"En tant que citoyen français, j'ai honte" : à Calais, un prêtre et deux militants en grève de la faim pour défendre les réfugiés
En grève de la faim depuis le 11 octobre, ils demandent des actions concrètes pour aider les migrants encore nombreux à Calais et les sortir d'une situation qu'ils jugent inhumaine.
Assis près d'un lit installé dans l'ancienne chapelle mortuaire de l'église Saint-Pierre de Calais (Pas-de-Calais), le père Philippe Demeestère a la mine fatiguée et les joues creusées. Mais ce prêtre jésuite de 72 ans le promet : il va bien et se dit déterminé. "La grève de la faim vient redire à toutes les intelligences qui se sont ankylosées, assoupies, ce qui se passe en France, explique-t-il. En 2021, dans une démocratie, c'est inacceptable. Il y a quelque chose qui rompt la fraternité humaine. Et en tant que citoyen français, j'ai honte."
Cela fait des années que le père Philippe réfléchit à cette grève de la faim mais la mort d'un adolescent soudanais, fin septembre près de Calais, l'a notamment convaincu de passer à l'action.
"On y va avec fermeté et il ne faut pas compter sur quoi que ce soit pour nous faire disparaître.
Le père Philippe Demeestère, en grève de la faimà franceinfo
À travers son action, il revendique l'application de la trêve hivernale aux exilés, "qu'ils puissent demeurer là où ils sont sans qu'on vienne les en chasser matin après matin." La trêve démarrera le 1er novembre. "Durant ce même temps, poursuit le prêtre, qu'on cesse de leur enlever leurs effets personnels parce qu'au moment de ces évictions, il y a des tentes qui sont prises, des sacs avec des téléphones, leurs papiers qui sont saisis." Enfin,il réclame des réunions régulières entre les associations non mandatées par l'État et les représentants de l'État afin de dialoguer.
Dans sa lutte, le père Philippe n'est pas seul. Anaïs et Ludovic, un couple de Calaisiens, l'accompagnent dans cette grève de la faim. "On n'a plus le choix, regrette Ludovic. Quand on sait que les courriers qui sont envoyés régulièrement aux autorités n'obtiennent soit pas de réponse, soit des réponses qui n'ont aucun sens, que les pétitions n'aboutissent pas, que les manifestations dans la rue n'aboutissent pas, il n'y a plus rien à faire."
"Heureusement, notre corps, on l'a encore, et c'est le seul moyen qu'on nous laisse encore pour nous exprimer."
Ludovic, en grève de la faimà franceinfo
Pour tenter d'apaiser la situation, la sous-préfète de Calais les a rencontrés et une réunion avec des associations a eu lieu le 22 octobre. Mais pour l'instant, hors de question d'arrêter leur grève de la faim. Ludovic appelle les citoyens qui le souhaitent à les soutenir en faisant un jeûne de 24 heures et en postant des messages sur les réseaux sociaux.
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