Quand les Galeries Lafayette ou Kiabi pratiquent l'affichage publicitaire illégal
Au moins deux grands groupes ont recouru ce mois-ci à ce type de publicité proscrit par la loi.
Le "nouveau chic" consiste-t-il à polluer les murs de Paris ? Le passant pouvait le déduire d'un affichage sauvage largement constaté dans la capitale depuis le 7 septembre 2015. Le slogan et le logo de la nouvelle campagne publicitaire des Galeries Lafayette, vantée par le magazine Elle, ont été abondamment reproduits sur les murs, les trottoirs, ou les équipements publics de la capitale, en toute illégalité. La mairie de Paris va d'ailleurs porter plainte, selon Le Parisien. Exaspérés, certains habitants ont partagé sur Twitter les photos du délit :
Sol, barrières travaux/équipements publics. je ne compte plus la somme de nettoyage à #Paris 3e et 8e #lenouveauchic pic.twitter.com/kszGclYHdO
— Fabien Tipon and co (@FabienTipon) 11 Septembre 2015
Une autre entreprise, Kiabi, s'était signalée en lançant le 12 septembre "une opération illégale de street marketing dans les rues de Grenoble, de Lille ou de Reims", rapporte La Gazette des communes. Francetvinfo revient sur cette pratique sans-gêne en trois questions.
Les marques connues avouent-elles pratiquer l'affichage sauvage ?
L'affichage sauvage est-il assumé par les groupes qui le pratiquent ? Si paradoxal que cela puisse paraître, pas toujours. Par e-mail, les Galeries Lafayette ont indiqué qu'elles refusaient de répondre aux questions "liées au déploiement de (leur) nouvelle identité visuelle".
Contactée au téléphone par francetv info, la directrice de la communication des Galeries Lafayette, Alexandra Van Weddingen, a néanmoins confirmé que la campagne publicitaire "Le nouveau chic" était bien lancée par les Galeries Lafayette. Sur l'étalement du nouveau logo du grand magasin parisien dans des espaces interdits, elle s'est bornée à déclarer : "On ne fait pas de commentaires. Je n'ai pas à vous dévoiler la façon dont on travaille", avant de raccrocher. Le respect ou non de la loi relèverait-il du secret industriel aux yeux de l'entreprise ?
En revanche, chez Kiabi, la porte-parole Véronique Retaux s'est montrée plus prolixe. Interrogée sur les centaines d'affiches publicitaires placardées dans les rues de onze villes sans autorisation, le 12 septembre dernier, elle s'explique sur l'intention initiale : "On a voulu rester dans le ton décalé propre à la marque, surprendre les clients, être où on ne nous attend pas." Mais elle confesse aussi : "On ne va pas refaire ça. Plusieurs mairies ont protesté parce que nous n'avions pas demandé des autorisations, ce qui est exact."
Quel est l'impact espéré ?
Kiabi a rétropédalé d'autant plus vite que, dans une formule malheureuse, son agence de communication avait qualifié cette débauche publicitaire hors des clous d'"attentat marketing" dans La Voix du Nord. L'élément de langage était mal passé.
Il est pourtant très utilisé dans ce milieu. Patron de l'agence de pub "expérientielle" Monsieur Loyal, qui vend de temps à autre des opérations "street art" à ses clients, Mikael Lavollé explique en termes guerriers le bénéfice supposé de ces formes illégales de publicité : "Beaucoup de marques voient dans la rue et le street art une alternative aux médias traditionnels. Cela s'appelle de la 'guérilla marketing'." Le client, précise-t-il, doit toutefois faire la balance entre les avantages et les inconvénients, car "il peut y avoir des amendes qui tombent. Nike a été condamné [à plus de 60 000 euros d'amende, selon le site spécialisé Juritravail] pour avoir mis le maillot de l'équipe de France sur une statue. L'opération a créé du bruit et de la notoriété, mais l'addition est lourde."
Pourquoi des entreprises connues prennent-elles ce risque ? "Elles peuvent vouloir sortir une gamme un peu plus branchée, plus 'underground', renouveler le point de contact avec le public", développe-t-il. Autre bénéfice escompté : la résonance sur les réseaux sociaux, que l'on va doper au passage. "On peut payer tel ou tel blogueur pour qu'il relaie la campagne. La première photo ou le premier tweet influent doit souvent peu au hasard. C'est une sorte de marketing alternatif et moins cher."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.