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Grèce : ils avaient voté Syriza et se sentent "trahis"

Deux jours avant les élections législatives anticipées grecques, France Info a rencontré un couple de retraités, Dina et Spiros. Comme de nombreux Grecs, ils avaient fondé beaucoup d’espoir en Syriza et se sentent aujourd’hui "trahis" et "déçus".
Article rédigé par Elise Delève
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
  (Dina, jeune retraitée, et Spiros, 62 ans, qui vient d'être licencié. Ils avaient fondé beaucoup d'espoir en Tsipras © Radio France - Elise Delève)

Les Grecs s’apprêtent à voter pour une troisième fois cette année. Dimanche ils éliront leurs députés lors d’élections législatives anticipées. Des élections convoquées après la démission d’Alexis Tsipras, le leader de Syriza. Il compte renforcer sa légitimer politique mais beaucoup se disent "trahis ". France Info a rencontré à Athènes un couple de retraités qui a été très déçus par Alexis Tsipras.

Grèce : ils avaient voté Syriza et se sentent "trahis" - reportage Elise Delève

 

Dina et Spiros habitent derrière chez le fleuriste d’un quartier résidentiel du nord d’Athènes. Dans une petite maison que Dina a failli quitter pour retourner dans son village de Patras mais le propriétaire, pour sécuriser ses rentrées d’argent, a accepté de baisser le loyer de moitié. Et pour faire encore plus d’économies, quand il fait froid, Dina part. "Avant on pouvait acheter du mazout pour se chauffer mais depuis quatre ans on ne peut plus car il est trop cher. Ce que je fais, c’est que de février à mars, je vais chez mes enfants à Paris, et comme ça je suis dans un appartement chauffé ".

"Trahis"

Dina en rigole, mais elle n’a pas vraiment envie. Elle touche 520 euros par mois et son compagnon Spiros vient d’être licencié. Ils pensaient qu’avec Syriza les choses allaient changer. "On y a vraiment cru, et là on est très déçus. Autour de nous, certains sont même déprimés. Personnellement je ne pourrais plus voter pour Tsipras parce qu’il a fait l’inverse de ce que j’espérais pour l’avenir ".

 

"On se sent trahis ", confie Dina. Spiros a le même sentiment. Tous les espoirs qu’ils avaient sont restés bloqués au 5 juillet, jour où une majorité de Grecs a dit non aux mesures d’austérité. "Depuis deux ans, la mentalité des Grecs s’est décalé vers la gauche et le referendum l’a prouvé. Et qu’est-ce qu’il a fait Tsipras ? ", s’énerve Spiros, "une semaine après il est allé signé l’accord avec l’Europe. Le peuple grec était uni contre le referendum et Tsipras a cassé cette unité … Il a trahi ce nouvel élan ".

Pas que du mauvais

Rien de positif dans le bilan de Tsipras ? C’est là tout le paradoxe. Comme beaucoup de Grecs qui ont voté Syriza, Spiros sait que le bilan de Tsipras n’est aussi noir que le tee-shirt qu’il porte. Et l’ancien informaticien a même une liste d’exemples. "Syriza a mis beaucoup de mesures sociales en place. Premièrement, les 300.000 citoyens les plus pauvres de Grèce reçoivent un coupon de 70 euros par mois pour faire des courses. Deuxièmement, les banques n’ont plus le droit de retirer la maison des familles qui ne peuvent plus payer leur emprunt comme en Espagne. Troisièmement, Syriza a fait rouvrir une des cinq usines qui produit du sucre grec. Elles avaient toutes fermées. Et quatrièmement, les Urgences sont maintenant gratuites et les chômeurs ne payent plus les cartes d’abonnements pour prendre les transports en communs ".

 

Et Spiros pourrait en citer d’autres. Il a suivi tous les mouvements de Syriza et il a l’impression d’avoir été trahi par un membre de la famille. 

Les migrants oubliés

Dina elle, ne veut plus parler politique, elle veut être dans l’action et en ce moment, elle vient en aide aux migrants. Elle pense que Tsipras a ignoré cette problématique qui bouscule l’Europe actuellement. Il y a pourtant des choses simples à faire. Par exemple sur l’île de Lesbos, où elle était la semaine dernière, il faudrait faciliter l’arrivée des migrants. Dina explique qu’après avoir échappé à la noyade, ils doivent marcher des dizaines de kilomètres pour arriver aux ONG. La retraitée aimerait que l’Etat grec mette en place des bus. "Ils arrivent avec d’énormes ampoules au pied. Il faudrait que l’Etat fournissent des navettes. Juste avant que je parte, l’association dans laquelle je suis bénévole a déboursé 300 euros pour qu’un bus prenne les migrants et fasse 45 kilomètres ".

 

Pendant que Dina raconte, Spiros enchaîne les cigarettes et pose ses deux paquets sur la table. Sur l’un deux, un coup de marqueur noir : "Fumer nuit gravement à vous et votre entourage " est remplacé par "La gauche nuit gravement à vous et votre entourage ". Une blague d’un ami de Spiros. Le couple continue de croire en la gauche et votera dimanche pour l’Unité populaire, le parti des frondeurs de Syriza.

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