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A la COP26, l'Australie met en avant une entreprise gazière et "choque" une association de victimes des incendies

Dans la zone des pavillons de la COP26, l'Australie a fait la démonstration d'un projet de capture et de stockage du carbone réalisé par l'une des entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre du pays. 

Article rédigé par Camille Adaoust - envoyée spéciale à Glasgow
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La militante Jo Dodds se tient devant le pavillon australien à la COP26, à Glasgow (Ecosse), le 3 novembre 2021. (CAMILLE ADAOUST / FRANCEINFO)

"Je suis tellement choquée, en tant que survivante des incendies, de voir qu'à une conférence sur la crise climatique, mon gouvernement accorde une place immense à une entreprise de combustibles fossiles." Mardi 2 novembre à Glasgow (Ecosse), Jo Dodds, Australienne présidente de l'association Bushfire Survivors for Climate Action (BSCA, en français "Les survivants des feux de broussaille pour l'action climatique"), a décidé de rendre visite au pavillon de son pays, dans le bâtiment abritant les négociations de la COP26.

En arrivant devant le grand stand strié de jaune et de vert, elle a découvert un large bloc bleu avec une inscription blanche : "Capture et stockage de carbone" par "Santos". Au-dessus, une vitrine faisait la démonstration du projet "Moomba", qui doit démarrer en 2024 en Australie-Méridionale. 

"Le gouvernement australien a choisi de mettre en avant cette entreprise de combustibles fossiles plutôt que le peuple australien, qui est victime des activités de cette même entreprise", réagit auprès de franceinfo Jo Dodds. Car parmi les plus grosses entreprises fossiles et cimentiers du pays, Santos est le dixième plus gros émetteur de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique. En 2018, la société a émis 17,72 millions de tonnes de CO2eq., selon un rapport de l'Université de Nouvelle-Galles du Sud (PDF, en anglais).

"Le feu était sur ma propriété"

"Ça envoie le message, à moi et aux milliers d'autres personnes victimes de la crise climatique, que notre gouvernement ne se soucie pas assez des Australiens pour dire non à une telle entreprise", accuse encore Jo Dodds. En mars 2018, cette habitante de Tathra (Nouvelle-Galles du Sud) a vu son quartier partir en fumée. "Il y a eu un feu catastrophique, qui a commencé à quelques kilomètres de chez moi." 

Quand elle se remémore cette expérience, ses yeux brillent encore derrière ses lunettes rouges. "J'étais en train de rentrer chez moi et j'ai vu cette colonne de fumée s'élever. En écoutant les alertes météo, j'ai compris que ça se dirigeait vers ma maison", raconte-t-elle. Tenue à distance, elle a observé pendant quatre heures les flammes gagner du terrain. "Puis à cinq heures, le vent s'est arrêté. Le feu était sur ma propriété, mais ma maison était sauvée." Des dizaines d'habitations n'ont pas eu cette chance.

"Les habitants n'ont même pas eu le temps de se remettre que nous étions déjà touchés par un autre incendie, en plein hiver, puis des inondations, puis l'incendie du 'Black Summer'..."

Jo Dodds, présidente de l'association BSCA

à franceinfo

"Ça fait vingt-et-un ans que j'habite dans cette région. Ce n'était pas comme ça avant ! Tout cela va arriver plus fréquemment", s'inquiète Jo Dodds. Ces feux, attisés par des températures élevées et des vents violents, seront en effet "très certainement" plus fréquents et plus intenses avec un climat plus chaud, confirme le dernier rapport du Giec. "Les gens payent pour l'inaction de mon gouvernement", regrette-t-elle.

Pour le gouvernement, la technologie est la solution

Tout comme elle, l'ancien Premier ministre Malcolm Turnbull a critiqué cette place accordée à Santos : "Regardez le pavillon australien : vous avez une société gazière mise apparemment en avant sur l'insistance du ministère de l'Energie, qui pense que notre politique énergétique doit se concentrer sur la combustion du gaz, quand l'objectif principal est en fait d'arrêter de brûler des combustibles fossiles", a-t-il dit, comme le rapporte The Guardian (en anglais)

L'actuel chef du gouvernement, très critiqué pour la faiblesse des engagements climatiques de son pays, premier exportateur mondial de charbon, a toutefois défendu sa stratégie : "La technologie fournira les réponses pour une économie décarbonée (...) et d'une manière qui ne privera pas nos concitoyens, surtout dans les pays en développement, de leurs moyens de subsistance ou de la chance d'améliorer leurs conditions de vie", a déclaré Scott Morrison à Glasgow devant les chefs d'Etat. 

"Tant qu'on ne met pas les victimes au centre des conversations, qu'on ne parle pas du prix du changement climatique, nous ne prenons pas les bonnes décisions", conteste Jo Dodds, en chemin vers le pavillon australien. Mercredi, la vitrine de Santos a été retirée du stand, mais la militante compte tout de même rester à proximité pendant toute la durée de la COP, afin d'inciter les autres Etats présents à "réclamer des comptes" à l'Australie. Sollicité par franceinfo, le pavillon australien n'a pour le moment pas répondu.

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