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"Ocean Viking" : trois questions sur le droit maritime et l'accueil des migrants en Méditerranée

Le bateau humanitaire "Ocean Viking" avec 234 migrants à son bord n'a pas encore pu accoster dans un port européen, mais va finalement être accueilli à Toulon (Var). Le navire est au cœur d’un désaccord entre Paris et Rome. Quelles sont les obligations des États européens en la matière ?

Article rédigé par Joanna Yakin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Les migrants à bord du bateau d'aide humanitaire Ocean Viking, affrété par l'organisation caritative SOS Méditerranée, le 6 juillet 2020 dans le port de Porto Empedocle en Sicile. Photo d'illustration. (GIOVANNI ISOLINO / AFP)

La France va finalement accueillir dans le port militaire de Toulon l'Ocean Viking, c'est ce qu'a annoncé le ministre de l'Intérieur, jeudi 10 novembre. Le bateau de l'ONG SOS Méditerranée est coincé en mer depuis une vingtaine de jours et transporte 234 rescapés des eaux à son bord. Le ministre de l'Intérieur estime néanmoins qu'"il n'y a pourtant aucun doute au regard du droit international et du droit de la mer que c'était à l'Italie de désigner un port sûr pour accueillir ce bateau". La veille, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran interrogé sur franceinfo tenait sensiblement le même discours estimant que le bateau devrait être "accueilli par l'Italie". La France accuse Rome de ne pas respecter ses engagements européens. Franceinfo fait le point sur les règles sur le sauvetage et l'accueil des migrants en Méditerranée par les pays européens.

1Quelles sont les règles en cas de naufrage ?

Ce n'est pas la première fois que des migrants sont bloqués en Méditerranée sur des navires humanitaires. Pourtant il y a bien des règles en la matière. D'abord, le principe de base, c'est le droit maritime qui le fixe, toute personne en situation de péril en mer doit être secourue, ça c'est incontestable. Donc, tout capitaine de bateau qui a connaissance d'une situation de détresse doit porter secours. Ce principe est réaffirmé dans toute une série de conventions internationales.
Autre obligation, les États côtiers doivent créer des centres de secours et de recherche en mer et collaborer pour porter secours. Plus d'une centaine d'États ont ainsi signé la convention sur la recherche et le sauvetage maritime, appelée convention SAR. Cette convention crée des zones SAR, c'est-à-dire des espaces géographiques de recherche et de sauvetage, chacune gérée par un État.

2Une fois les personnes secourues, comment s'organise le débarquement ?

La règle c'est que lorsqu'un navire intervient dans une zone SAR gérée par un État, il doit en premier lieu demander à cet État-là de pouvoir débarquer dans un lieu sûr et dans un délai raisonnable. Concrètement, si SOS Méditerranée sauve des naufragés dans la zone gérée par Malte, c'est alors à Malte que l'ONG doit demander de pouvoir accoster. Le problème c'est que certains pays ne répondent pas à ces demandes. Dans le cas de l'Ocean Viking, sans réponse de Malte et face à l'urgence, l'ONG a donc du étendre son appel pour trouver un port d'accueil. La règle, c'est de s'adresser au pays qui a la zone de recherche la plus proche. L'ONG a donc fait une demande à l'Italie mais elle non plus n'a pas répondu.

3Quels sont les engagements européens ?

La France a donc raison de dire que l'Italie n'a pas respecté ses engagements. Malte et l'Italie n'ont pas respecté le droit maritime et les différentes conventions, et ce n'est pas la première fois car en réalité c'est un sujet épineux au sein de l'Union européenne. Les pays dits "de première entrée", comme Malte ou l'Italie estiment être débordés par l'afflux de migrants et donc refusent d'accueillir ces bateaux.

En juin 2022, une majorité d'États membres s'étaient mis d'accord sur le principe d'un pacte de solidarité. Pour faire simple, les pays méditerranéens accueillent les bateaux dans leurs ports et les autres États européens s'engagent ensuite à prendre une part de demandeurs d'asile ou a minima aident financièrement les pays d'accueil.

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