pas faire", mais réagit physiquement car il est sans mots.
Ses bulletins décrivent un jeune homme intelligent mais très turbulent.
Une "gentille dame, psychologue sans en avoir le titre" va l'inciter à parler, à se raconter.
Oumarou se calme et entreprend de ne pas "trahir la confiance placée en lui".
Ses parents lui écrivent, lui expliquent qu'ils comptent sur lui, qu'il doit étudier et "ne pas faire n'importe quoi".
Mais quand la maîtrise de la langue fait défaut, les chances ne sont pas les mêmes que pour ceux qui sont nés en France... le jeune garçon ne s'en apercevra vraiment qu'au lycée. Lorsque vient le moment de décider de son orientation, on lui propose un CAP et non des études supérieures comme il l'entend. Refus sans appel : "Je ne voulais pas, ce que j'aimais c'était Rousseau ou Voltaire, je voulais écrire."
Déjouer les pronostics devient son moteur, même s'il comprend que "d'autres se sentent blessés et ... fassent des conneries".
Oumarou Barry parviendra à ses fins, étudiera à la Sorbonne et s'ouvrira au monde grâce à son métier : journaliste.
"Ma construction d'homme s'est faite ici mais je sais maintenant que j'ai une base en Guinée, que des valeurs évidentes pour moi, comme le respect des anciens ou de la famille au sens large, me viennent de là-bas."
Aujourd'hui, Oumarou partage sa vie avec Kae, jeune Japonaise amoureuse de l'Afrique et de la France. L'été dernier, elle était du voyage à Pita. Elle y a fait forte impression. Quelques mots en pular, la langue des Peuls, ont suffi à montrer au clan qu'elle était prête à tous les efforts pour être acceptée.
Il n'en fallut pas plus pour qu'elle le fût.
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