Cet article date de plus d'un an.

Guerre au Soudan : comment les combats ont poussé des centaines de milliers de personnes à fuir dans toute la région

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés s'attend à ce que "plus de 800 000 personnes" se déplacent à l'intérieur du pays ou dans des Etats voisins comme l'Egypte ou le Tchad.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Des réfugiés soudanais attendent de recevoir des kits d'aide humanitaire préparés par l'Unicef, à Koufroun, au Tchad, le 30 avril 2023. (GUEIPEUR DENIS SASSOU / AFP)

La trêve ralentira-t-elle les déplacements de population ? Les dirigeants de l'armée et des forces paramilitaires en guerre au Soudan ont convenu, mardi 2 mai, d'une pause de sept jours dans les combats du 4 au 11 mai. Jusqu'ici, aucune des précédentes trêves n'a été respectée. Les combats, qui ont débuté le 15 avril, ont fait plus de 500 morts et des milliers de blessés. Le conflit a plongé le pays, l'un des plus pauvres au monde, dans une "véritable catastrophe", selon l'ONU. Des centaines de milliers de personnes fuient les violences à l'intérieur du Soudan et dans les pays voisins. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) dit s'attendre à ce que "plus de 800 000 personnes" se déplacent. Franceinfo fait le point sur la situation au Soudan.

Au Soudan, plus de 330 000 déplacés

Selon l'Organisation internationale pour les migrants (OIM), plus de 334 000 personnes ont fui les combats à l'intérieur du Soudan. Il s'agit principalement de migrations dans les Etats de Khartoum, du Nord, du Nil Bleu, du Nord Kordofan, du Darfour Nord, du Darfour occidental et du Darfour Sud, complète l'ONU.

Les organisations internationales sont particulièrement préoccupées par la situation au Darfour. Cette région de l'ouest du Soudan est le théâtre d'une guerre civile depuis 2003 et la situation humanitaire y reste désastreuse, rappelle Amnesty International. Le HCR craint que ces affrontements alimentent les tensions ethniques et intercommunautaires préexistantes, concernant les terres et l'accès aux ressources, et provoquent des déplacements encore plus importants.

Avant le début des combats le 15 avril, il y avait déjà 3,7 millions de personnes déplacées à l'intérieur du Soudan, la plupart dans l'ouest du Darfour.

Au Tchad, 30 000 réfugiés sont arrivés

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés estime que 30 000 personnes sont arrivées au Tchad, dont plus de 21 000 ont pu être identifiées jusqu'à présent. "Nous poursuivons les opérations de vérification et d'enregistrement", a précisé une porte-parole de l'agence onusienne. 

Début mai, au moins 20 000 personnes ont trouvé refuge dans un camp de fortune dans le village tchadien de Koufroun, selon le HCR. Venus à dos d'âne, à cheval, sur des charrettes ou à pied, ces réfugiés sont très majoritairement des femmes et des enfants. Ils sont originaires de la petite ville soudanaise de Tendelti, à une vingtaine de kilomètres de Koufroun.

A Koufroun, l'Unicef distribue des kits d'urgence avec des ustensiles de cuisine, des couvertures et des nattes. L'ONG Première urgence internationale y a installé une antenne médicale de fortune. Trois agents de santé proposent des consultations, d'abord à toutes les femmes, aux enfants et aux personnes âgées. "Les principales pathologies sont les maladies respiratoires, la gastro-entérite et la malnutrition", explique le chef de l'ONG sur place, interrogé par l'AFP.

Des milliers d'autres réfugiés risquent d'arriver encore à Koufroun, et ailleurs au Tchad, car plus de 1 300 km de frontière extrêmement poreuse séparent les deux pays. Déjà, avant le 15 avril, 400 000 réfugiés soudanais vivaient au Tchad dans 13 camps et au sein des communautés locales.

En Egypte, 40 000 personnes sont entrées

Quelque 40 000 Soudanais sont aussi arrivés en Egypte, rapporte le HCR. Mais seuls les voyages en bus avec des permis spéciaux sont autorisés pour traverser la frontière et le passage à pied est interdit, précise la BBC (en anglais). Selon le média britannique, de nombreuses familles ont été bloquées à la frontière, car les chauffeurs de bus demandaient près de 40 000 dollars (environ 36 000 euros) pour passer la frontière. Dans Libération (article payant), une réfugiée soudanaise originaire de Khartoum raconte avoir payé 400 euros sa place de bus.

Près d'Assouan en Egypte, des associations et la population locale se mobilisent pour venir en aide aux réfugiés. "Les habitants nous ont ouvert leurs écoles, leurs mosquées et même leurs maisons pour dormir", raconte un nouvel arrivant à Libération. Sur les réseaux sociaux, des internautes égyptiens appellent à accueillir les réfugiés sans conditions, sous le hashtag "Pour l'entrée des Soudanais sans visa".

Sur place, l'aide est fournie par les Nations unies et distribuée par le Croissant-Rouge égyptien. Une première aide d'urgence contient de la nourriture sèche, des services médicaux et de télécommunications et une aide logistique pour les personnes ayant du mal à se déplacer.

Au Soudan du Sud, plus de 20 000 déplacés

Au total, 27 275 personnes sont arrivées au Soudan du Sud, selon le HCR. Il s'agit en majorité (20 932) de Sud-Soudanais. Il y a également 2 679 Soudanais ainsi que 3 364 ressortissants d'autres pays. Les personnes arrivant à la frontière sont des personnes âgées, des personnes handicapées, des femmes enceintes, des femmes avec de jeunes enfants et des familles nombreuses.

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés précise sur son site avoir mis en place un centre de transit où les nouveaux arrivants peuvent recevoir des secours d'urgence et bénéficier de services de protection de l'enfance, de réunification familiale et de services pour contacter leur famille et planifier la suite de leur voyage.

Ce nouvel afflux de réfugiés s'ajoute au million de déplacés déjà présents dans le pays en raison de la guerre qui ravage le pays depuis 2013, rappelle Médecins sans frontières. Installés dans des camps, les réfugiés n'ont qu'un accès très limité à l’eau potable, à des installations sanitaires et à des structures de santé. Ils font constamment face aux menaces de vols, de pillages et de violences sexuelles, alerte l'ONG.

En Ethiopie, plus de 8 000 personnes réfugiées

Quelque 8 900 personnes ont fui vers l'Ethiopie, dont 870 Soudanais. Le HCR a déployé des équipes aux deux principaux points de passage de la frontière dans les régions d'Amhara et du Benshangul-Gumuz. Depuis des décennies, l'Ethiopie accueillait déjà près de 990 000 réfugiés provenant de pays voisins comme le Soudan du Sud, la Somalie, l'Erythrée et le Soudan, rappelle l'ONU.

En République centrafricaine, environ 6 000 réfugiés

Le HCR estime qu'environ 6 000 réfugiés ont maintenant franchi la frontière centrafricaine, où l'organisation a déployé une équipe d'urgence. L'enregistrement des réfugiés devrait bientôt commencer et des évaluations des possibilités de réinstallation des réfugiés sont en cours pour les éloigner de la frontière et les placer dans des lieux plus sûrs. Ces déplacements entraînent une hausse du prix de l'alimentation, alerte l'ONU. Par exemple, un sac de sucre de 50 kg, qui se vendait 40 000 francs CFA (plus de 65 dollars) avant le conflit, vaut aujourd'hui 80 000 francs CFA (134 dollars) à Birao. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.