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Mali: premières patrouilles des forces du G5 Sahel

Progressivement, les forces militaires des pays du G5 Sahel se mettent en place. Bientôt, une jonction est prévue entre soldats maliens et burkinabè. Une montée en puissance nécessaire pour permettre à la France de se retirer, en partie ou en totalité, de la région. Des journalistes de l'AFP ont suivi une des premières patrouilles de l'armée malienne soutenue par des soldats français.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Les premières patrouilles des forces du G5 Sahel, le 2 novembre 2017. (Daphné BENOIT / AFP)

Reportage Daphné Benoit (AFP)
Dans un nuage de poussière ocre, drapeau national claquant au vent, une colonne de pick-up maliens armés progresse lentement dans la zone frontalière avec le Burkina et le Niger, pays partenaires de la toute première opération du G5 Sahel. Dans le convoi, une vingtaine de blindés de la force française Barkhane veillent, assurant la sécurité.

«Cette piste entre Tessit et Kayrougouten (centre-Mali) est un axe majeur, emprunté par les commerçants et la population», explique à l'AFP le lieutenant Gaoussou Diara, qui commande une centaine de soldats maliens mobilisés pour cette opération transfrontalière inédite. «Nous sommes là pour sécuriser la zone et rassurer les gens, qu'ils puissent vivre une vie normale», ajoute-t-il.
 
Dans cette vaste étendue rocailleuse des trois frontières, peuplée d'éleveurs nomades et parsemée d'épineux, les trafics en tous genres prolifèrent. Et les groupes djihadistes, liés à l'Etat Islamique ou à al-Qaïda, se sont implantés à la faveur des carences des Etats. Côté malien, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière burkinabè, le village d'In Tillit porte les stigmates du passage de groupes armés. Au beau milieu des maisons en torchis trône un panneau frappé du sceau noir djihadiste. Menacés, le maire et l'enseignant ont fui les lieux. Sur le tableau noir de l'école, une date: 1er juin 2017.
           
Paysan ou terroriste ?
«Je ne peux pas vous parler, je ne pourrai plus rien vendre», s'excuse le propriétaire d'une modeste épicerie. «Les habitants ont peur. Les forces maliennes ne viennent pas souvent ici», explique Mamadou, un interprète. «Nos soldats ne peuvent pas être positionnés partout» dans ce pays deux fois plus grand que la France, se défend le lieutenant Diara. «Mais aujourd'hui, grâce au G5 Sahel, nous allons être plus forts pour lutter contre le terrorisme à nos frontières», assure-t-il.

Sur le papier, cette coalition de cinq nations (Mali, Niger, Mauritanie, Burkina Faso et Tchad) parmi les plus pauvres du monde doit atteindre d'ici mars 2018 une capacité de 5.000 hommes, puis parvenir à sécuriser ses frontières communes de manière autonome. La France, dont 4.000 hommes traquent les djihadistes à travers la bande sahélo-saharienne, s'est engagée à soutenir le G5 Sahel. «Nous n'avons pas les mêmes moyens que Barkhane, mais nous avons acquis beaucoup d'expérience avec eux. Et aujourd'hui, c'est nous qui menons la mission première, avec nos amis français en appui», affirme avec fierté le lieutenant Diara, après avoir ordonné le contrôle de deux motos passées à proximité du convoi.

         
«Pour eux, c'est plus facile de distinguer un terroriste d'un paysan, il sont chez eux. Et leur connaissance du terrain est primordiale», commente le capitaine d'infanterie français Gauthier (par mesure de sécurité, les militaires français ne donnent que leur prénom) dans son véhicule blindé, qui vient de franchir avec succès un oued asséché à l'endroit indiqué par les forces maliennes.

Porte de sortie
Dans les faits, l'implication de Barkhane dans la force naissante du G5 Sahel est massive. Sur le terrain, les Maliens sont escortés par des dizaines de soldats français. Et si les décisions opérationnelles sont prises par un poste de commandement de la force conjointe à Niamey, c'est depuis une base avancée française implantée dans la région d'In Tillit que s'opère la coordination tactique de l'opération «Hawbi», nom de baptême de cette première opération.
           
«Nous sommes le petit cerveau de l'opération», explique le lieutenant-colonel français Marc-Antoine depuis la base avancée, en énumérant les moyens fournis aux troupes africaines engagées: appui aérien (chasseurs, hélicoptères, renseignement), artillerie, logistique, missions civilo-militaires...

Le démarrage des acteurs du G5 Sahel, lui, est poussif. Les forces de trois pays (Mali, Niger et Burkina Faso) viennent tout juste de se déployer, avec une dizaine de jours de retard. Une jonction est cependant prévue prochainement entre forces maliennes et burkinabè en territoire malien.

Plus que les résultats de l'opération en soi, le but est que ces pays réussissent à travailler ensemble pour assurer leur propre sécurité. «Nous sommes là pour les aider à monter en puissance», fait valoir le lieutenant-colonel Marc-Antoine. «Ces opérations, à terme, visent à ménager une porte de sortie aux forces françaises», engagées au Sahel depuis 2013, conclut-il.        

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