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Maroc : une vidéo violente relance la question du harcèlement des femmes

La question du harcèlement des femmes au Maroc a rebondi après la diffusion sur les réseaux sociaux d'une vidéo montrant une horde de jeunes hommes traquer une jeune femme marchant seule dans la rue à Tanger.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Photo d'archives (EMILY IRVING-SWIFT / AFP)

La vidéo a été postée le 30 juillet 2017 et visionnée plus de 600.000 fois sur Youtube. La séquence dure une dizaine de secondes: on y voit une femme habillée en jean et T-shirt, visiblement prise de panique, poursuivie par de nombreux hommes (pour la plupart jeunes) qui tentent de l'encercler sur une avenue de Tanger.
 
Les médias locaux et défenseurs des droits de l'Homme ont immédiatement condamné le harcèlement de la jeune femme. Dans un pays qui se veut, selon les discours officiels, chantre d'un islam tolérant et où les femmes n'ont pas l'obligation de porter le voile, marcher seule dans la rue relève parfois du parcours de la combattante: elles y subissent fréquemment remarques désobligeantes et insultes.


 «Je suis autant scandalisée par cette agression violente et collective que par les réactions désignant la victime comme coupable du fait de sa tenue vestimentaire supposée provocante, même si en fait elle ne portait qu'un simple jean et un tee shirt», déclare à l'AFP Nouzha Skalli, militante pour l'égalité des sexes et ex-ministre en charge des droits des femmes.
 
Ces images ont suscité, en effet, des réactions contrastées sur les réseaux sociaux: si certains désapprouvent, d'autres s'en sont pris à la victime en jugeant sa tenue «indécente». «Elle peut se dénuder si elle veut, mais pas dans notre ville conservatrice!», a commenté un internaute. «Cette traînée a eu ce qu'elle méritait!», a écrit un autre.


«Crise de valeurs»
Le Maroc présente un bilan pour le moins déplorable sur les violences à caractère sexuel ou sexiste: près de deux Marocaines sur trois sont victimes de violences, selon des chiffres officiels. Et les lieux publics sont les endroits où la violence physique à leur égard est la plus manifeste.
 
«Des faits pareils existaient seulement dans des pays comme l’Afghanistan ou l’Egypte. Je suis consternée de voir que nous ne sommes pas épargnés. Nous assistons au développement d’une mentalité insupportable qui considère que la femme est coupable dans l’espace public: coupable d’être habillée d’une manière qui ne plaît pas à tout le monde, ou de ne pas être accompagnée d’un homme lorsqu’elle est dehors », s’insurge, dans La Dépeche.ma,  l’ex-ministre de la Famille Nouzha Skalli.
 
«C'est une vraie crise de valeurs dans notre société. Des femmes sont agressées dans la rue, humiliées, insultées. A un certain moment de la nuit, ça devient l'état de siège pour elles», s'inquiète Khadija Ryadi, ex-présidente de l'Association marocaine des droits humains (AMDH) et prix de l'ONU pour les droits de l'Homme en 2013.
        

«Sport national»
Les médias tirent la sonnette d'alarme sur ce phénomène. «La traque collective d'une jeune Marocaine remet sur le devant de la scène la question du harcèlement sexuel», écrit le site Hespress.ma.
 
La religiosité gagne du terrain. Cette agression de Tanger n’est pas la première. Ces dernières années, plusieurs cas d'agressions ont défrayé la chronique, notamment sur les plages où les femmes hésitent de plus en plus à se mettre en maillot de bain. Ces agressions revêtent un caractère collectif et décomplexé, par des jeunes se considérant comme «défenseurs de la vertu», regrette Nouzha Skalli, qui dénonce une «idéologie moyenâgeuse et dangereuse».
        
En 2016, une page Facebook, fermée depuis, incitait à prendre en photo des femmes en bikini pour les désigner à la vindicte publique.

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