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Que provoquerait le "shutdown" américain en France ?

Pour comprendre l'enjeu de la paralysie de l'Etat fédéral américain, francetv info a imaginé les conséquences de ce blocage du budget s'il avait lieu en France.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Si la France connaissait un blocage de son budget comme c'est le cas aux Etats-Unis, le musée du Louvre devrait rester fermé au public. (DANIEL THIERRY / AFP)

"Shutdown." Autrement dit, c'est la paralysie et le chômage technique pour les Etats-Unis. Le Sénat et la Chambre des représentants ne sont pas parvenus à trouver un accord sur le budget américain 2014, avant le lundi 30 septembre à minuit. Conséquence, plus de 800 000 fonctionnaires fédéraux - sur environ 2 millions - se retrouvent mardi en congés forcés, sans solde. Seuls les postes nécessaires à la sécurité publique sont maintenus - contrôleurs aériens, gardiens de prison, ingénieurs dans le nucléaire, comme le détaille L'Express.

La France, avec ses 2,5 millions de fonctionnaires de l'Etat, ne craint pas vraiment de "shutdown" en raison du fonctionnement de ses institutions. L'exécutif a la possibilité de mettre en œuvre par ordonnance une partie du budget pour éviter la paralysie, un cas qui ne s'est d'ailleurs jamais présenté. Mais pour illustrer la situation de blocage qui inquiète les Américains, francetv info a imaginé un scénario similaire appliqué à l'Hexagone.

La vie quotidienne peu perturbée

Outre-Atlantique, les campagnes de vaccination contre la grippe ne sont plus financées. Et, même si les urgences continuent de tourner, certains hôpitaux publics sont contraints de refuser des malades, à l'image de l'hôpital de Bethesda, dans la banlieue de Washington, comme le note Le Figaro. En France, le budget des hôpitaux est voté à part, dans la loi de financement de la sécurité sociale, rendant ce scénario improbable.

Aux Etats-Unis, l'entretien de la voirie et le ramassage des ordures ne sont plus assurés dans la capitale, Washington. Dans une fiction à la française, aucune ville ne devrait pâtir du blocage puisque ces services sont gérés par les collectivités territoriales.

Contrairement aux Etats-Unis, la France pourrait voir son système éducatif touché. En effet, si les établissements sont gérés par les collectivités, les professeurs reçoivent leur salaire de l'Etat. Les élèves n'auraient donc pas cours, mais pourraient tout de même être accueillis à l'école, à l'image du service minimum lors des jours de grève, comme le relève le Huffington Post.

Pas de visa pour l'étranger, pas de serveur à l'Elysée

En France, comme aux Etats-Unis, il serait difficile d'espérer obtenir un visa, un titre de séjour ou de voir sa demande de naturalisation prise en compte. Aux Etats-Unis, lors du "shutdown" de 1995-1996, quelque 500 000 demandes de visas et 200 000 de passeports n'avaient pas été traitées.

Enfin, même l'Elysée devrait se serrer la ceinture dans ce scénario catastrophe. François Hollande ne pourrait plus compter sur autant de personnel. Barack Obama doit en effet se priver de 1 246 personnes sur environ 1 700 employés, comme le détaille Metro. Cela comprend une grande partie du personnel d'entretien, de cuisine et de sécurité.

Le fisc au ralenti

En France, sur les 150 000 fonctionnaires que compte le ministère de l'Economie et des Finances, 120 000 seraient au chômage technique. Ainsi, aux Etats-Unis, environ 80% des fonctionnaires du département du Trésor vont être contraints de s'arrêter, selon une infographie du New York Times (en anglais).

La majorité des troupes, en France comme aux Etats-Unis, se compose d'employés du fisc, chargés de la collecte des impôts. Comme le note le Washington Post (en anglais), c'est justement ce service qui s'avère le plus touché par le "shutdown" : 90 000 employés sont au chômage technique, soit 90% des fonctionnaires de l'IRS, le fisc américain. Celui-ci devrait donc assurer un service minimum avec un peu moins de 9 000 fonctionnaires.

En France, le fisc se priverait d'environ 105 000 agents sur les quelque 116 000 qui travaillent pour Bercy. Certains Français pourraient se réjouir de la situation en s'imaginant passer à travers les mailles d'un contrôle fiscal. Mais cela signifierait surtout qu'il serait très difficile pour les contribuables d'obtenir le moindre renseignement sur leur avis d'impôt.

Difficile de divorcer

Pendant la durée d'un éventuel "shutdown", il deviendrait compliqué en France de divorcer, de régler un conflit lié à un héritage ou d'attaquer son patron devant les prud'hommes. En revanche, les tribunaux continueraient à sanctionner les infractions pénales, avec des délais potentiellement plus longs.

Effectivement, la machine se grippe pour le département américain de la Justice, puisque les procédures civiles ne seront plus traitées, contrairement aux procédures pénales. Pourtant, la justice américaine continue de fonctionner avec la grande majorité de ses effectifs (seuls 18 000 fonctionnaires sur 114 486 sont à l'arrêt forcé).

Un choc pour le tourisme

En cas de "shutdown" appliqué à la France, les musées du Louvre, d'Orsay ou du quai Branly seraient fermés au public. Plus de 300 parcs zoologiques et aquariums, tels que le zoo de Beauval (Loir-et-Cher), cesseraient leur activité touristique. Enfin, les dix parcs nationaux de l'Hexagone (les Cévennes, les Calanques, le Mercantour...) seraient privés des fonctionnaires chargés de leur préservation. En revanche, la tour Eiffel resterait accessible au public, puisqu'elle est gérée par une société d'économie mixte, comme l'explique le Huffington Post. 

Les 368 parcs nationaux et musées fédéraux américains subissent en effet une fermeture pure et simple, comme le notent Les EchosPar exemple, le zoo de Washington, le parc national de Yellowstone et les grands musées d'art et d'histoire vont rester portes closes. Au total, cela représenterait une perte de 30 millions d'euros par jour pour l'économie des Etats-Unis.

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